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Sorti en 2001, en décembre plus précisément, il semble difficile de dissocier ce film de la folie patriotique confuse et propice à tous les délires les plus dangereux qui accompagnait alors les effets immédiats de l'attaque du World Trade center. C'est pourtant un hasard malencontreux qui a rassemblé l'attaque terroriste et le film, même si on imagine que le très droitier producteur Jerry Bruckheimer a pu de son côté faire lui-même l'amalgame. Mais rappelons les faits tout d'abord: à l'origine, se trouve un fiasco militaire des plus catastrophiques, tellement honteux que personne ou presque n'en parlait plus. Dans le pays où encore aujourd'hui, on est persuadé que la guerre du Vietnam s'est soldée par un match nul, on n'aime pas perdre. En 1993; en Somalie meurtrie par la famine, l'O.N.U et quelques troupes Américaines et Pakistanaises étaient présentes alors qu'une junte militaire extrémiste semait la terreur et empêchaient la distribution de nourriture. En l'absence de provocation directe à l'encontre des troupes de pacification, celles-ci ne pouvaient opérer. Les décideurs Américains ont pris la décision de frapper, en enlevant le leader des terroristes, Mohammed Farrah Aidid, mais le raid a vite dégénéré en bataille rangée, au cours de laquelle plus de mille personnes vont trouver la mort.
Le film est basé sur l'enquête de Mark Bowden, un journaliste fasciné par cette affaire passée inaperçue ou presque, et Jerry Bruckheimer a décidé de produire le film afin de célébrer l'esprit de corps des militaires Américains. Il a eu la bonne idée de faire appel à Scott, un metteur en scène politiquement neutre qui est passé comme chacun sait expert dans la re-création esthétiquement forte de mondes cohérents et saisis dans leur globalité, en plus d'avoir un flair prononcé pour l'action spectaculaire. Du coup, on se retrouve presque avec... deux films!
D'un côté, le fiasco est conté en termes héroïques, qui ne sont pas sans parler le film Air Force de Howard Hawks (1943), qui montrait la façon dont les soldats d'un bombardier en vol lors de l'attaque de Pearl Harbor prenaient les choses en main, et faisaient simplement leur métier (Le grand thème de Hawks, bien sur). Ici, dès qu'il est clair que la bataille est mal engagée, les militaires font corps avec efficacité, ce qui finit par donner au film un ton vaguement douteux. Après tout, les 19 Américains morts doivent-ils avoir tant de priorité sur les mille Somaliens (De tous les camps) qui ont péri? Le chauvinisme habituel gangrène un peu trop ce film...
Mais de l'autre côté, Scott, qui n'a jamais tellement goûté ce type de réflexe patriotique, s'est permis quelques messages subliminaux, et se borne pour le reste à tenter de raconter le film comme Bowden l'a fait, en montrant seconde après seconde le chaos qu'ont traversé les protagonistes. Les scènes coupées présentes sur les DVD démontrent que la production a atténué un aspect du film qui tendait à charger le général responsable de l'attaque, pour se concentrer sur les héros, mais dans l'ensemble, la narration minute après minute des péripéties est un tour de force, dont Scott se tire avec une certaine objectivité. Pas Bruckheimer, qui depuis a assumé avec plomb et sans-gêne le militarisme crétin (Pléonasme, je sais) du film. Et de toutes façons, il est clair que tout film de guerre, qu'il la dénonce ou la glorifie, trouvera chez les imbéciles fascinés par les batailles un écho favorable: voir à ce sujet Saving Private Ryan, The Thin Red Line, Apocalypse Now, ou Full Metal Jacket.