Douglas Fairbanks, à l'aube des années 20, était clairement prêt à franchir le pas: ce film montre à quel point ses ambitions vont vers le film d'aventures spectaculaires, même si The Mollycoddle est une comédie avant tout. Un "mollycoddle", c'est une poule mouillée. Douglas Fairbanks incarne donc un Américain fier de ses racines, mais qui a quitté les Etats-Unis à l'age de quatre ans, et se comporte comme une femmelette, résidant à Monte Carlo, portant monocle et s'imaginant New York comme une ville du far West dans laquelle les gens se déplacent en diligence. Il n'a jamais travaillé de sa vie, porte une moustache ridicule, et voit venir les touristes Américains avec une certaine curiosité naïve... Quelques amis Américains, justement, de passage à Monte-Carlo le persuadent de "rentrer au pays" avec eux, mais il tombe alors dans une sombre histoire d'espionnage dans laquelle on va justement le soupçonner d'être un espion...
Histoire de métamorphose, comme souvent les petits films d'aventures produits par Fairbanks, The Mollycoddle sera suivi d'un film important: The mark of Zorro (Fred Niblo, 1920). Les deux films ne sont pas sans rapports... Il est tentant d'imaginer que le mystérieux espion qui surveille les agissements louches d'un contrebandier en diamants (Wallace Beery, en "villain" classique), soit précisément le personnage incarné par Fairbanks. C'est d'ailleurs ce que croient les bandits pendant un temps. Mais il est, contrairement à Don Diego dans le futur film de Niblo, authentiquement un naïf au coeur pur! D'une certaine façon, la moustache de Fairbanks est l'emblème de son inefficacité, et lorsqu'il devient un homme (Et quel homme, quelle fougue, quelle prestance!), il la coupe. Mais dans les films d'aventures musclées qui suivront, Zorro sera le seul héros qui n'aura pas droit à sa moustache chez Doug Fairbanks!
Un petit film, certes, mais pas de temps mort, et les images authentiques captées sur la réserve Hopi de l'Arizona sont magnifiques. Fleming, pour sa deuxième et dernière collaboration avec l'acteur-producteur, fait merveille avec les constantes ruptures de ton de ce film qui commence en comédie mondaine, se poursuit sur un bateau, avant de se terminer dans les déserts magnifiques de l'Ouest Américain. Complice de toujours dans les films de Fairbanks, Charles Stevens interprète un petit rôle, bien qu'il soit le petit-fils de.... Geronimo. C'est du moins ce que la publicité a si souvent annoncé, alors que c'était en réalité totalement inventé. Par contre la passion du producteur pour la culture Indienne débouche sur des images respectueuses, et surtout authentiques, du territoire des Hopis, pas si souvent filmés. Donc ce film mineur sur la contrebande de diamants est une mine d'or!