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23 mars 2024 6 23 /03 /mars /2024 18:12

Voici le 16e et dernier film de Lean, produit dans des circonstances difficiles, sur place comme le voulait la tradition imposée par le metteur en scène sur ses films géants, et maintenue depuis Bridge on the river Kwai: cette fois, le cirque Lean pose ses roulottes en Inde pour une adaptation de l'un des romans mythiques de E. M. Forster. L'auteur, souvent adapté par James Ivory, était jusqu'à ce film difficile à adapter parce que les ayant droits freinaient des quatre fers... Lean, il faut croire, a changé les chose à ce niveau! Et si c'est un metteur en scène inquiet qui s'est lancé dans ce qu'il sentait bien être son dernier film, le flop monumental de Ryan's daughter lui restant en travers de la gorge, le succès public aura tôt fait de le rassurer...

Maintenant, quand on a vu les derniers films respectifs de Clouzot (La prisonnière), Hitchcock (Family plot), ou Chaplin (A countess in Hong-Kong), c'est toujours avec appréhension qu'on aborde le film testament d'un grand metteur en scène. Tout le monde n'a pas la chance de finir sur un Eyes wide shut, ou un Tabu...

Avec ce très beau, très long aussi, film, Lean apporte une belle coda à son univers si particulier. C'est l'histoire d'une jeune Anglaise arrivée en Inde durant l'époque coloniale pour y découvrir ses sens, ses envies, qui contrastent singulièrement avec l'homme qu'elle est destinée à épouser. Par contre, elle se laisse séduire, de façon platonique, par le bouillonnant Dr Aziz, un homme qui parce qu'indien est bien sûr refusé dans les cercles qu'elle fréquente. Ce qui va l'amener à le rencontrer sur son propre terrain... Et à perdre pied dans ses propres contradictions. Une scène célèbre du film voit la jeune femme (Judy Davis) entrer dans une grotte en compagnie du Dr Aziz (Victor Banerjee), et en sortir ensanglantée, hagarde. la société a tôt fait d'accuser le jeune médecin de viol... C'est toute l'inégalité en place en Inde qui va alors se jouer dans la salle de procès.

L'attirance pour une autre culture, la fuite en avant, le sentiment d'être en dehors des conventions établies, la fraternisation hors des frontières communément établies, le chaos déclenché par les excentriques de tout poil, tous les thèmes habituels de Lean se bousculent dans ce film-somme qui devient vite profondément contemplatif, mais sans la vision délirante de Lawrence of Arabia. L'accent est souvent mis ici sur le fait que les deux actrices principales interprètent des femmes qui se sentent prêtes à tansgresser la morale en vigueur; l'une (Mrs Moore) estime que le mariage n'est plus une absolue nécessité, et l'autre est trouvlée par la sensualité de l'Inde, qui contraste avec le côté froid de son fiancé en titre, fonctionnaire zélé avec autant de romantisme qu'une machine à coudre...

Le roman de Forster conte une intrigue qui rend possible l'arrivée d'une lutte entre les différentes composantes de l'Inde, mais reste au bord; Et Lean n'a pas voulu trahir. Il en sort un film presque secret très plastique, revendiquant presque son anachronisme... Et dans une codé qui apparait ajoutée à l'intrigue bien qu'elle soit déjà chez Forster, il abat ses cartes, en montrant que l'un des personnages, qui se promène avec l'épouse du réalisateur (Sandra Lean), est un peu son double, un David Lean arbitre qui s'est tenu à l'écart des débats, et d'une certaine façon servirait de témoin vis-à-vis des spectateurs. Un témoin qui a fini, après 42 ans de bons et loyaux services, par achever son oeuvre, aux pieds des plus belles et des plus hautes montagnes du monde. Ca s'appelle prendre de la hauteur...

 

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Published by François Massarelli - dans David Lean