Be my wife, longtemps invisible dans une copie intégrale, est le deuxième film de long métrage de Linder aux Etats-Unis. Il semble conçu largement pour en finir une bonne fois pour toutes avec le style très boulevardier de l'auteur, qui s'apprète à changer, en tournant deux longs métrages bien différents: The three must-get-theres d'une part, une parodie échevelée, et la comédie Le Roi du cirque.
Le film est à nouveau doté d'une intrigue qui part d'une situation sentimentale: Max aime Mary et Mary aime Max, mais la tutrice de cette dernière (Caroline Rankin, qu'on reverra dans le film suivant) préfère Simon, un gros benêt. Les deux amoureux usent de stratagèmes pour se voir, jusqu'au grand jeu utilisé par Max pour conquérir la tante de sa future épouse: il y est question de faire croire qu'un voyou s'est introduit, et que Max est le seul apte à le faire déguerpir. Un sujet qui fera le bonheur de Harold Lloyd dans Dr Jack, et Charley Chase quelques années plus tard dans une séquence de Mighty like a moose... La comparaison avec Chase est d'ailleurs intéressante: une grande part des ennuis de Linder est basée sur l'embarras. Il n'est pourtant pas entièrement assimilable au comédien Américain, victime toujours plus ou moins innocente: Max, lui, s'attire les ennuis tout seul...
A propos de similitudes, de variations et d'emprunts, si courants dans le domaine de la comédie muette Américaine, dans cette première partie, se situe une scène avec Max déguisé en épouvantail, qui pourrait bien avoir influencé Keaton pour son court métrage The scarecrow, aussi. Décidément!
La deuxième partie est quant à elle située après le mariage, avec des quiproquos liés à un endroit qui est à la fois la maison d'une couturière, un speakeasy et un lieu de rendez-vous fripons. De fait le film s'essouffle tout en conservant un rythme assez rapide, mais à trop vouloir charger la barque, Linder a été trop loin. Et le film est son dernier situé dans la grande bourgeoisie, un domaine déjà largement squatté par DeMille: les comiques, eux, savaient situer leurs films chez les gens modestes, voire dans le monde de la misère. Le défaut principal de ce film en roue libre étant peut-être qu'il est quand même assez difficile d'aimer qui que ce soit dans cette galerie de personnages menteurs, manipulateurs, tricheurs et coucheurs, non?