Réalisé à la toute fin du muet, ce film First National est un curieux anachronisme... le britannique Lloyd y exalte la légende de lady Hamilton et du héros Horatio Nelson, le mythique vainqueur de Trafalgar, dans la situation politique compliquée du tournant du XIXe siècle. Emma Hamilton (Corinne Griffith), une roturière devenue lady par la grâce d'un échange pas vraiment humaniste entre son amant (Ian Keith) qui tout à coup avait des pudeurs de collégien, et l'oncle (H. B. Warner) peu regardant de celui-ci, a rencontré l'amiral Nelson (Victor Varconi), et le courant a passé tout de suite entre ces deux-là, jusqu'au moment ou il faut à Lady Hamilton, dont le mari est devenu ambassadeur de la Grande-Bretagne auprès de la couronne de Naples, généralement fidèle à la France, choisir entre taire les élans de son coeur, et laisser la nature faire son oeuvre... Rien de scandaleux pourtant, le film reste sagement chaste, même si la turbulente star tend à loucher du côté des actrices délurées, plus que de celui des Lillian Gish ou Mary Pickford.
C'est un film anachronique parce que Lloyd a peu évolué durant les années 20, et en cette dernière année du muet, les derniers films à sortir sans dialogue ont au moins une fluidité de la caméra que ce film ne démontre jamais. Pas de quoi se plaindre trop longuement, du reste, le spectacle est soigné, et les séquences oscillent entre un ton de comédie (Les séquences d'ouverture qui jouent sur le choc entre l'aristocratie, et l'arrivée tonitruante de Emma et de sa mère interprétée par Marie Dressler) et la gravité solennelle des scènes qui représentent l'idylle étrange et mythologique entre Emma Hamilton et Horatio Nelson, empreintes d'une présence de la mort, à travers l'évolution physique de Nelson, qui revient de ses batailles toujours plus abîmé, et bien sur à travers l'incarnation inattendue du pouvoir de l'empire Brtannique en ce couple adultère...
Mais surtout, le film est formidable dans ses scènes maritimes, un sujet qui inspirait, on s'en doute bien, le futur metteur en scène de l'admirable Mutiny on the Bounty... Il y avait de la matière, et ces plans et séquences transcendant l'impression d'académisme poli qui se dégage des scènes, disons, plus "diplomatiques"...