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13 août 2016 6 13 /08 /août /2016 16:44

Forcément, on pense à Prévert, pourtant il est absent. Jacques Sigurd, scénariste et dialoguiste de renom, le remplace, et donne à Arletty des trésors de langage qu'elle transforme à sa façon en des moments d'anthologie. Pour le reste, on s'éloigne volontiers, en ces années d'après guerre, de ce réalisme poétique tant vanté, et que le poète et le cinéaste ont réussi à faire vivre, tant bien que mal, jusqu'au Portes de la nuit en 1946. Mais retrouver Gabin et Arletty dans un film qui s'appelle L'air de Paris, tourné par Carné, forcément ça attire... Et on ne s'attend pas vraiment à ce que le cinéaste s'embarque dans un film de contrebande, qui parle beaucoup d'amitiés viriles, de boxe, de sueur, et... d'amour.

Victor et Blanche Le Garrec s'aiment, mais comme on dit aujourd'hui, c'est compliqué: elle l'a aimé boxeur, même si elle trouvait ça parfois difficile de l'attendre pour le voir revenir amoché, mais elle regrette qu'il s'accroche à son passé en maintenant une salle de sport qui ne rapporte rien, et qui l'éloigne elle de la romance, parce que Victor, la boxe, c'est 24h sur 24. Alors elle regarde avec un oeil maussade les jeunes qui se succèdent au club, et auxquels parfois Victor ne demande même pas de payer une licence. Jusqu'à André Ménard (Roland Lesaffre): celui-ci, Victor y croit dur comme fer, ce sera un champion; il veut lui imposer une vie monacale pour lui donner toutes les chances de gagner, mais ce n'est pas du gout de Blanche qui a l'impression que Victor est obsédé par André, et ce dernier qui fait la rencontre d'une jeune et jolie, et accessoirement inaccessible, mannequin (Marie Daems), ne trouve pas non plus que cette vie austère lui sied...

Le film se passe dans le Paris populaire, celui de la gouaille, des cafés, des salles de sport et des halles... Gabin et Arletty y parlent vrai, très à l'aise, et leur couple, qui assume clairement l'âge, les rides de l'une et l'embonpoint de l'autre, est attachant, surtout quand ça passe par les phrases ciselées des répliques d'Arletty. Et la peinture du petit milieu de la boxe amateur, dans lequel les bourgeois condescendants viennent s'encanailler, donne à voir une scène de combat durant laquelle cinéaste comme dialoguiste se sont plus à filmer la foule et les nombreux "enfants du Paradis" qui regardent le combat de là-haut, en gueulant à tout va... Mais l'histoire d'amour entre le brave gars musclé Lesaffre, et la froide Marie Daems, sent bien fort la convention jusque dans des dialogues qui accumulent cliché sur cliché. Non l'intérêt est ailleurs, dans la peinture troublante de l'affection débordante de Gabin pour son poulain, vu par une Arletty à qui on ne la fait pas! Carné savait ce qu'il faisait ça oui; Arletty s'en doutait, c'est sur. mais Gabin? A-t-il vu au-delà du conte dédié à l'amitié masculine? Mystère...

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Published by François Massarelli - dans Marcel Carné Jean Gabin