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22 janvier 2017 7 22 /01 /janvier /2017 16:23

Des étudiants effectuent des photocopies dans une université, lorsque un coup de feu, puis d'autres, retentissent. Une jeune femme, touchée, s'écroule: on la retrouvera dans quelques minutes, car le film effectue un flash-back sur le réveil, ce jour-là, du tueur interprété par Maxim Gaudette: il porte le canon d'un fusil à son front. Pourquoi? envisage-t-il de se supprimer? Puis il rédige une lettre qui explique par avance ce qu'il va faire: se livrer à un massacre, puis se suicider; il explique aussi les raisons, du moins ce qu'il considère comme tel, de son geste: une idéologie de la haine des femmes, et la volonté de marquer un coup contre celles qu'il appelle, avec dégoût, les "féministes". Il veut symboliquement leur montrer son opposition à ce qu'elles fassent des études ou aient un métier...

Nous assistons aussi à la préparation de Valérie (Karine Vanasse), une jeune étudiante, qui a un entretien important ce jour-là. Sous l'oeil bienveillant de sa colocataire Stéphanie (Evelyne Brochu), elle choisit ses vêtements, aussi sobres que formels, et part pour l'université avec elle. La suite est une succession de scènes vues à travers le point de vue de Valérie, du tueur, et aussi de Jean-François (Sébastien Huberdeau), un étudiant qui suit les mêmes cours que Valérie, mais sans avoir le même sérieux.

C'est froid, volontairement distant, tourné en noir et blanc. Ca rappelle aussi beaucoup le film Elephant de Gus Van Sant, d'ailleurs Villeneuve adopte la même narration, qui passe d'un point de vue à l'autre, en suivant les élèves, et en insérant dans le quotidien d'une école l'arrivée d'un tueur dont nous devinons les intentions. Le choc, fait d'une insupportable violence, n'en est que plus grand. La façon de bouleverser la chronologie est toujours une façon pour Villeneuve de brouiller les pistes (Voir à ce sujet Incendies et surtout Enemy), mais ici, il le fait afin de privilégier ce rapport fort entre son film et le spectateur, qui sans le moindre commentaire, se prend de plein fouet la violence des images, et l'indignation qui s'ensuit.

Mais si Elephant est un geste d'indignation, justement, contre la violence des tueries scolaires, qui sont si fréquentes, et liées à une situation politique particulière, ce film nous parle du Québec, soit un endroit relativement pacifique dans lequel ce type d'événement ne se produit quasiment jamais... sauf en ce jour de 1989, lorsque l'histoire qui est racontée a eu lieu, à l'école Polytechnique de Montréal. Un homme a effectivement débarqué à l'école, et fait un carnage, tuant ainsi 14 personnes et en blessant 14 autres. Créant ainsi les conditions de la peur, du traumatisme pour chacun des survivants, ce qui est évoqué sans ambiguïté dans le film. Comme tant de ses films, Villeneuve nous plonge au coeur de la violence, née de la rencontre entre la réalité et l'idéologie, débouchant sur le chaos de la peur et de la mort. Et en 77 minutes, on ne peut pas détourner les yeux de cette effrayante histoire d'une tuerie motivée par la haine des femmes.

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Published by François Massarelli - dans Denis Villeneuve