
1961: 13 adolescents qui viennent de quitter le lycée sont engagés dans un voilier-école, l'Albatross, dirigé par le capitaine Christopher Sheldon (Jeff Bridges). Ils vont y parfaire leurs études tout en apprenant à se débrouiller en mer en toutes circonstances. Le but ultime? Pour certains, il s'agit d'apprendre la mer, pour d'autres, devenir des hommes, pour d'autres... obéir à leurs parents. Bien sur, les garçons viennent avec un bagage: l'un d'entre eux a une sévère acrophobie suite au décès de son frère; un fils de riches traîne comme un boulet l'ombre envahissante de son père; un autre fait le fier-à-bras mais est quasiment illettré. Tous ne conçoivent pas de la même façon l'entraide et l'esprit de corps, mais tous vont y sacrifier d'une manière ou d'une autre. Et le navire s'embarque pour une croisière qui ne sera pas de tout repos: il y aura des tempêtes, et puis un naufrage, et puis... des morts.
On sent bien dans le résumé qui précède, la formule du film d'apprentissage; par certains côtés, on n'est finalement pas si loin de Dead poets society. Mais contrairement à Robin Williams dans le film de Peter Weir, le personnage interprété par Bridges a charge de vies et doit effectivement à la fin du film répondre de pertes humaines. Et si le film se déroule de façon classique, avec ses trois actes dans le bon sens (Exposition, consolidation, drame), entre la convention et le souffle de l'aventure, Scott a choisi: le film est passionnant pour ses images maritimes, pour le pouvoir de fascination ressenti par les gamins et partagé par le public.
Alors bien sur, quand il s'agit de se faire une opinion sur le problème montré, on est dans l'incapacité d'avancer! parce que Sheldon a vraiment mis en danger ses adolescents, et devrait sans doute vraiment en répondre, mais il a été poussé par un système éducatif placé aux Etats-Unis depuis des années (A plus forte raison avec les garçons) sur le mode de "tu deviendras un homme mon fils", ce genre de proto-fascisme si courant dans l'Amérique des années 50 et 60.
Blanche. Dans l'Amérique Blanche. Et Scott ne se prononce pas, il nous laisse juges... Tout en montrant que les gamins qui ont participé à l'expérience sont quant à eux solidaires du skipper, il n'oublie pas non plus de nous rappeler que ce dernier s'est ouvertement accusé d'être le responsable de la mort de quatre personnes... Mais il nous a aussi montré, en filigrane, une vision très blanche de la société de 1961, dans laquelle les noirs, en Floride, sont dans le décor mais pas dans la vie. Les femmes sont des prostituées, et la famille du plus riche des gamins a un chauffeur noir... Tous ces gamins sont blancs, leurs professeurs sont blancs... C'est une autre époque, c'est une autre planète.
Ce n'est pas non plus le sujet, mais ça participe de ce qui reste le péché mignon de Scott: la recréation d'une époque et les désastres qui ont laissé des traces dans l'histoire. A ce titre, il a été servi, le film en ayant été un au box-office. Pas sûr pourtant qu'il le mérite, contrairement au navet qui précède et au navet qui suit.