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14 mars 2018 3 14 /03 /mars /2018 17:55

Patsy? C'est d'une part un diminutif plausible pour le prénom Patricia, mais c'est aussi un terme qui désigne un bouc émissaire... Ca va donc doublement à Patricia, interprétée par Marion Davies. Elle est la petite dernière d'une famille de quatre personnes, à peine sortie de l'adolescence, où sa mère (Marie Dressler) et sa soeur Grace (Jane Winton) aimeraient la cantonner. Pas son père (Dell Henderson) toutefois: comme il le fait remarquer, il en a marre que sa fille cadette soit le souffre-douleur. Il n'est pas très bien loti non plus, car s'il a réussi à installer son cabinet de médecin et offrir une vie tranquille à son ménage, son épouse lui reproche avec insistance son manque de sophistication... 

La mère et la fille aînée sont unies dans un but précis: faire en sorte que le chevalier servant de Grace, Tony (Orville Caldwell) devienne un jour son mari, quand il aura réussi à s'installer en tant qu'architecte. Mais il y a deux soucis: premièrement, si Grace a effectivement jeté son dévolu sur Tony, ça ne l'empêche pas de flirter et plus si affinités, notamment avec le très douteux fils à papa Bobby Caldwell (Lawrence Gray); deuxièmement, Tony met du temps à s'en rendre compte, mais Patricia est folle de lui, et ne rate aucune occasion de tenter sa chance... Les circonstances (Et son père, aussi) vont l'aider...

C'est un film de commande pour Vidor. Que Marion Davies souhaite travailler avec lui est peu étonnant compte tenu de la réputation du metteur en scène, mais ça veut dire que ce nouveau film est un peu loin des préoccupations du metteur en scène qui souhaitait poursuivre ses portraits de l'Amérique entamés avec le splendide The big parade en 1925, et poursuivi en 1927 avec The crowd... Cela étant dit, il adopte une façon de faire qui est la seule possible: Marion Davies étant la star incontournable du film, il met sa caméra dans ses pas, et permet à l'actrice de laisser libre cours à son talent comique corporel, et à sa fantaisie souvent excentrique, toujours singulière.

Et c'est justement ce qui fait le prix de ce film, basé sur une pièce qu'on devine bavarde, et dont les intertitres et le jeu des acteurs et actrices, reprennent parfois les répliques: pour un film muet, on sait que ce n'est jamais bon signe... Mais Vidor et Davies se sont prémunis, et c'est toujours le slapstick qui prime, en particulier dans la scène d'anthologie la plus célèbre: dans une machination compliquée (et qui n'aboutira d'ailleurs pas du tout au résultat escompté), Patricia s'est introduite chez le playboy Bobby afin de provoquer la jalousie de Tony. Elle souhaite qu'il tente des choses hardies avec elle mais il est saoul, et amorphe. Pour le réveiller, elle tente un pas de charleston, avec un visage impassible, puis va imiter trois actrices dont les portraits sont accrochés aux murs: une scène, à n'en pas douter, qui n'était pas dans la pièce! Et c'est ainsi que Marion Davies imite d'abord Mae Murray (Elle-même une star MGM), dans un portrait pas très gentil, puis Lillian Gish dont elle donne en 2 minutes un florilège, brassant les rôles de l'immense actrice: La bohême, Broken Blossoms, The White sister et The scarlet letter, tout y passe... Enfin, c'est au tour de Pola Negri, la plus limitée des trois caricatures... On pourrait aussi citer les scènes durant laquelle Patricia se fait passer pour folle, qui d'ailleurs nous renvoient à plusieurs films Roach avec Charley Chase.

C'est là qu'on voit ce que William Randolph Hearst n'aimait pas qu'on rappelle: Davies était une actrice physique, qui n'avait aucun tabou sur son visage (pas d'angle de prise de vues prioritaire chez elle contrairement à tant de cabotins), ni sur la façon, toujours énergique, dont elle jouait ses rôles. De plus, elle est ici secondée et complétée par deux immenses acteurs de slapstick, parfaitement géniaux l'un et l'autre: Marie Dressler et surtout Dell Henderson. Avant Show people, Vidor savait bien en tout cas comment diriger sa star, et si on admet que le film n'est le meilleur ni de l'un, ni de l'autre, il reste un plaisir constant, et un rappel de l'importance d'une grande actrice, une vraie.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Comédie 1928 King Vidor Marion Davies *