
Tous les comédiens de l'époque du muet, sauf Chaplin, se sont amusés à un moment ou un autre, à jouer avec la comédie de maison hantée. Mais le meilleur, c'est sans doute ce film. Keaton a plus ou moins raté le sien, et Lloyd ne se contente pas d'imaginer une intrigue de fantômes, il y place ses personnages: un jeune homme (Lloyd, bien sûr) est "engagé" pour être le mari d'une riche héritière (Mildred Davis, bien entendu), puisqu'il importe que celle-ci soit mariée pour toucher le pactole; toute la première bobine est entièrement consacrée aux déboires amoureux du jeune homme et ses tentatives pathétiques de suicide... On est loin du personnage conquérant généralement associé à l'acteur.
La deuxième bobine montre les machinations menées par l'oncle de la jeune femme (Wallace Howe) pour les éloigner de la maison familiale, et de l'héritage. On trouve ici toute une batterie de gags parfois un peu lourds, dédiés à la convention vaguement raciste des noirs qui seraient facilement superstitieux et auraient fortement peur des fantômes, mais l'avantage est que Lloyd participe lui aussi de cette peur, et qu'il a donné des rôles conséquents à Blue Washington (le majordome qui découvre le pot-aux-roses) et surtout à l'espiègle Ernest "Sunshine Sammy" Morrison...
En tout, il y a beaucoup de gags qui font mouche, dans une mise en scène très soignée. Pourtant, lorsque le tournage de ce film était en cours, Lloyd a eu un accident très grave, qui l'a éloigné des plateaux pour plusieurs mois et a rendu sa main droite quasi invalide. Ca ne se remarque pas... Et c'est donc à partir de ce film que l'acteur, imperturbable, a pris l'habitude de porter un gant spécial pour masquer son handicap... Y compris pour faire semblant d'escalader les buildings.
