Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
13 juillet 2019 6 13 /07 /juillet /2019 18:15

Je suis à peu près sûr que les frères Hakim, quand ils se sont lancés dans cette production, avaient pour intention de faire un petit scandale... C'est que les moeurs du cinéma grand public se relâchaient un brin, quand même, l'année du triomphe de Brigitte machin dans Et dieu créa la femme, de Roger Vadim! Et Duvivier, je pense, était au courant de cette sulfureuse intention, car c'est même pour ça, et pour l'exposer un tantinet si vous voyez ce que je veux dire, qu'il a engagé Dany Carrel! Mais le film va au-delà des ces intentions peu orthodoxes, et assez typiquement, il devient plus un port rait en creux de l'époque à laquelle il a été conçu, plutôt qu'une reconstitution du second empire...

Le jeune et idéaliste Octave Mouret (Gérard Philipe) arrive à Paris avec de grandes ambitions et la soif de conquêtes qui sied: conquête de Paris bien sûr, mais surtout comme il le dit lui-même, des Parisiennes... Nous assistons à son évolution, de commis Au Bonheur des Dames, l'établissement de Madame Hédouin (Danielle Darrieux) puis lorsque les rapports se tendent avec sa prude patronne, il expérimente chez Vabre, en face, de nouvelles idées commerciales diablement efficaces. pendant ce temps, il fait comme à peu près tous les hommes du film: il monte et descend les escaliers de sa maison, de chambre de bonne en alcôve, avec les unes et les autres...

Dans chaque volume des Rougon-Macquart, Zola a dosé trois ingrédients: la dimension sociale parfois pamphlétaire, la peinture des moeurs... et le scandale! le dernier découle des deux autres, et Zola est devenu Zola quand il a vraiment décidé consciemment de les doser, en changeant bien sûr la formule d'un volume à l'autre: Pot-Bouille, qui préfigure Au bonheur des dames, n'est pas à proprement parler l'un de ses chefs d'oeuvre, mais c'est l'un de ses livres les plus réjouissants... Duvivier en a conservé la peinture des moeurs, et le parfum de scandale, mais en poussant un peu plus loin dans le registre de la comédie. Sa mise en scène suit Gérard Philipe, pas si Candide que ça, dans ses allées et venues, qui toutes semblent combiner ambition et coquinerie, et il bouleverse un univers d'hommes consommateurs, monde qui s'avère dans le film un véritable château de cartes, qui permet à Duvivier, aidé des dialogues impeccables d'Henri Jeanson, de questionner et d'asticoter un peu les moeurs des années 50. Certes, on le préfère à son plus noir (Voici le temps des assassins, ou encore le classique Panique), mais aucune raison de bouder notre plaisir devant cette tambouille, où l'appétit est surtout sensuel...

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Julien Duvivier Comédie