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27 août 2019 2 27 /08 /août /2019 09:12

Installant dans une narration totalement froide et distanciée un couple de bourgeois Grecs et leurs trois enfants, qui vivent semble-t-il plus ou moins à l'écart du monde dans une grande propriété qui sert de prison au fils et aux deux filles de la famille, le réalisateur Grec Yorgos Lanthimos développe ce qui me paraît être une comédie, donc je vais assumer cette hypothèse! Maintenant quand je dis "froide", ce n'est pas un vain mot...

Nous entrons dans l'histoire sans préambule, mais on voit vite que qui cloche: les trois enfants (qui ont tous plus près de vingt, voire de vingt-cinq ans) parlent entre eux dans ce qui a l'air d'être un jeu, mais on réalise très vite qu'ils ne comprennent pas tout ce qu'ils disent, et qu'ils ne connaissent pas le monde. Et d'un côté, si les parents les protègent des dangers du dehors, ils font venir aussi assez régulièrement Christina, une jeune femme (elle travaille à la sécurité dans l'entreprise où le père travaille) pour satisfaire les besoins du grand fils... 

Donc d'un côté, les parents font rester leurs trois enfants chez eux en leur disant qu'ils ne pourront pas sortir de la maison tant qu'ils n'auront pas perdu au moins une canine, et ils leur racontent des sornettes sur les chats, qu'ils présentent comme étant les animaux les plus dangereux de la création... Ce qui occasionne un cours d'aboiements par le père, un grand moment de déglingue tourné avec la plus sérieuse des rigueurs. Un moment qui renvoie un peu cinéma teinté de surréalisme de Alex Van Warmerdam, mais en plus méchant encore. Quand l'influence du dehors (à travers Christina, par exemple) se fait sentir, il faut que les parents soient imaginatifs: quand le fils demande à sa mère ce qu'est un zombie, elle lui répond que c'est une petite fleur, ce qui occasionne de grands moments d'un dialogue surréaliste. Bref: ils amoindrissent tout, et bien sûr non seulement le monde extérieur est supposé leur faire peur, mais en plus il devient assez fade!

Sauf quand Christina commence à monnayer des faveurs auprès des enfants: en échange, elle propose à l'aînée deux cassettes vidéo (les enfants n'ont eu droit, comme seul cinéma, qu'à des home movies): on apprendra, par le jeu qu'elle en tirera, qu'elle a vu Rocky et Jaws, apprenant en cachette les dialogues par coeur, et les récitant à son frère et sa soeur, médusés...

La parents ne manifestent, à part une espèce d'instinct de protection vis-à-vis de leurs enfants, aucune raison valable d'agir comme ils le font, mais ils sont entièrement dédiés à cette tâche, qui est clairement d'abord et avant tout la responsabilité du père. Il possède d'ailleurs un côté imprévisible qui en fait un vrai tyran, parfaite métaphore à lui tout seul pour tous les régimes dictatoriaux envisageables. Cela dit, la mère lui obéit et lui emboîte le pas d'une manière très consciencieuse...

Les jeux inventés par les enfants, leur "art" occasionnel (oui, les parents aiment a se distraire et demandent parfois à leur trois enfants un petit spectacle) sont souvent indigents, et assez étranges. Une chorégraphie par exemple dansée par les deux filles sur un morceau de guitare joué par le fils, tourne au très bizarre: ce sont des danseuses qui n'ont jamais vu de danse... Sous l'influence de Christina, la sexualité s'installe dans la fratrie, et la franchise de Lanthimos et des acteurs est particulièrement étonnante, surtout avec la froideur et la lenteur du ton!

Mais bien sûr, à un moment ou un autre, la tentation du dehors va se manifester. Comment, dans quelles circonstances, qui cela va toucher, et quelle en sera l'issue, je vous laisse le voir dans le film, à la fin d'une narration détaillée, méthodique, et je le répète, froide...

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Yorgos Lanthimos