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23 septembre 2019 1 23 /09 /septembre /2019 17:44

Ernst Lubitsch n'a jamais cessé, finalement, d'opposer un vieux monde sali, détruit et anéanti par l'horreur nazie, et un nouveau monde pétri d'idéal, de démocratie mais surtout dans lequel il y a bien une place pour toutes et tous... y compris pour cette fofolle de Cluny Brown.

Dans ce qui restera hélas comme le dernier film qu'il achèvera (Il décèdera durant le tournage de That lady in ermine), le réalisateur concrétise cette opposition en reprenant les contours de certains de ses films : de la culture « Mitteleuropa », qui informait tant de ses films d'avant-guerre et perdurait dans The shop around the corner et dans To be or not to be, il reste ici Charles Boyer qui interprète le personnage d'Adam Belinski, un professeur de l'université d'un pays de l'Est, qui en 1938 a fui le nazisme. Il est accueilli en héros par une famille de la haute bourgeoisie Britannique, qui se donne bonne conscience, alors que lui, essentiellement, est heureux de l'aubaine : il mange à l'oeil... Dans son parcours, il a rencontré une jeune femme qui l'enchante, une jeune débrouillarde de la classe ouvrière, Cluny Brown (Jennifer Jones), qui l'enchante : elle est nature, tout sauf sophistiquée, et en plus elle connait la plomberie. Durant le séjour de Belinski à Londres elle devient la bonne de la demeure qui l'accueille...

Tout en montrant de quelle façon les idéaux démocratiques de Belinski prennent dans sa situation une résonance concrète (où dormir, comment se loger, comment et où manger ? Voilà les questions qu'il doit résoudre chaque jour, et il est effectivement devenu un pique assiette aguerri), le personnage affecte une culture qui dépasse largement celle de ses hôtes : du coup le brave professeur aux manières étrangement directes va aussi, de Shakespeare, emprunter un peu du personnage de Puck, en devenant un lutin qui rapproche les êtres (son jeune ami Andrew et la dame de ses pensées) ou qui fait tout pour les éloigner (il assiste agacé au rapprochement de Cluny avec l'insupportable apothicaire local, et son hilarante maman (Una O'Connor). Mais surtout, il va mettre sens dessus dessous la belle ordonnance conservatrice d'une maison comme il faut, d'une société comme il faut, d'une Angleterre comme il faut.

Quand à Cluny Brown, elle n'est absolument pas faite pour quoi que ce soit qui puisse ne fonctionner qu'avec des convenances... elle va aussi vite découvrir que quand on a un talent naturel pour la plomberie, on a du mal à se marier... en Europe. Direction les Etats-Unis, donc, et tout le monde y trouvera son compte.

Quant au reste, eh bien... c'est du Lubitsch : délicieux, farfelu, drôle, et irrésistible.

 

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Published by François Massarelli - dans Ernst Lubitsch Comédie Criterion