
Dans la série des courts métrages de la MGM, celui-ci narré par Carey Wilson revêt sans doute une identité plus promotionnelle que bien d’autres. Il s’agissait pour Tourneur et son équipe de contribuer à promouvoir le long métrage de Sidney Franklin The Good Earth, auquel il emprunte d’ailleurs des figurants, des plans, des rushes et des décors : rien ne se perd, rien ne se crée… Tourneur s’y intéresse principalement au théâtre Chinois, dans ses traditions et son fonctionnement, qui est pris sans grande surprise avec un rien d’ethnocentrisme…
On y assiste à la présentation d’une pièce selon les codes traditionnels Chinois, et la voix off claironnante insiste sur le fait que les spectateurs y font aussi leur part de travail, acceptant les codes de la représentation de la fiction, qui font que par exemple l’accessoiriste souvent présent et visible sur la scène, ou encore la figuration de montagnes par des chaises empilées sur des tables, fonctionnent à plein comme représentations d’un monde, alors que pour le spectateur occidental ils ne feraient que souligner la fausseté…
Pourtant, et c’est le grand mérite de Tourneur, qui n’étonnera que ceux qui ne sont pas familiers de son cinéma (voyez comment il donne à ses Créoles dans I walked with a zombie, ou ses Afro-Américains de la vie nocturne dans Out of the past, une vérité qui va au-delà du cliché), il n’y a pas tant de moquerie que ça, le film soulignant plutôt avec respect l’extraordinaire faculté du public Chinois à transcender la barrière de la fiction. Et le film, qui divise constamment son regard entre la scène (une pièce très traditionnelle en effet, avec ce que ça implique de kitsch) et le public (aux yeux émerveillés, quel que soit l’âge des spectateurs, souligne l’importance de l’imaginaire, élevé au rang de vertu cardinale de l’humanité. Ce qui n’est pas rien…