
Que faire avec Harry Langdon? Après avoir essayé de le faire prendre le rythme insensé de leurs comédies, les metteurs en scène semblent avoir accordé un peu plus de latitude au comédien, qui commence à imposer son style lunaire et lent. C'est particulièrement notable dans ce film, le premier dans lequel on échappe presque totalement à la frénésie, à l'exception d'une séquence durant laquelle Harry est entraîné dehors par un bouledogue effrayé qu'il tient en laisse...
Le film (qui reste incomplet) commence par un intertitre («later,...» trompe-l'oeil étourdissant: Harry et une jeune femme se battent contre un bandit, qu'ils mettent hors d'état de nuire, puis s'embrassent. David Kalat assure que ce début est tel quel dans le script, on ne peut donc pas en mettre la rapidité sur le compte d'une hypothétique perte de séquence; de toute façon, le propos sera familial: Harry est un mari heureux et sans histoire, et Alice Day est son épouse comblée. Ils reçoivent de temps à autre la visite d'un ami (dont on apprendra plus tard qu'il est recherché pour divers crimes), et ont besoin d'une cuisinière: ils en essaient deux: une abominable sorcière qui fait peur à tout le monde, et une jolie dame (Madeline Hurlock) qui en a manifestement après Harry. La fin du film se concentre autour d'une nuit de peur, durant laquelle des étranges silhouettes envahissent la maison.
Le bien-être domestique, qui sera le thème de The chaser (1928), son plus méchant long métrage, est vu ici selon le style de Langdon, pas selon Sennett. D'autre part, le film a considérablement ralenti son rythme, et on sent la patte d'un autre metteur en scène: Harry Sweet a succédé à Del Ruth, et semble avoir laissé Langdon imposer sa marque. Du coup devant les horreurs qui se multiplient, Langdon ralentit, ralentit la cadence, et met un point d'honneur à innover, en particulier en terme de réactions. Du reste, le film est marqué par son innocence: lui qui jouait les obsédés sexuels pour Picking peaches, revient à la maison avec une vamp, à laquelle devant son épouse, il laisse masser ses pieds, sans aucunement penser à mal...