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1845, en Orégon: un convoi de pionnier fait route vers la vallée de Willamette, un endroit fertile et dont le statut mythique provient du fait que beaucoup des gens qui s'y rendaient mouraient en chemin. Nous assistons à un voyage rendu difficile d'une part parce qu'une rumeur insistante prétendait que les Indiens locaux étaient assoiffés de sang, d'autre part parce que les gens qui composaient la petite caravane ne faisaient plus confiance en leur guide Stephen Meek (Bruce Greenwood), qu'ils soupçonnaient de vouloir les tuer afin de préserver la tranquillité de l'Oregon: une autre rumeur... Alors que les braves gens commencent à évoquer la possibilité de tuer Meek, ils vont faire la rencontre d'un Indien isolé...
La pari de Kelly Reichardt est insensé, à une époque où le moindre pln dépassant deux secondes est accusé de "ralentir l'action". Ralentir l'action! Et puis quoi encore? Car des fois, une histoire, ça prend du temps, et des digressions, et il faut poser le cadre pour commencer. Et ici on ne s'embarrasse pas de longs discours pour exposer l'intrigue, car on arrive dans le film alors que les jeux sont faits... On rejoint la caravane alors que les pionniers ont le sentiment de tourner en rond, et qu'ils parlent tous en permanence dans le dos de leur guide...
Les pionniers sont tous des novices, plus ou moins courageux ou solides pour faire le voyage. Trois couples, dot un avec enfant, et Reichardt nous montre bien, sans jamais le souligner à trop gros traits, une atmosphère patriarcale paradoxale, dans laquelle les femmes sont quasiment enfouies dans des vêtements informes, sous d'abominables bonnets (qui au passage, de façon fort pratique pour le spectateur, sont comme les robes de couleurs différentes pour les trois femmes, Michelle Williams, Zoe Kazan et Shirley Henderson), mais en vérité ce sont souvent les femmes qui vont mener le groupe, idéologiquement parlant: L'une (Shirley Henderson), déjà mère, possède une autorité morale sur le clan; la deuxième (Zoe Kazan), paranoïaque et à bout de nerfs, va beaucoup influencer la fraction la plus en proie aux rumeurs, à travers son mari (Paul Dano); mais le personnage principal reste Emily (Michelle Williams), qui va souvent prendre les décisions les plus sensées: elle se refuse à totalement condamner Meek, dont elle se méfie, mais ce sera elle qui montrera la plus grande ouverture d'esprit vis-à-vis de l'Indien, allant jusqu'à lui confier la responsabilité de la piste...
C'est troublant, le film (Tourné en 1:33:1, comme les westerns d'avant) a souvent l'air d'avoir été pris sur le vif, et sur les lieux même de l'action historique. On imagine que tous ces gens ont du souffrir, notamment les femmes dans leur costume pesant, sous le soleil de plomb d'un désert qui est souvent de sel... La narration prend son temps, mais tout est dans le geste, car le film fait aussi souvent que possible l'économie de la parole, qu'on devine une perte absurde d'énergie! donc il faut s'accrocher, pour rester captif d'un fil narratif ténu mis, au final, passionnant et qui pose sur cette période historique des questions cruciales: comment survit-on dans un milieu hostile, au jour le jour, à la minute même? Et sur quelles croyances, sur quels critères s'est créé la nation Américaine? Et enfin, si comme le souligne Meek, "les deux genres" ne sont pas identiques, quel a été le rôle de la femme dans cette "colonisation" d'un nouveau genre?
Enfin, comment ne pas penser au film de Griffith, The female of the species qui déjà, en 1911, abordait l'importance de la femme dans la route de l'ouest...
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