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23 décembre 2021 4 23 /12 /décembre /2021 09:21

C'est une épure, un film de complément de programme qui ne totalise pas une heure, et que Ozu et sa troupe habituelle ont fini en six jours...

Chikako (Yoshiko Okada) est la grande soeur de Ryoichi (Ureo Agawa), un étudiant brillant. Is habitent ensemble, elle le nourrit, paie pour tout et surveille de loin sa vie amoureuse, qui n'a pas besoin d'elle: il voit régulièrement Harué (Kinuyo Tanaka), une jeune femme très bien comme il faut. Ils vont voir des films ensemble (nous assistons à une projection du film collectif If I had a million, et c'est la contribution hilarante de Lubitsch: Ozu, Ryoichi et Harué ont manifestement les mêmes goûts!). Bref, tout va bien, sauf que... La police semble s'intéresser aux activités nocturnes de Chakiko et vient se renseigner à l'entreprise où elle travaille. Il semblerait que les cours du soir que la jeune femme donne pour arrondir ses fins de mois soient moins catholiques que ne le croit Ryoichi... Le frère (Shin'yo Nara) d'Harué révèle à cette dernière ce qui se dit sur sa future belle soeur, et elle en parle à Ryoichi, qui le prend très mal...

Le poison du patriarcat, comme dans les films de Mizoguchi, voilà le vrai sujet du film, qui prend la forme d'un mélodrame sans une once de graisse... Mais contrairement à Mizoguchi qui dépeint avec une grande ambiguité la prostitution depuis les bordels eux-mêmes, le cinéaste ici prend un point de vue qui part du grand public et de sa morale en révélant peu à peu les dessous sordides de la vie de Chikako, qui assume pleinement un sacrifice qui permettra à son frère de réussir: une mission donnée par ses parents, et on pourrait même dire par l'empereur lui-même... Alors le mélodrame fonctionne à plusieurs niveaux, bien sûr, et le drame ira loin, jusqu'à la mort d'un des protagonistes.

C'est un très grand film en dépit de sa taille, dans lequel Ozu montre qu'il n'a pas besoin nécessairement, contrairement à ce qu'il a fait ailleurs (Va d'un pas léger, L'épouse d'une nuit, Femmes et voyous) du cadre du film de gangsters pour toucher à des sujets plus graves voire criminels... Ici, le crime est l'un des fondements paradoxaux d'uns société qui fait avancer les hommes en marchant sur les femmes: faites tout pour que votre frère, fils, mari réussisse, vraiment tout... mais ne vous faites pas prendre sinon on ne peut rien pour vous. Les derniers plans, qui semblent reposer le cadre du drame en nous montrant les rues vides de façon apparemment anodine, sont une façon comme une autre de nous dire que la vie continue, mais que le drame aussi.

 

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Published by François Massarelli - dans Yasujiro Ozu Muet 1933 *