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Willy Ferrière (Gaston Jacquet), un jeune homme de bonne famille qui évolue dans les milieux interlopes et populaires de Paris, n'a plus le sou. Et c'est dommage, car il est sur le point de se marier... Et Edna (Gina Manès), la promise, aime bien l'argent. Alors quand à l'Eden café, il parle un peu fort du fait qu'il serait bon de se débarrasser de sa bonne tante, qui est assise sur un tapis d'argent qui lui reviendrait à lui directement, des oreilles écoutent... Et il reçoit une proposition qu'il décide d'accepter.
Quand le bandit minable Joseph Heurtin (Alexandre Rignault) se rend chez la tante Henderson, il a plusieurs surprises: d'abord c'est ouvert; ensuite, il y a du sang partout; enfin, la vieille est déjà morte, et il y a quelqu'un: Radek (Valerii Inkijinoff), un étudiant en médecine avec lequel il avait planifié le crime, avant que ce dernier se dégonfle... Mais Radek a tout manigancé justement parce que Heurtin est faible, et pas très intelligent... Radek lui a donc permis de se rendre sur les lieux d'un crime, de se mettre du sang partout et de laisser ses empreintes sur chaque objet de l'appartement! Il promet à Heurtin de tout effacer, en échange de la promesse de ne pas dénoncer son complice. Un seul des deux hommes tiendra sa promesse...
Quand le commissaire Maigret (Harry Baur) est chargé de l'affaire, on ne tardera pas à appréhender Heurtin. Celui-ci ne tardera pas à pousser le commissaire à ne pas pouvoir un seul instant croire à sa culpabilité et surtout au fait qu'il ait pu être seul sur un meurtre comme celui-ci. Le commissaire lui tend donc un piège, en lui permettant de s'évader: il sait qu'une fois libre Heurtin fera tout pour retrouver un hypothétique complice: c'est comme ça que Maigret va retrouver la trace de Radek. Mais celui-ci, au lieu de se débiner, fait tout pour attirer l'attention sur lui...
L'intrigue, adaptée évidemment d'un roman de Simenon, est touffue, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais si Simenon charge particulièrement son assassin psychopathe (un étranger, on ne se refait pas: l'écrivain était sérieusement xénophobe), Duvivier étend aussi la noirceur de son film à à peu près tout le monde de la nuit, mais à des degrés divers. Ce pauvre Heurtin, par exemple, devient une victime d'un criminel, un homme et qui a décidé d'emporter tout le monde dans la spirale de sa mort. Willy Ferrière et Edna, les deux bourgeois qui aiment s'encanailler, sont finalement deux minables qui vivent aux crochets du crime, et la première scène donne clairement l'impression que Ferrière serait quand même un tout petit peu proxénète. La vision sans fard d'une société parallèle, avec les malfrats, les ivrognes, les prostituées, est autant une forme de réalisme qu'une trace de baroque dans le film...
Et Duvivier soigne sa partition en ayant recours à sa technique dérivée du muet, tout en expérimentant avec le sonore: le monde qu'il nous dépeint fonctionne comme d'habitude sur plusieurs niveaux, visuel bien entendu mais aussi sonore avec ses contrepoints, lorsque le cinéaste nous montre une chose en nous en faisant entendre une autre. La scène de l'évasion d'Heurtin, par exemple, est l'occasion pour les policiers de laisser Heurtin seul dans une voiture en fausse panne, pendant que tous les policiers du véhicule se penchent sur le moteur: la bande-son nous fait entendre la conversation de tous ces garagistes du dimanche qui regardent dans le moteur, pendant que l'image reste sur Heurtin qui hésite à tirer parti de l'oportunité...
D'autres expériences sont moins heureuses, telle cette scène qui permet à un policier d'enchaîner les visites à des établissements divers, à la recherche du coupable présumé: Duvivier a utilisé des transparences, qui permettent au policier de passer dans le même plan d'une boutique à l'autre. La compression du temps pour des actes routiniers était une bonne idée, mais le résultat est médiocre quant à la qualité photographique...
Mon grand regret face à ce film est lié à l'interprétation: tout le monde est excellent, et le film confine parfois à la comédie policière en particulier avec les interrogatoires des domestiques, totalement savoureux. Hélas, Inkijinoff, auréolé sans doute de la réputation du film Tempête sur l'Asie de Poudovkine, dont il était le principal acteur, est souvent excessif: certes, son personnage est un dangereux psychopathe, et son physique lui confère facilement des aspects inquiétants: il me fait penser à ce niveau à un petit cousin de Peter Lorre... Mais il en fait dix fois trop, contrairement à Lorre: je suis persuadé que le film de Lang était dans le viseur de Duvivier... Ce dernier rattrape le coup avec le dynamisme phénoménal de sa mise en scène sur le final ...
La tête du titre, c'est celle d'un homme qui sera condamné si on ne prouve pas son innocence. Innocence relative, car on n'est sans doute jamais totalement innocent, et Joseph Heurtin s'est rendu chez la Tante Henderson dans le but de... de quoi, d'ailleurs? La tuer ou simplement s'en prendre à son argent? En lieu et place de cet homme qui sauvera sa tête, Maigret va se retrouver face à un nihiliste sauvage et mourant, un sale type qui fera tout pour laisser autant d'ennuis que possible derrière lui: bref, c'est noir.
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