Overblog Tous les blogs Top blogs Films, TV & Vidéos Tous les blogs Films, TV & Vidéos
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
MENU

Présentation

  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
  • Contact

Recherche

Catégories

19 juillet 2025 6 19 /07 /juillet /2025 00:03

Les Quatre Diables, des acrobates, sont deux garçons et deux filles, issus de deux fratries différentes, et élevés jusqu'à devenir des artistes talentueux par un père adoptif particulièrement pointilleux... Ils sont très unis, mais avec l'arrivée de l'âge adulte, les ennuis commencent: l'une des deux jeunes femmes, Aimée (Margarethe Schlegel), ressent un amour d'autant plus troublant pour Frederick (Ernest Winar), qu'il ne semble pas se soucier d'elle. Par contre, il est tombé amoureux d'une comtesse qui ne rate pas une seule des représentations, et qui l'a invité à la rejoindre dans sa maison... Frederick en revient épuisé par l'amour, mais commence lors des entraînements à ressentir un vertige qui l'inquiète beaucoup, et ses partenaires également: c'est que pour une soirée de charité très en vue, ils vont effectuer leur numéro de trompe-la-mort sans aucune protection... 

Sandberg est en délicatesse avec la compagnie Nordisk Film de Copenhague au moment où il effectue ce film, tourné à Leipzig et à Berlin pour un distributeur Allemand. Il vient de compléter son film le plus ambitieux (tourné en 1918, monté en 1919, et qui ne sortira qu'en 1921), une adaptation de Our mutual friend de Dickens, et doit batailler sur le montage, l'exploitation et tout un tas d'autres choses. On remet en cause sa position au sein de la compagnie, qui lui permettait de mettre en scène des grands sujets sans interférences... Le choix du film tourné en Allemagne est assez ironique, puisque Les quatre diables avait déjà été un énorme succès en Europe en 1911, sous pavillon Danois! C'était une production de Robert Dinesen, adaptée du roman de Hermann Bang, et qui allait ensuite fournir la base d'un film de Murnau aujourd'hui disparu, réalisé à la Fox en 1928...

Mais Sandberg, dont le style passe-partout s'adaptait assez bien à tous les environnements, en fait un film totalement nocturne, dans lequel il focalise toute son intrigue sur l'âge adulte de ses protagonistes, contrairement aux deux autres adaptations qui proposent l'histoire en séquence, en commençant par la jeunesse difficile sous la protection mais aussi la férule du clown Cecchi... L'intrigue est vraiment centrée sur ces deux personnages, plus évidemment celui de la comtesse, qui est essentiellement un type de femme fatale assez fréquent dans le cinéma Européen de cette époque. On retrouve la patte de Sandberg dans l'attention portée aux coulisses du spectacle, saisies dans une volonté de naturalisme qui parfois tranche singulièrement avec le traitement mélodramatique du drame des personnages principaux... Et la main du destin prend la forme, clin d'oeil très itonique, du dessin d'un diable sur un costume de scène, qui est visible dans le miroir lors de la présentation d'Aimée: nous ne voyons, d'ailleurs, que ce diable grimaçant, avant de la voir elle...

C'est sans doute une certaine forme de dépit qui a poussé le metteur en scène à quitter le Danemark momentanément, pour y faire ce film. Il n'empêche, il y est très à l'aise: il y trouve le même ton ironique, caché derrière le mélo, que dans ses deux adaptations du Clown, celle de 1917, mais aussi et surtout sa version de 1926 qui est probablement son plus grand film... Comme ce fameux remake, ces Quatre Diables 1921 ne se contentent pas d'être une nouvelle version d'un film passé de mode (la première version, de 1911, réalisée par Robert Dinesen et Alfred Lind): Sandberg y continue son exploration des coulisses de l'art, des hommes voués par leur aveuglement à l'échec amoureux, et à travers le mélodrame expose une vision noire du monde, parfois baignée de flash-backs qui nous renvoient à la fois à Dickens (dont il venait d'effectuer une adaptation, comme je le disais plus haut) et au feuilleton... C'est donc un film qui lui ressemble! 

Et si ce film a été longtemps visible dans des copies incomplètes (notamment une, trouvée en Uruguay, qui réduisait le film à 40% de sa durée, et qui éliminait les flash-backs), et de mauvaise qualité: celle actuellement disponible (pas visible, cependant, sur le site du DFI consacré au fonds muet de la cinémathèque danoise... Sans doute parce qu'il s'agit d'abord et avant tout d'un film allemand!) est superbe, dominée, scènes nocturnes obligent, par un teintage bleu. Elle n'est semble-t-il pas complète non plus, puisqu'on passe abruptement de a fin du troisième acte au sixième... il y a une évidente ellipse, avec une évolution des rapports entre les quatre artistes, mais le "grand final" est là, presqu'intact. Un saut de la mort particulièrement littéral...

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans A.W. Sandberg Muet 1920