L'illusionniste double et la tête vivante (Georges Méliès, 1900)

Sous un titre qui semble une fois de plus nous décrire par le menu le contenu du film, Georges Méliès probablement conscient d'avoir engagé une révolution artistique sans précédent, se permet de jouer plus avant sur le fait de surprendre le spectateur... 

Dans ce film, en apparence, il installe une situation extraordinaire mais somme toute assez banale pour lui: il se dédouble, converse avec lui-même, et fait apparaître la tête d'une femme, dans un dispositif qui rappelle les numéros d'illusionniste, si ce n'est qu'il est effectué avec des caches, des fonds noirs, des arrêts de caméra et des surimpressions, au lieu d'un jeu de miroirs.

...Et il passe à la vitesse supérieure en faisant intervenir la figurante qui avait prêté sa tête à l'expérience, et en faisant intervenir une fois de plus Satan qui fait disparaître tout ce beau monde! Et la cerise sur le gâteau, c'est que Satan est en fait une troisième incarnation de l'illusionniste, soit Méliès lui-même. Dans un dernier clin d'oeil, Méliès mélange donc révélation de son identité, et effets spéciaux pour indiquer une bonne fois pour toutes qu'il se situe dans une espace purement cinématographique: du grand art...

Amusant, d'ailleurs, de constater que si le titre français garde le secret sur le final, faisant de Méliès un "double" protagoniste, le titre anglais donne pour sa part le fin mot de l'histoire: The triple conjurer and the living head...