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11 novembre 2022 5 11 /11 /novembre /2022 23:31

Dans un futur plus que proche, une corporation Américaine géante, Mirando, est le théâtre d'une lutte sans merci entre les deux héritières de l'empire. Ayant évincé sa jumelle (considérée comme une psychopathe, le mot n'est pas de moi), Lucy Mirando lance un programme délirant: ils vont générer des super-cochons qui vont être élevés un peu partout sur la planète, durant dix années, puis rapatriés afin de les revendre sous la forme de snacks... Okja 'est l'une de ces animaux et elle a grandi en paix dans une montagne en Corée auprès de la jeune Mija et de son grand-père. Mija (Ahn Seo-hyeon) a demandé à ce qu'Okja soit achetée à la Mirando Corp, mais ne sait pas qu'en réalité ils ont refusé l'argent. Quand ils viennent chercher l'animal, Mija voit rouge et prend une décision radicale: partir et récupérer sa compagne géante, à n'importe quel prix... Il lui faudra, aussi bien à Séoul qu'à New York, se battre contre la corporation, les deux jumelles (Tilda Swinton et Tilda Swinton), un zoologue complètement cinglé (Jake Gyllenhall), mais elle pourra compter sur le soutien parfois encombrant d'un groupe d'amis des animaux mené par un idéaliste un poil extrémiste (Paul Dano)...

C'est un conte, comme avant lui le magnifique La forme de l'eau de Guillermo del Toro. La principale différence, c'est que dans ce film l'horreur nait de la fable et de la comédie qui prend parfois (même souvent) tournure sans crier gare, comme dans tout film de Bong qui se respecte... L'histoire de Mija et Okja, les improbables copines, est extrêmement emballante, et passionnante même; elle promet du mouvement, des gags et des rebondissements, mais soyons clairs: ce n'est pas un film pour enfants... Les enjeu, ici, sont, en vrac, l'écologie, et l'extrémisme, la peinture d'un monde global qui ne tourne pas rond et dans lequel le capitalisme prime sur absolument tout, un portrait aussi en creux d'un monde surmédiatisé... 

L'habitude de Bong, de dépeindre des groupes humains (les habitants de Barking dogs never bite, les familles dysfonctionnelles de The host et Parasite, les rebelles de Snowpiercer et les policiers de Memories of murder) est ici laissée de côté au profit d'une héroïne décidée, admirable et magnifiquement campé par un petit bout d'actrice qui nous rappelle l'aisance du metteur en scène avec ses acteurs, quel que soit leur âge (dans The host, c'était déjà très frappant)... Mais l'enjeu, pour Mija, c'est de choisir sur quelle planète elle a envie de vivre, et l'environnement qui est le sien, avec son grand-père cachottier, et son cochon géant, ressemble fort à un paradis terrestre. Voilà pour elle, et pour nous du même coup, le monde à préserver. 

C'est donc bien d'un conte philosophique qu'il s'agit, mais un conte à la Chaplin, qui va au bout du drame, tout en préservant la comédie, qui exploite avec bonheur toutes les moindres parcelles de l'écran pour y placer un fourmillement de gags, comme le faisait Jacques Tati; c'est un film supérieur, premier choix, comme les snacks qui semblent si bons à la fin, en dépit de ce qu'ils ont coûté. Et tout ça pour sauver un cochon géant qui n'existe pas... Mais cet animal en images de synthèse, vous ne mettrez pas trente secondes avant de craquer pour elle... 

 

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Published by François Massarelli - dans Bong Joon-Ho Criterion