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Ce film est un remake de A guy named Joe, de Victor Fleming: dans ce film de guerre, Spencer Tracy était un pilote de bombardier, amoureux d'une pilote auxiliaire interprétée par Irene Dunne. Cette refonte transporte l'histoire d'amour et d'ange gardien dans l'époque contemporaine...
Pete (Richard Dreyfuss) est pilote de bombardier recyclé en canadair, et c'est un as. Il aime son métier, le fait avec passion et savoir-faire, et sa petite amie Dorinda (Holly Hunter) trouve qu'il serait temps qu'il passe à autre chose. Il accepte de devenir pilote instructeur pour éviter le danger, mais lors d'une dernière mission, il meurt dans l'explosion de son avion, juste après avoir sauvé la mise de son copain Al (John Goodman)...
Pourtant, Pete se réveille: dans un autre monde, en compagnie de Hap (Audrey Hepbunr, elle a tout d'un ange), qui lui confie une nouvelle mission: devenir l'ange gardien de Ted Baker (Brad Johnson), un aspirant pilote mal parti, qui va tenter de s'enroler dans l'école de pilotes, désormais dirigée par Al: ce que Pete ne pouvait pas savoir, c'est que la mission consistait non seulement à aider Ted à devenir un pilote, mais aussi à séduire Dorinda...
C'était le premier remake de Spielberg, une activité qu'il ne refera vraiment qu'en tournant une magistrale adaptation de West Side Story. Son War of the worlds est techniquement un remake aussi, mais dont tellement de choses ont été ré-adaptées à l'époque dans laquelle il a été tourné qu'il est devenu difficile à comparer à la version de Byron Haskin, sans parler du fait que l'intrigue en est sans doute, paradoxalement, bien plus proche du roman... On peut se demander pourquoi, après ses deux films très ambitieux de 1985 (The color purple) et 1987 (Empire of the sun), le réalisateur a été tenté par un remake d'un film des années 40, à plus forte raison pour en faire une modeste (tout est relatif) production sentimentale assez dans l'air du temps... Mais ce serait mal le connaître, j'y reviendrai.
Donc le film se situe dans un univers très codé, dans une époque qui est directement contemporaine: les gens sous nos yeux sont tous liés à l'activité de lutte contre le feu dans des grandes forêts. Le film ne quitte jamais vraiment cet univers, et nous y amène par une séquence aquatique, comme auparavant l'entrèée en matière de Jaws, mais cette fois avec un autre type de monstre: deux braves types sont tranquillement en train de pécher, sur un immense lac, quand soudain, en silence, un avion apparaît au fond de l'écran. Un plan spectaculaire en forme de clin d'oeil à sa propre virtuosité... Virtuosité qui ne quitte jamais vraiment le metteur en scène, même si elle tourne un peu en roue libre dans une histoire très légère.
Holly Hunter, une actrice qu'on a tendance à oublier (et c'est bien dommage), ancre clairement ce film dans son époque, avec sa coupe de cheveux et ses santiags. Elle est aussi une femme très forte, qui a des heures de vol, et qui tentera un sacrifice gonflé à un moment du film. Il est quand même important de se rappeler que ce film raconte un lien très important entre deux personnes, au-delà de la mort, l'une ne pouvant pas voir l'autre... Holly Hunter et Richard Dreyfuss le font passer. Brad Johnson, eh bien... comment dire: ce n'est sans doute pas le plus important personnage du film, et on sent bien que le lien brisé entre les deux amants, et l'amitié profonde entre Pete et son pote Al, ont bien plus inspiré Spielberg.
Non, ce qui me frappe sans doute le plus, et là où le film prend tout son sens, c'est dans la poignante contribution d'Audrey Hepburn. Celle qui était déjà malade, et qui avait depuis près de vingt années considérablement réduit ses activités d'actrice, a accepté un dernier rôle (elle est décédée quatre années plus tard): Spielberg lui a confié le rôle d'un ange, on ne pouvait pas mieux tomber. En tout cas, elle nous apporte un éclairage, qui est bien sûr une spure spéculation de ma part, mais je vais quand même tenter: à la fin de ces années 80 durant lesquelles Spielberg a beaucoup tenté, et beaucoup obtenu, mais s'est aussi selon certains un peu éparpillé (sans parler des critiques d'une tendance aux sentiments, notamment à propos de E.T. et The color purple), il sent encore qu'il a tout à prouver. En reprenant, comme un metteur en scène de studio, ce film de petite envergure, il rappelle qui il est, et sa philosphie d'un cinéma à l'ancienne. Et comme le film est l'histoire d'un double passage de témoin, qu'il soit sous le patronage de Miss Hepburn est décidément très approprié.
Voilà pourquoi même si Always reste un petit film, sans l'envergure notable de ses plus grands succès, sans les effets spéciaux visionnaires de Jurassic Park, sans le souffle de l'aventure d'Indiana Jones, ou sans l'incroyable inventivié juvénile de Close encouters of the third kind, il reste un film qui peut nous apporter un peu de plaisir, pas forcément coupable, pour un après-midi pluvieux. C'est aussi ça, le pouvoir modeste du cinéma.
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