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28 janvier 2024 7 28 /01 /janvier /2024 15:32

Henry Hobson (Charles Laughton) est le bottier satisfait d'une petite rue de Manchester. Veuf, il gère la boutique, du moins le croit-il car en réalité, il passe plus de temps à boire avec ses amis (les autres commerçants) au pub, qu'à accueillir les clients. Ce sont donc ses filles qui tiennent la boutique pendant que deux ouvriers travaillent à l'atelier. Deux des trois filles, Alice (Daphne Anderson) et Vicky (Prunella Scales) ont déjà trouvé des fiancés potentiels, mais le père ne les voit pas d'un très bon oeil. Il souhaiterait leur choisir lui-même des bons partis, deux hommes fiables et pas gourmands parce qu'il estime qu'il est hor de question de leur donner une dot! Pour sa fille aînée Maggie (Brenda de Banzie), Hobson estime enfin qu'il est trop tard pour elle, elle a passé l'âge: il compte donc sur elle pour tenir la boutique...

C'est pourquoi il est très surpris quand elle lui annonce qu'elle se marie avec Willy Mossop, l'ouvrier bottier (John Mills), qui a prouvé sa valeur... Hobson sera encore plus surpris de la tournure qe prendront les choses quand elle réussira intégralement à remodeler la famille, mais aussi l'entreprise Hobson...

C'est une adapation d'une pièce de théâtre de Harold Brighthouse, et c'est assez franchement une comédie. Lean n'en a pas tourné depuis Blithe Spirit, et après ce film-ci, ne le fera plus... C'est donc assez inattendu, quand on a été habitué à considérer l'oeuvre du cinéaste à la lumière de films comme Brief encounter ou The bridge on the river Kwai... Mais voilà: dans cette histoire qui est tournée avec un fort accent Mancunien, on y sent la quintessence d'une certaine idée de l'Angleterre, celle des petites gens qui travaillent, et des moins petites gens qui s'étouffent de leur propre importance, celle d'une sous-société d'essence populairen qui semble avoir résisté aux sirènes du Victorianisme...

Il y a des valeurs traditionnelles chez Henry Hobson, mais ce sont celles qui l'arrangent, qui lui permettent de croire qu'étant l'homme dans la maison (son épouse est décédée il y a longtemps et il semble s'en réjouir, le bougre), tout lui est du à commencer par l'obéissance de ses filles; il boit comme un trou, mais souhaite que ses enfants se marient à des gens qui sont abstinents de consommation d'alcool, sans doute parce que leur caractère plus dur les rendra moins cupides, et il n'aura donc pas de dot à payer! C'est pourtant d'une femme que les bouleversements viendront.

Brenda de Banzie est splendide en vieille fille qui cachait bien son jeu, et mène son affaire pour se marier (au grand dam de son propre mari qui n'avait absolument rien prévu ni même vu) mais aussi changer la donne complète dans la famille. La confrontation avec Laughton fait de sublimes étincelles, et celle, plus tendre et plus burlesque encore avec John Mills est une merveille de comique qui réussit à être constamment léger. Enfin, Lean aère la pièce et lui donne une légitimité cinématopgraphique par son talent inné à utiliser l'espace et la caméra. Pour son dernier film en noir et blanc, il montre qu'il est décidément un maître...

 

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Published by François Massarelli - dans David Lean Criterion