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2 mars 2024 6 02 /03 /mars /2024 08:19

Trevor (Tim Roth) est un jeune skinhead de 16 ans: il passe en jugement, pour avoir insulté un commerçant pakistanais et avoir envoyé une brique dans sa vitrine... Récidiviste, il est sous haute surveillance et placé dans un centre adapté, où la situation va vite dégénérer...

Adoptant un style semi-documentaire particulièrement bluffant, le film est d'un naturalisme réussi, qui nous entraîne dans la spirale de violence d'un garçon particulièrement en colère contre tout et tous: les immigrés, la police, les centres des organisations d'accès à l'emploi, les éducateurs... Trevor est en plus inquétant dans son aspect même, la croix gammée située au centre de son front (national) renvoyant autant aux nazis qu'à Charles Manson...

Ce n'est ni le parcours d'une rédemption, ni un film centré sur les skinheads en tant que fléau. Made in Britain, dans lequel Trevor a une discussion hallucinante de vacuité sur sa fierté d'être Britannique (le genre de discours nationaliste sans queue, tête, rime ni raison, bref un discours nationaliste, quoi) est surtout l'histoire d'un être produit en quelque sorte par un système, qui nous est d'ailleurs décrit par le menu sur un tableau noir dans une scène splendide et révélatrice: un système fondé sur l'idée que l'élite vaut la peine d'être encadrée... Les autres? Qu'ils se débrouillent. Si l'école ne fonctionne pas, si papa et maman démissionnent, si le chômage est la seule solution, la violence et la délinquance apparaissent comme une porte de sortie... 

C'est aussi l'histoire d'une descente aux enfers, celle d'un garçon qui ne se fait aucun illusion sur son destin, et finit par demander à être incarcéré pour ne pas avoir à recocher toutes les cases à nouveau.

Souvent tourné caméra à l'épaule, le film réussit une double prouesse: éviter tout angélisme (Trevor est vraiment un petit con, qui au final aura très peu de circonstances atténuantes), mais aussi tout discours trop manichéen. Il adopte souvent le point de vue d'éducateurs déboussolés, qui doivent gérer un trublion dangereux: une scène nous montre Trevor débarquer chez son référent social et s'introduire sans vergogne dans la chambre de ses enfants... Un type qui nous fait froid dans le dos, et pour lequel, nous dit-on, il n'y a pas de solution.

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Published by François Massarelli