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25 janvier 2025 6 25 /01 /janvier /2025 18:01

Ce film particulier est le fruit d'un voyage de noces, qui fut sans aucun doute significatif: Douglas Fairbanks et Mary Pickford étaient partis en Europe pour vivre enfin leur union au grand jour, et l'heure, probablement, était à l'euphorie. Frances Marion, scénariste et amùie personnelle du couple, les avait accompagnés, et ce qui n'aurait du être qu'une période sabbatique s'était transformé pour Mary Pickford en la préparation d'un film, mais qui tranchait de façon spectaculaire sur le reste de son oeuvre, telle qu'elle avait commencé à la piloter depuis son accession à l'indépendance totale avec la création de United Artists...

C'est vrai: il y avait déjà eu pour elle des rôles de femmes plutôt que de jeunes filles. Ils étaient le plus souvent dus à d'autres, notamment Cecil B. DeMille pour les deux longs métrages qu'il avait tournés avec elle, ou même Griffith qui n'avait pas cherché (contrairement à ce qu'il imposerait à Mae Marsh) à la cantonner dans des personnages juvéniles. Mais depuis 1919 elle s'était tenue à des rôles d'enfants ou éventuellement d'adolescentes, et sa petite taille en même temps que son sens des affaires la rendait prudente. Si ça marchait, pourquoi s'en priver...

Mais voilà, le soleil d'Italie aidant, l'atmosphère particulière de cet après-guerre, et l'insouciance d'une vie maritale qui pour l'heure n'était sans doute pas propice à la morosité ni à la pridence, justement, quand France Marion est arrivée avec ce projet de film, qui faisait de Mary une femme, une femme qui souffre, se marie et enfante, elle n'a pas pu résister... Et a fait en sorte de produire un film délirant, excessif, presque enfantin dans ses égarements, ce que la critique n'a pas omis de lui reprocher!

1914, en Italie, dans un petit village côtier, vivent les Carlotti: une grande soeur, Angela (Mary Pickford) et ses deux frères, Antonio et Mario, espiègles mais foncièrement de bons coeurs: ils ne s'opposent absolument pas à la cour faite à leur grande soeur par le beau Giovanni (Raymond Bloomer)... Mais la guerre arrive, et Giovanni et les deux frères vont tous partir pour le front. On annonce bientôt à Angela la mort d'Antonio, alors que Mario part. La jeune femme est en charge, pendant le conflit, du phare local, et un jour elle recueille un marin échoué, Joseph (Fred Thomson). Il se présente comme un Américain, mais souhaite se cacher car il est, dit-il, un déserteur. Angela l'installe chez elle, en secret, et elle tombe amoureuse... Seul le prêtre local sait à quoi s'en tenir et il les unit. Mais un jour, Angela surprend son mari au réveil, qui parle Allemand...

Le film est assez étonnant, sur bien des points: mais le plus étonnant, j'en ai peur, est son incohérence mélodramatique... Mary Pickford est assez à l'aise, mais le film est tellement ancré sur cette envie folle de réaliser un film qui évoque un écho de la beauté des côtes Italiennes (recréées, cela va de soi, en Californie!), qu'on a oublié de donner la moindre solidité à cette intrigue qui part dans tous les sens. C'est d'autant plus dommage, que le film est basé sur une forte envie de réaliser un film qui puisse être un mélodrame délirant. On imagine que dans les mains d'un autre réalisateur, il aurait pu être suffisamment baroque (DeMille), flamboyant (Ingram), voire totalement sublime (Borzage)... Mais d'une part c'est la toute première réalisation de Frances Marion, et d'autre part, l'effort visuel est tel qu'on est enclin à une vraie indulgence en raison du fait que le film est vraiment extrêmement beau à voir... Et par moments (l'arrivée du marin chez Angela, la révélation de son identité) le film atteint malgré tout des moments d'une vraie intensité.

 

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Published by François Massarelli - dans Mary Pickford Frances Marion Muet ** 1920 Première guerre mondiale