Avec Harry Langdon, Sennett a donc enfin trouvé un artiste qui est absolument insoluble dans le type d'humour favorisé par sa compagnie... et All night long est un bon exemple de cet état de fait. Capra datait à peu près de ce film, il est vrai classique, l'invention du personnage de Langdon, qu'il s'attribuait à 100%. Bon, sachant qu'il ne travaillait pas encore pour Sennett à l'époque, on sait quoi faire d'une telle affirmation... Non, la réussite de All night long est attribuable à deux hommes: d'une part, le réalisateur Harry Edwards, qui a su faire avec les moyens du bord et avec un patron attaché à "son" style, un film étonnant qui est beau à voir, particulièrement astucieux dans son déroulement (il y a un flashback très bien mené) et constamment drôle.
Sinon, l'autre Harry bien sur, Langdon lui-même, qui imprime ici par la seule grâce de son jeu étonnant une lenteur doucereuse, qui sied parfaitement au burlesque de l'évocation de la guerre, provoquant un choc permanent entre le monde et Harry: deux hommes se rencontrent dans un cinéma; ils se connaissent depuis qu'ils ont été en France durant la guerre, ou Harry était un soldat de deuxième classe inepte, et Vernon Dent son sergent. Courant après la même fille, Nanette (Natalie Kingston, qu'on reverra), Harry l'a séduite précisément par son coté lunaire... Ils sont d'ailleurs mariés. Vernon a une sérieuse dent contre son ancien camarade...
Belle réussite que ce film, souvent montré, le plus célèbre sans doute des courts Keystone de Langdon. Rempli de touches typiques: la vision d'une immense pile de pommes de terre, suivie de l'apparition du soldat Harry Langdon en train de les éplucher. il fait une pause, regarde la pile, puis son seau dans lequel on compte... trois tubercules; une série de scènes de bataille, très bien réalisées, pleine de gags qui jouent sur l'obscurité, etc...