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30 avril 2011 6 30 /04 /avril /2011 15:32

Le troisième film muet accessible de Naruse est plus proche que les deux précédents de son cinéma le plus connu: il se situe dans la peinture des femmes en pleine survie, et qui avancent avec stoïcisme. On n'est pas en pleine tragédie, ni en plein mélodrame: les conflits qui marquent ce film sont là depuis longtemps lorsque l'intrigue commence, et ne seront que partiellement résolus à la fin. il tourne autour de trois personnages: Kikue(Mitsuko Yoshikawa), une geisha vieillissante qui craint d'être définitivement rattrapée par l'âge, et dont les clients commencent effectivement à se détourner; Sumiko (Sumiko Mizukubo), une jeune geisha que ses parents ont forcé à entrer dans le métier plutôt que de chercher à améliorer leur condition par eux-mêmes; enfin, Yoshio (Akio Isono), le fils de Kikue, qui reproche quotidiennement son métier à sa mère en la traitant avec de plus en plus de mépris et qui dérive lentement mais sûrement vers la délinquance.

Sumiko  est au centre de tout ce dispositif, et c'est elle qui prend l'initiative d'amener Yoshio avec elle chez ses parents afin qu'il se rende compte que le métier de geisha est imposé de l'extérieur, jamais choisi. Elle veut lui en faire prendre conscience afin qu'il se ressaisisse et cesse de maltraiter sa mère. De fait, elle le change, et lors de la seule séquence diurne du film, ils tombent amoureux tous deux, en présence de la mer. Mais le drame guette... Naruse concentre énormément de son dispositif dramatique sur le beau visage de Sumiko, et sur son regagrd aussi. Il se permet un flash-back lyrique lors d'une scène finale, qui voit Sumiko et Yoshio revenir mentalement au plus beau moment de leur voyage... Une prouesse qui renvoie mine de rien à un paroxysme de montage déjà observé sur Trime donc larbin, tourné deux ans auparavant.

Les acteurs sont excellents, mais ce qui frappe, c'est que ce bien beau film est marqué une fois de plus par les mouvements de caméra brusque et répétés, qui soulignent le drame, comme dans la conversation entre Sumiko et son père alcoolique, au moment ou celui-ci voudrait sans doute être en paix alors que sa fille s'oppose à la décision familiale de prostituer aussi la petite soeur. de la quiétude attendue par e spectateur, ainsi que par Yoshio, on passe à l'affrontement, et le montage se met de la partie. Naruse utilise aussi beaucoup le plan comme une unité de valeur, qui unit ou oppose les êtres, comme dans la scène amère durant laquelle les trois personnages, enfin réunis pour une fois, sont dans une même pièce alors que Sumiko a été blessée dans une altercation. L'union fragile et vouée à l'échec entre les deux jeunes gens est marquée par mouvements de caméra rapide de l'un à l'autre... ces expérimentations sont encore une trace de l'héritage des premiers films de Naruse et de ses expérimentations, mais il les atténuera plus tard, pour fondre les mouvements de caméra dans le style plus fluide de ses films parlants. En attendant, ces films muets de Naruse sont toujours une exceptionnelle découverte.

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Published by François Massarelli - dans Mikio Naruse Muet 1933 Criterion *