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18 juillet 2012 3 18 /07 /juillet /2012 09:17

Dans un avenir proche, une pandémie se déclare, et le virus est résistant et particulièrement meurtrier. On assiste à la mise en route de protocoles, à tout un travail de recherche des organismes concernés, mais aussi à un travail médiatique d'information et de recherche de la vérité, voire de désinformation et de déformation de la vérité... Par la même occasion, on va aussi chez certaines personnages, notamment chez Mitch, dont l'épouse est sans doute celle qui a amené le virus aux Etats-Unis...

Il y a chez Steven Soderbergh une aisance, une rapidité d'éxécution qui le maintiendra toujours à flot à Hollywood, là même ou il devrait être considéré avec méfiance en raison de sa tendance à tout expérimenter. Des échecs comme The good German ou The girlfriend experience, des films du genre de Schizopolis ou Full frontal auraient du le plomber durablement, mais il se relève de tout, grâce à sa capacité à tourner en dessous du budget, en temps et en heure, des films grand public voués à des carrières prestiguieuses, ou tout simplement à un succès public bien mérité. Dans une oeuvre qui accumule, qui semble ne jamais s'arrêter (deux de ses films sont sortis aux Etats-Unis depuis celui-ci, et un troisième sortira au début 2013), on va pourtant trouver l'univers d'un auteur, d'un cinéaste passionné par un certain nombre de motifs et thèmes. Et pour commencer, chez Soderbergh, tout est mise en scène... Un homme qui manipule les gens face à lui jusqu'à ce qu'ils se livrent à sa caméra de façon impudique (Sex, lies and videotape), un couple formé d'un malfrat et de la policière qui le pourchasse, amenés à se retrouver en terrain neutre et qui savent exactement de quelle façon mentir pour ne pas être en faute par rapport à leur mission personnelle (Out of sight), une assistante d'un avocat qui mène une enquête difficile en ayant cours à beaucoup d'improvisation (Erin Brokovich), et bien sur un groupe de truands déterminés à accomplir le casse du siècle à Vegas (Ocean's 11), puis en Hollande et en Italie (Ocean's 12), puis de nouveau à Vegas (Ocean's 13): tout cela n'est que manipulation échaffaudée, mise en scène, théâtre... Cinéma. Autant dire que le hasard n'existe pas? Disons qu'il est là, mais qu'il est manipulable, qu'on peut en faire ce qu'on veut ou du moins en tirer parti... Et il y a la question du point de vue, essentielle chez le réalisateur, qui aime jouer avec les décalages en matières de point de vue, décalages chronologiques, et même décalages logiques. En dissociant bande-son et image, on obtient un point de vue qui est celui de la pensée (The Limey), en embarquant le spectateur sur une fausse piste, on crée un traumatisme du point de vue (The informant: Matt Damon est le héros d'une histoire d'espionnage... jusqu'à une surprise phénoménale pour le spectateur...).

Ces éléments qu'on retrouve de film en film, organisés différemment suivant les genres (Pastiche de Casablanca, pour The good German, film de casse pour Ocean's 11 et consorts, "thriller d'actualité" pour Erin Brokovich...) sont au coeur des films engagés de l'auteur, ceux pour lesquels il a adopté un style documentaire, proche des news: Traffic, Che (Somptueux ratage!) et Contagion. Traffic, par bien des côtés, est une réussite totale, qui met en place un univers compliqué, fait de points de vue entrecroisés, de machineries (Etats qui collaborent dans la lutte contre la drogue, et organisations plus ou moins grandes de trafic) pas vraiment synchronisées, et de parcours privés détaillés dans leur simplicité quotidienne. Contagion y réfère plus d'une fois, en reprenant ça et là par clins d'oeil des motifs (Le consultant Chinois qui s'apprête à détourner des doses de vaccin pour protéger son village renvoie ainsi à Benicio Del Toro et son initiative illégale dans Traffic). Tout en proposant un film réalisé dans des conditions de guerrilla, comme toujours, Soderbergh place avec une science hallucinante de précision ses pions. Il nous donne à voir un petit théâtre dans lequel tout bouge, et le spectateur est collé à son siège pendant tout le film. Le hasard, mis en scène via le casino ou tout a commencé, est relayé par le coté aléatoire de l'épidémie qui frappe à l'aveugle... Mais si le spectateur peut éventuellement suivre le journaliste paranoïaque qui crie au loup et accuse le gouvernement de favoriser certains au détriment du reste de la population (L'information et son contraire sont ici assimilé à la propagation d'un virus...), le metteur en scène a quant à lui démontré le rôle joué par le hasard. Et il débouche sur un film d'une grande honnêteté, d'une grande efficacité, qui montre sans jamais être excessivement pédagogique les mécanismes humains en oeuvre dans ce genre de circonstances... De fait ce film est l'un des meilleurs de Soderbergh, qui retrouve son style urgent de Traffic, et ça c'est une excellente nouvelle! On notera que les acteurs ici présents, sont tous des noms connus, des acteurs chevronnés, comme Traffic (Damon, Paltrow, Fishburne, Gould, Cotillard, Law, Winslet...), et qu'ils font un travail exceptionnel, entièrement soumis à la réussite du projet.

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Published by François Massarelli - dans Steven Soderbergh