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19 janvier 2014 7 19 /01 /janvier /2014 14:44

"Hatari!", ou un titre trompeur: le mot veut dire danger, en Swahili, et est bien prononcé dans le film lors d'une scène située dans la deuxième moitié. Mais c'est trompeur dans la mesure ou le danger concret, physique, est bien peu représenté dans ce film, une énième variation typique de son auteur sur le thème des hommes au travail, et d'une confrérie disparate dans laquelle l'intrusion d'une femme pose inévitablement problème, ce qui nous renvoie immédiatement à Only angels have wings, en plus relâché: ce nouvel opus, après tout, dure 157 minutes... Troisième film de Hawks à graviter autour d'un personnage interprété par John Wayne, Hatari! doit une grande part de son intrigue à Rio Bravo, rejoignant en contrebande la fameuse trilogie de westerns bégayants de la fin de carrière du grand réalisateur: à John T. Chance qui tente par tous les moyens de faire son boulot de shériff tout en jouant les mères poules pour son meilleur copain, et en supervisant d'un oeil critique tous les efforts des professionnels (Ou d'un novice qu'il croit amateur) qui l'entourent, Hatari! oppose une équipe internationale réunie en Afrique (Le film a été tourné en Tanzanie et au Tanganyika) qui a pour mission de capturer des animaux pour un zoo; nous suivons la progression de cette tâche, alors qu'un des membres (Bruce Cabot) a été blessé, ce qui nécessite l'incorporation d'un nouveau chasseur, joué par Gérard Blain; parallèlement, une jeune photographe Suisse (Elsa Martinelli) va venir jouer les trouble-fêtes, mais sera acceptée uniquement parce que c'est une femme... ce qui n'empêchera par Sean (John Wayne), le patron, de bougonner ni bien sur d'en tomber amoureux.

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Les paralèles avec Rio Bravo sont nombreux, depuis la dynamique créée par le personnage de Sean et son autorité bienveillante, mais entièrement dédiée à un idéal professionnel et à la notion d'efficacité liée intimement au métier, jusqu'à l'humour d'une intrigue déliée et faite essentiellement d'anecdotes tricotées les unes aux autres. Si on pousse la comparaison, la supériorité de Rio Bravo est bien sur évidente, tant les amours contrariées de ces personnages et le jeu inégal (C'est un euphémisme) des deux starlettes présentes manquent cruellement d'intérêt... De plus, le titre a beau parler d'un danger (Se faire emplâtrer par un rhino, par exemple, ou mourir dans un accident de voiture: les deux sont évoqués dans le film), les seuls dangers du tournage ont vraiment eu lieu hors-champ, à cause d'animaux qui ne voulaient pas faire ce qu'on leur demandait! Pourtant ce film dépourvu de méchant, d'aspérité, voire d'enjeu reste un plaisir étrange, lié à une atmosphère de fraternité, de camaraderie, à un humour tendre, comme un baroud d'honneur avant que les années 60 ne commencent... A ce propos, on pourra se plaindre sans trop de problème que le film nous montre des blancs, en Afrique, qui se comportent sans aucune communication avec les noirs, même si une scène de fraternisation essaie de faire dire le contraire. C'est une organisation d'un autre age...

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Le film doit sans doute beaucoup de son charme à une partition superbe de Henry Mancini, et le compositeur a sans doute fait beaucoup pour sauver une scène désormais célèbre: Elsa Martinelli se retrouve en effet dans le film flanquée d'un éléphanteau, puis deux, puis trois, qu'il faut nourrir, et qui sont si jeunes qu'ils la prennent désormais pour leur mère (A laquelle elle ne ressemble pourtant pas vraiment, ou ça ne m'a pas frappé); la longue exposition d'une séquence (Qui établit le rapport de protection de Sean à l'égard de celle qu'ils appellent tous Dallas) mettant en scène la "mère" et ses trois enfants était supposée être coupée, mais Mancini inspiré l'a repéchée en composant sa célèbre "Baby Elephant Walk", créant du même coup un passage parmi les plus appréciés du film, et qui renforce encore plus l'aspect familial...

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Enfin, on pourra noter le parallèle qui s'effectue entre la mission donnée à Sean et son équipe, et un tournage de film: Sean dirige un groupe qui n'est d'ailleurs pas permanent, mais constitué de spécialistes trouvés ça et là, qui iront une fois le travail accompli ailleurs pour offrir leurs services, comme une équipe de film fait se côtoyer deux ou trois mois durant des techniciens glanés ici ou là, et qui alterneront ensuite les jobs sur une longue période. Le tableau qui présente les animaux à capturer, le fait de devoir changer de programme en fonction de la disponibilité ou de la météo, tout renvoie à cette atsmophère de travail sur un film en extérieurs, un monde que forcément Hawks connait bien, et qui lui permet d'assoir sa thématique habituelle de travail à faire, travail bien fait... 

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Published by François Massarelli - dans Howard Hawks John Wayne