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3 mai 2011 2 03 /05 /mai /2011 09:12

http://storage.canalblog.com/85/23/110219/45422926_p.pngAprès la tragi-comédie (Trime donc, larbin), et le mélodrame (Sans lien de parenté), l'évolution de Naruse mène à ce film qui ressemble beaucoup au type d'histoires qu'il mettra en scène à la fin de sa carrière, tout en remettant en jeu des thèmes et des motifs déjà évoqués dans certains des films antérieurs qu'on a conservés. L'héroïne est une hôtesse de bar, un métier qui est dangereusement proche de la prostitution et qui servira souvent de métaphore à Naruse. Elle se débrouille pour élever seule son fils, avec l'aide de voisins compatissants, lorsque son ex-mari revient... Et s'impose. Elle a beaucoup de rancoeur à son égard, c'est lui qui est parti, mais se laisse convaincre de laisser sa chance au père de son fils, par ses amis. le reste du film voit les deux anciens amants se confronter, la force de la femme pesant toujours plus sur le sentiment d'impuissance et d'inutilité de l'homme. Un drame, l'accident dans lequel leur fils va manquer de mourir, va agir comme un révélateur particulièrement amer, avant un final tragique.

 

L'homme n'a aucune chance, dans ce film, il est un boulet, mais il est aussi pris en pitié par Naruse. Par par son épouse, qui le pousse à aller plus loin, à chercher du travail, à se prendre en charge. Pour sa part, elle domine le film, et la vie de ses protagonistes. Naruse la saisit de façon impressionnante dans sa vie quotidienne, utilisant beaucoup le miroir comme un objet qui nous donne à la fois un aperçu des préparatifs de l'apparence, lorsque la jeune femme ajuste sa coiffure, mais aussi du fait que l'héroïne se prend occasionnellement à témoin, comme si elle était le seul interlocuteur possible pour elle-même. Il compose d'impeccables plans qui exposent tel ou tel point de vue, avec une tête gigantesque opposée à un personnage au fond, le plus souvent ces plans exposent le point de vue de l'épouse, mais pas toujours... Naruse utilise aussi une anaphore ironique: il nous montre lors d'un de ces fameux plans en travelling avant brusque sur un personnage, une voiture-jouet, qui nous annonce l'accident du fils..

 

L'accident, justement, renvoie à deux des films précédents: Trime donc, larbin, dans lequel la comédie était brusquement rappelée à la réalité par l'accident du fils (d'ailleurs ces deux films ont plus d'un point commun, à part bien sur dans le ton. Aucune comédie ici...), et Sans lien de parenté, qui voyait la belle-mère de l'enfant empêcher un accident, montrant ainsi sa capacité à se sacrifier pour celui qu'elle considérait comme son fils. ici, cet accident laisse planer comme souvent un doute sur la fin du film, laissant une fois de plus la fin du film ouverte. ce ne sera pas la dernière fois, les tranches de vies de Naruse, saisies dans le quotidien le plus brut, ne se finissent pas sous nos yeux: ce serait trop facile... Elles composent une forme d'univers tangible, et on a l'impression de film en film pouvoir recroiser tel ou tel personnage... Tout un univers.

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Published by François Massarelli - dans Mikio Naruse Muet 1933 *