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2 mars 2011 3 02 /03 /mars /2011 09:00

C'est presqu'un genre à soi tout seul: les films concernant les batailles et conquêtes coloniales de l'empire Britanniques, sensés jouer sur le parfum d'aventure exotique, tout en offrant un pendant au western, avec lequel les  passerelles sont nombreuses. Dans tous ces films, la dimension d'aventures subsiste aujourd'hui, et les penchants coloniaux, et autres stupidités liées à l'honneur de l'armée (Honneur et armée, deux mots tellement vomitifs...) restent toujours aussi insupportables... Justement, la Warner en 1936 est à la recherche d'un nouveau souffle, et l'a prouvé dès l'année précédente en mettant en chantier un grand nombre de films, réalisés par des auteurs prestigieux, qui quittent la peinture de l'Amérique de la crise pour s'attaquer à de grands sujets littéraires et d'aventures... Anthony Adverse (Le Roy) et Black Fury (Curtiz) en ont représenté deux versants, le premier une adaptation littéraire de grande classe, le deuxième un plaidoyer social magnifique. A midsummer night's dream (Reinhardt, Dieterle) de son coté, est venu apporter ue caution 'artistique', pendant que Captain Blood (Curtiz) semblait faire la synthèse: film épique, adaptation littéraire populaire d'un roman qui certes avait déjà servi, et grand film d'aventures, avec création de star à la clé: Erroll Flynn est né. et son succès est si immédiat, que la Warner lance un nouveau film en chantier, qui reprend le romantisme aventurier, les pseudo-prétentions littéraires (Un poême de Tennyson), les deux stars (Flynn et Olivia de Havilland), ainsi que le metteur en scène.

 

En Inde, sur la frontière, les agissements politiques d'un indépendantiste turbulent, liés à des mouvements de troupe russe, inquiètent les Anglais; en même temps, deux frères, les Vickers, se disputent l'affection d'une femme...

 

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Je pense que contrairement à Captain Blood, Curtiz n'a pas été spécialement interessé par ce nouveau film; il n'en a signé que la photographie principale, et le morceau de bravoure en est parait-il du principalement à des assistants... Mais il a réussi à y apposer sa marque d'une façon intéressante, et bien dans sa manière: ironiquement, bien sur... D'une part, il y a du désespoir chez Flynn, qui doit ici jouer l'échec total de sa vie amoureuse. Curtiz le souligne, montrant une Olivia de Havilland qui se sent forcée à devoir l'épouser, prisonnière d'une affection aveugle... La complicité des acteurs rend ces scènes qui auraient du être mièvres (Qu'on les compare avec les scènes des deux tourtereaux, Patric Knowles et De Havilland...) gagnent une forte ironie, et la vision romantique de Curtiz en ressort grandie. Mais surtout, devant un film conçu pour gagner par des scénaristes qui ont tout verrouillé, Curtiz choisit une scène et la soigne particulièrement: dans les dix premières minutes, la colonne de lanciers arrive chez Surat Khan, pour lui signifier son changement de régime, qui n'est en rien favorable, puisqu'un importante subvention lui est retirée. Les scènes dans son palais, un endroit baroque avec des relents art déco, sont toutes de politesse, et de gentillesse: "quel brave homme, ce Surat Khan, il a très bien pris la chose..." Seul Flynn semble amer: il a flairé que l'ennemi veille, et qu'il va se passer quelque chose. Mais Curtiz l'a pris de vitesse: toute la première entrevue entre les lanciers et le Khan est filmée par un Curtiz goguenard, qui a multiplié les ombres de danseuses projetées sur les murs effrayants de blancheur... Pendant que les hommes parlent, et empilent deux trois fadaises, les ombres qui s'agitent nous rappellent ironiquement à l'ordre, et de fait, l'atmosphère entre les deux factions ne va pas tarder à se refroidir...

 

Le héros Flynn, de plus, se voit attribuer un sacrifice, qu'on veut nous faire croire idéaliste et politique, mais Curtiz souligne la nature privée et romantique de ce qui est bien un suicide. Baroque, puisqu'à l'instar de Custer dans They died with their boots on, Vickers entraine des soldats dans la mort... Sinon, fidèle à son habitude, Curtiz a particulèrement soigné certaines scènes: massacres, escarmouches, scènes de panique, et bien sur diverses parties nocturnes. Ce n'est donc pas le meilleur Curtiz-Flynn, qui ne doit sans doute sa  réputation qu'à la présence de la star, mais certains films ont une vie propre: des passages répétés à la télévision durant notre jeunesse ont fini d'en faire un classique, qu'on le veuille ou non... Cela dit, j'ai fait une allusion à They died with their boots on, de Walsh: celui-là est un chef d'oeuvre, un vrai.

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Published by François Massarelli - dans Michael Curtiz Olivia de Havilland