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  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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20 juin 2011 1 20 /06 /juin /2011 17:18

Réalisé sur une longue période, alors que Chaplin, comme indifférent au temps et aux problèmes personnels qui s'accumulaient, s'enfermait plus avant dans son studio ou il travaillait comme seul, à un projet plus austère que les précédents, The circus est une fois de plus un miracle de comédie, une épure d'un genre alors en pleine mutation, comme l'était le cinéma Américain du reste, sous l'influence alors des grands cinéastes étrangers, et en particulier Allemand. D'une part, en effet, Keaton avait évolué dans ses films, et en 1927-1928, tournait College et Steamboat Bill Junior: un film bien de son temps, et une prouesse technique. Lloyd faisait suivre son évocation rurale sur le caractère d'un homme timide et effacé (The Kid Brother) d'un film qui situait le combat entre l'ancien et le nouveau en pleine ville, avec Speedy, au film mené à 100 à l'heure. D'autre part, le film est sorti (Janvier 1928) peu après le beau doublé de la Fox (Sunrise, Seventh Heaven), après The Jazz singer et The Student prince, quelques mois avant The wedding march et The wind... Bref, le cinéma de Chaplin risquait plus que jamais d'apparaître anachronique en cette période de remise des compteurs à zéro.

Et puis, le metteur en scène ne va pas bien; si en surface, sa vie mondaine continue plus que jamais, il sait, pour avoir vu le mal qu'on avait fait à Arbuckle, qu'il était dangereux d'être un homme à femmes... Son deuxième mariage était une catastrophe, dont entendait semble-t-il bien profiter son épouse Lita Grey, et qui commençait à lui coûter cher: il lui avait fallu ranger dans ses boîtes un film sur décision de justice (The seagull ou Woman of the sea, de Josef Von Sternberg, qu'il avait produit). De même que The gold rush avait pris une solide année de travail, The circus était pour Chaplin un exutoire qui prendrait le temps qu'il faudrait, indifféremment aux évolutions des autres studios...

Un cercle, marqué en son centre d'une étoile: voilà le premier plan du film. Belle image du cirque tel que le verra le vagabond, arrivé au cirque par hasard, et une fois de plus amoureux d'une jeune femme impossible à atteindre... A la fin du film, dans une séquence célèbre, c'est au milieu d'un cercle, marqué sur le sol par la tente éphémère du cirque qu'il a choisi de laisser partir sans lui, que le vagabond se retrouve seul avant de repartir vers d'autres aventures... Comme si rien ne s'était passé, à l'extérieur comme à l'intérieur du cercle. Entre temps, pourtant, des péripéties qui vont opposer Chaplin à un irascible patron de cirque (Allan Garcia), dont la fille (Merna Kennedy) sera un temps la raison de vivre du héros, avant qu'il ne laisse un autre que lui (Harry Crocker), plus talentueux, plus beau, plus tout, la courtiser et finalement l'épouser. Chaplin, dans ce film, est à la fois partie intégrante du show (Il est clown malgré lui) et dans les coulisses, et on ne quitte que très rarement les allées du cirque pour aller voir ce qui se passe dans le spectacle...

Métaphore aussi bien de la vie que du spectacle, dans lequel on doit laisser faire ceux qui savent, le film n'est pas tant une métaphore de Chaplin lui-même; il savait ce qu'il faisait, contrairement à ce petit homme qui n'est jamais si drôle que quand il ne sait pas qu'il est employé pour faire rire. Mais ce qu'il sait, lui qui a goûté au bide avec son projet le plus ambitieux, c'est que le public est versatile... Et qu'on ne peut pas forcer sa nature, d'où cette séquence superbe dans laquelle le clown malgré lui s'essaie à la corde raide pour notre plus grand bonheur; d'où aussi un film qui ne cherche pas à suivre les tendances virtuoses du cinéma de l'époque... S'il n'est pas le meilleur des Chaplin, et à ce niveau on ne mesure plus, en fait, The circus est un film qui passe tout seul, un concentré Chaplinien qui tient sacrément la route, une fois de plus.

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Published by François Massarelli - dans Charles Chaplin Muet 1928 Criterion **