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Après le contrat Essanay, l'offre juteuse de Mutual a permis à Chaplin, non seulement de toucher de gros sous (mais alors vraiment de très gros sous), mais aussi de devenir un peu plus indépendant encore. Une garantie qui a du peser, tant il a mal supporté l'ingérence de l'Essanay sur ses deux derniers films. Il a donc droit à un studio construit par Mutual exprès pour lui, le Lone Star studio; il a la totale liberté de choisir ses sujets, décors, personnages sur 12 films de deux bobines qui seront produits. le contrat spécifiait sur 12 mois, mais ce ne sera pas le cas. N'anticipons pas...
The floorwalker est donc un retour de Chaplin à ses petits films situés dans un lieu dont il va pouvoir extirper tous les gags possibles, et à une histoire relativement complexe, avec plusieurs fils narratifs: dans un grand magasin, un vagabond fauteur de troubles (Malgré lui bien entendu) est de trop, des policiers viennent enquêter sur des malversations, et le gérant et son assistant, qui ont trempé dans les magouilles louches, cherchent à s'enfuir avant qu'il ne soit trop tard, mais chacun des deux essaie de doubler l'autre. lorsque l'assistant tombe sur Chaplin, il a la surprise de se retrouver face à un sosie, et cherche à en tirer partie.
Le principal atout de ce film, qui se déroule uniquement dans le magasin, est l'escalier roulant dont Chaplin tirera partie, mais surtout qu'il utilisera comme accessoire numéro un dans des gags répétés et des poursuites improvisées devant la caméra avec ses acteurs, comme en témoigne l'indispensable documentaire Unknown Chaplin, de Kevin Brownlow et David Gill. Si l'escalator en question est bien sur présent dès le premier plan du film, le résultat final ne s'en contente pas, et Chaplin a su donner à ses différentes parties narratives l'importance qu'elles méritaient. D'autant qu'il a fait des ajouts à sa troupe: si Edna Purviance, quoique peu employée dans le film en secrétaire, Lloyd Bacon en sosie, Charlote Mineau en inspectrice et Leo White qui fait une apparition éclair en comte à moustache, sont de retour, on verra ici Eric Campbell en gérant, et Albert Austin en vendeur contrarié. Les deux vont devenir des recrues de choix, le premier pour jouer les méchants mythologiques (avec barbe, moustache, et maquillage conséquent...) le second pour donner à Chaplin un faire-valoir qui soit à la fois d'une nervosité excessive, mais aussi un brave type, victime malgré lui des agissements de notre héros. Austin, acteur Anglais pêché chez Karno, sera aussi un collaborateur créatif, qui agissait parfois en qualité d'assistant, et mettra d'ailleurs en scène des films, dans les années 20.
Le film est un condensé de slapstick, avec une histoire qui se tient. Chaplin ne révolutionnait pas le cinéma à chaque film, mais la qualité est, déjà, au rendez-vous. Les films suivants confirmeront cet état de fait...