Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 juillet 2024 4 25 /07 /juillet /2024 22:00

Un couple d'Anglais en vacances en Suisse doivent faire face à l'enlèvement de leur fille par des espions étrangers qui veulent ainsi faire pression sur eux et révéler une information qu'ils ont apprise dans des circonstances exceptionnelles, et qui pourraient sérieusement contrecarrer les intentions terroristes des barbouzes... Les deux parents en sont, finalement réduits à tenter le tout pour le tout: réussir à faire triompher le bon droit, tout en récupérant d'eux mêmes leur progéniture.

Aux cotés des gros classiques que sont The 39 steps et The lady vanishes, ce film a toujours plus ou moins fait pale figure, comme du reste son remake Américain. C'est injuste, d'abord parce que ce film a enfin pu synthétiser toutes les tentations d'Hitchcock exprimées dans des films aussi divers que The lodger, Blackmail, Murder et Number 13, et proposer en quelque sorte le premier film d'une longue lignée, et ensuite parce que le plaisir est permanent, aussi bien pour le metteur en scène que pour le spectateur. Celui-ci sait qu'il est mené en bateau, et le jeu est, pour l'instant du moins, léger et distrayant. Les films ultérieurs sauront être plus graves... Même si il ne faut pas s'y tromper: le plaisir pris à visionner ce film va au-delà d'un simple échappatoire.

Dès le début de ce film, on est confronté à une famille qui doit faire face à l'irruption dans sa vie, d'une façon inattendue (et marquée par les surprenantes ruptures de ton du prologue, sans doute le meilleur moment du film), de l'aventure, d'un rapport saugrenu, soudain et surréaliste avec le crime, voire le mal, symbolisé par un personnage de méchant qui prend de la place, d'autant que c'est Peter Lorre... Et cette famille comme-vous-et-moi ou presque doit faire face à un dilemme impossible à résoudre (Sauver un enfant ou faire son devoir de citoyen et contrer les espions), alors la seule solution est de retrousser ses manches, foncer et agir.

Du coup, le film est court, va à l'essentiel, et on y trouvera très peu de temps morts. D'ailleurs à ce titre, le film Américain sera plus redondant. On retrouve aussi cette idée dans la façon dont Hitchcock traite les morts violentes, celle de Pierre Fresnay par exemple, qui danse avec une amie, et découvre tout à coup une tâche de sang sur son plastron, avant de s'écrouler, touché par une balle. Aucun spectaculaire, ici, pas plus que dans les autres anecdotes liées à ce type de violence: la mort et sa fréquentation se sont invitées dans la vie des héros, et ce sans pour autant prendre une dimension tragique excessive...

Bien sûr, le plaisir de bricoleur d'Hitchcock reste souverain, et il prend un malin plaisir à installer des exagérations gouleyantes (La mère de la jeune fille kidnappée se trouve être une tireuse d'élite, elle va donc exécuter elle-même l'assassin potentiel de sa fille en subtilisant un fusil à un policier), des signes utilisés avec bonheur (un badge, des cheveux brillantinés) ou en multipliant les échos (La mère qui se plaint de sa fille sans imaginer qu'elle sera kidnappée trois heures plus tard, l'affrontement par jeu entre deux tireurs d'élites qui se retrouveront ennemis à la fin du film, etc). Et puis il trouve aussi son bonheur avec un acteur qui avait pourtant tout de l'électron libre: Peter Lorre, méchant tellement bon qu'il en gâche un peu le film, puisqu'on ne peut que le regarder quoi qu'il fasse. Edna Best et Leslie Banks ont donc affaire à forte partie, et franchement ils ne font pas le poids. Pourtant les petites touches typiquement Anglaises du metteur en scène dirigeant ses acteurs de second plan du cru, qu'ils soient bandits ou héros, font mouche...

Le film, même jugé moindre, a toujours au moins été reconnu pour son importance chronologique par tous les commentateurs: il inaugure, donc, le style classique d'Hitchcock, en déplaçant le terrain de jeux des genres de prédilection du cinéaste sur le territoire de la vie quotidienne; il est un peu le prototype du futur film Hitchcockien, et dès le suivant The 39 steps, la confirmation allait être éclatante. Par ailleurs, pour qu'Hitchcock ait souhaité refaire spécifiquement ce film, il fallait qu'il y soit attaché...

 

Partager cet article
Repost0
Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Criterion