
Le capitaine Delord et la jeune mademoiselle de Breteuil s'aiment, et vont se marier... sauf que le jeune militaire est gravement blessé, ce qui va entraîner la fin de leurs fiançailles. Vingt années plus tard, la jeune femme est devenue la veuve d'un comte, et leur fils Raoul se lance dans la vie: il est reporter, et écrit un article très critique sur le vieux général Delord... Celui-ci voit rouge et décide de provoquer le jeune paltoquet en duel, ignorant qu'il s'agit du fils de son ancienne bonne amie... Celle-ci va devoir intervenir.
S'il s'agit d'un mélodrame poids lourd, voir le résumé, ce petit film d'une bobine, encore un survivant miraculé du studio Eclair, est plein de qualités. Et pour commencer, il est fort bien interprété, dans une mise en scène qui varie entre un sens du raccourci (qui est assez courant semble-t-il chez Jasset) et une tendance à laisser les émotions s'exprimer. De plus, il se situe à part des tendances contemporaines du cinéma naissant (notamment chez Gaumont) à développer un point de vue assez réactionnaire. Ici, le metteur en scène donne finalement le meilleur rôle à ce jeune reporter qui accepte à cotre-coeur de se battre en duel, pour défendre l'honneur de la presse. Le statut du héros blessé dans sa jeunesse, vieille baderne dans son âge mur, est bien moins enviable...
Ensuite, le metteur en scène aime à utiliser la profondeur de champ et réussit à masquer les illusions théâtrales en évitant les entrées à gauche et à droite. Les premières scènes qui voient le capitaine Delord arriver au fond de la pièce (et il vient de dehors, la luminosité du fond en fait foi) ou encore la formidable scène de duel où le point de vue de Raoul, le fils, nous est donné par le biais de l'arrivée au fond de l'écran de son rival, sont autant d'occasions pour Jasset de faire un cinéma totalement différent, et qui justifie pleinement son enviable réputation de grand précurseur.