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23 mars 2025 7 23 /03 /mars /2025 15:40

Le futur... Mickey Barnes (Robert Pattinson) a des soucis avec un créancier (le genre de problème qui peuvent littéralement l'amener à se voir coupé en morceaux par une tronçonneuse), et avec son associé Timo, il s'engage sur une mission vers une autre planète, Nilfheim: des humains, menés par un autocrate cinglé (Mark Ruffalo), vont la coloniser. Timo a réussi à trouver un poste acceptable, mais Mickey s'est retrouvé à postuler pour être un "remplaçable" (un "expendable" en Anglais), ce qui veut dire qu'il sera utilisé pour toute mission incluant le risque de mourir, sacrifié, puis "réinprimé" à partir de son empreinte. Au moment où le film commence, il en est à sa 17e itération, et il est sur le point de se faire dévorer, a priori, par une créature menaçante...

Sauf que non: la bestiole en question va en effet gentiment l'accompagner jusqu'à la sortie de sa grotte, et donc l'épargner, ce que mickey (qui est un peu lent, en tout cas sa 17e version) ne comprend pas vraiment. Mais quand il revient, il constate que les techniciens l'ont déjà remplacé. Et il est clair que c'est un problème puisque dans cette société du futur, le fait d'être un "multiple", donc un clone, est absolument inacceptable... Mickey 17 et 18 (qui lui est plus vif, voire vindicatif) sont donc dans les ennuis jhusqu'au cou... Mais la mission aussi, sous la responsabilité d'un irresponsable: car Kennenth Marshall, le chef autoritaire de cette entreprise, est un fou furieux trop occupé à bâtir une sorte de gloire auto-centrée pour faire quoi que ce soit de cohérent...

De la science-fiction: difficile pourtant, en 2025, à une époque où l'innovation technologique est élevée au rang de principe de base (souvent en dépit du bon sens, la preuve avec les IA), de trouver du nouveau dans un genre qui est précisément bâti sur la marche du progrès à travers des hypothèses. Mais Bong Joon-ho n'en est pas à son coup d'essai, et entre The Snowpiercer et Okja, a déjà fait preuve d'une invention visuelle et thématique formidable dans son oeuvre. A ce titre, le monde de Mickey 17 est passionnant, construit autour certes d'une mission intergalactique, mais aussi et surtout d'une parodie méchante du monde dans lequel nous évoluons...

Du vitriol: car oui, comme d'habitude la science-fiction ne nous parle en rien du futur, se contentant de transposer avec génie le monde actuel dans une invention décalée, et profondément humoristique: le fait est que les comportements de tous les humains, ou presque, que ce soit dans l'accomplissement de leurs missions respectives, dans le vivre ensemble, face à leurs responsabilités, ou face à la décence élémentaire, sont ici soumis au miroir déformant de la satire. Et dans cette base installée sur une improbable planète gelée, chaque individu finit par ne rouler que pour lui-même, comme il est d'ailleurs souligné, montré en exemple par le leader, Kenneth Marshall... Je ne sais ce que lui a demandé Bong Joon-ho a demandé à Ruffalo, mais il s'est modelé un personnage, de toute évidence, sur deux bases: Mussolini, et Trump... Donc un être fat, diminué psychologiquement, imbu de lui-même jusqu'à l'absurde, qui serait hilarant s'il n'emmenait le monde à sa sa perte... Et encouragés à faire de même, les humains sont inefficaces (à un moment, on s'apprête à jeter Mickey dans un incinérateur alors qu'il est encore vivant), font preuve d'une duplicité inquiétante (le copain Timo qui vend de la drogue à toute la base), et perdent leur sens des réalités: même Nasha (Naomi Ackie), la petite amie de Mickey, qui est pourtant une rdoutable policière-soldate-pompière, perd tout sens des convenances et se réjouit, sous l'emprise de la drogue, d'avoir deux amants! La charge est cruelle, mais néessaire et surtout constamment drôle.

De la poésie: Bong est un maître en tous points; son timing, que ce soit en Coréen ou en Anglais, n'a jamais failli, son art de la composition laisse pantois, son utilisation des pleins et des déliés du montage, et son sens esthétique (qui pour moi n'est jamais pris en défaut que sur ses monstres, ce qui était déjà le cas dans The host) nous sont ici rappelés, pour un premier film intégralement en Anglais; et ce film est précieux, car avec l'arrivée du gros Mussolini blond à la Maison Blanche, la menace qui pèse sur l'inventivité à Hollywood est réelle... A plus forte rison quand on constate que ce film attaque les pires travers de l'humanité, de la technocratie, de la politique tels qu'ils sont désormais la règle dans le pays le plus riche du monde. Alors pouvoir contempler une oeuvre à nulle autre pareille, drôle de surcroît, aux images fortes qui vous résonneront longtemps en mémoire, c'est en effet sans prix.

J'apprends que ce film est un flop aux Etats-Unis, ce qui ne m'étonne qu'à moitié... Peut-on oublier la moue de dégoût du préseident de l'époque, lorsqu'il a appris que le film qui avait gagné l'oscar de la meilleure oeuvre, était Parasite de Bong Joon-ho, en 2019? Un film qui avait l'audace de parler une autre langue que l'anglais... Le public Américain n'est plus prêt (il l'était dans les années 70) pour une telle inventivité. Ce film essentiel possède la beauté des grandes oeuvres de science-fiction, de Kubrick, de Fleischer, Lucas, Spielberg ou Schaffner. Carrément. Il est aussi corrosif que A clockwork orange, aussi profond que Solaris, et aussi passionnant et stimulant, dans un portrait des déclassés face aux élites sans cervelle, que Parasite. Et Robert Pattinson, en fusible professionnel (le narrateur de ce film n'est autre que le type le plus en bas de la chaîne...), est irrésistiblement drôle, surtout en deux versions!

 

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Published by François Massarelli - dans Bong Joon-Ho Science-fiction