Présenté dans une copie en fort mauvais état, mais d'origine, soit un positif 35mm, et incomplète, ce film a vu les critiques Américains faire la moue... Car il est partiellement atypique.
Partiellement: on retrouve l'univers du réaisateur-acteur, qui a choisi une profession pour en faire le titre de son film, et a demandé à la Vitagraph de plus en plus embarrassée par ces dépenses inconsidérées un budget imposant; enfin, ses acteurs de prédilection sont là, et en particulier un génie: Oliver Hardy.
L'intrigue concerne un restaurant dans lequel le maître d'hôtel est irascible, colérique et pour tout dire pas forcément sympathique envers les vagabonds qui tentent d'y manger gratuitement. C'est le cas de Semon, qui est expulsé manu militari, ce qui fait qu'il tend à se retrouver entre les mains d'un autre colérique qui ne le porte pas dans son coeur (Hardy)... Mais le maître d'hôtel et les autres employés partent sur un coup de tête et le restaurant va donc devoir employer les vagabonds...
Ce qui est atpique, c'est que les gags semblent plus retenus, moins délirants et avec moins de cascades que d'habitude... Moins ne veut pas dire évidemment qu'il n'y en avait pas! Et on regrettera que le final soit perdu...
Par contre il est difficile de ne pas repérer l'influence très forte de Chaplin et de A dog's life (1918) sur ce film...
Dans une entreprise entièrement dédiée à la production de pâtes, le patron promet à un employé sa fille s'il réussit une mission (...d'ailleurs pas bien difficile, ce qui pose question): il doit vendre à un client un lot de macaroni d'un mètre de long*... Entendant la conversation, la fille (Madge Kirby) du patron propose à son petit ami (Billy Bletcher, une vraie nouille, au passage) de coiffer l'autre au poteau, et comme àa ils pourront se marier. Mais les pâtes d'un mètre de long, pas encore cuite, ça casse comme un rien, et les deux concurrents vont bientôt s'en rendre compte...
C'est parfaitement idiot, mais comme je suis bonne pâte, je ne m'en formaliserai pas! Le gag récurrent des macaroni qui se cassent d'un rien occupe bien une demi-bobine, ce qui fait un quart du métrage du film, mais il y a d'autres choses à glaner dans le genre crétin: bien sûr, quand on dit de façon insistante, dans un film comme celui-ci, que la personne que le héros doit retrouver a une longue barbe effilochée et un oeillet blanc à la boutonnière, vous vous doutez que la mode est lancée, et que tout le monde est habillé de la sorte! Enfin, était il vraiment utile d'appeler le client Mack R. Roni?
...Oui.
*Oui, j'aurais du dire "des macaroni", car il en va de ces pâtes comme des spaghetti: normalement ils sont très longs, et la version qu'on consomme aujourd'hui dans de petits paquets, ce sont des macaroni coupés... Ou des spaghettini.
Après la guerre de Sécession, un ancien soldat (Clint Eastwood) reconverti en mercenaire est passé au Mexique: alors qu'il se rend dans le Sud pour une mission, il porte secours à une femme (Shirley McLaine) que trois bandits s'apprêtent à violer. A sa grande surprise, une fois qu'elle a remis de l'ordre dans ses habits, il s'avère que Sara est une nonne... Alors que leurs chemins s'opposent, l'un et l'autre vont cohabiter durant quelques jours, finissant par mélanger leurs deux "missions": Sara doit en effet aider un groupe de partisans Mexicains de Juarez à se débarrasser d'une garnison de Français, et les Mexicains ont demandé à Hogan de fournir son expertise en matière d'explosifs pour exactement la même raison... moyennant finances, cela va sans dire...
L'équipée tranquille, sur fond de musique aisément reconnaissable (Ennio Morricone, qui s'est bien amusé), de ce mercenaire et de cette nonne, s'est pris une volée de bois vert de la critique à l'époque: le problème, écrivait-on dans Variety, c'est qu'il est impossible de croire un seul instant à Shirley McLaine en nonne... sauf que je ne suis pas d'accord du tout. Certes, son maquillage trahit le fait que les dernières habitudes de Hollywood avant la grande fiesta des années 70 ont la peau dure, mais elle accomplit un excellent travail pour nous faire croire (et pas que nous, d'ailleurs) qu'elle est ce petit bout de religieuse qui traverse le Mexique de part en part pour aider les petites gens à se débarrasser des français! Et elle tient la dragée haute à Eastwood, qui reprend avec humour son personnage laconique de redresseur de torts aux pris fluctuants, qu'il avait développé chez Leone. Le film, à sa façon, est un peu un "à la manière de"...
On se perd facilement dans ces deux heures de distraction singulièrement récréatives, dans ces décors superbes, filmés de main de maître par Gabriel Figueroa, et dans les dialogues pleins d'une humoristique tension sentimentale (et un rien sensuelle aussi) qui renvoient un peu à une sorte d'African Queen... avec des cactus.
C'était inévitable, dans la Fance giscardienne, que la comédie, et le cinéma français dans son ensemble, s'emparent du porno. Mais pas comme les italiens: nos cousins transalpins, lors de l'avènement du porno, l'ont carrément intégré dans leur cinéma de grande consommation, alors que la libéralisation apportée par l'évolution des moeurs a surtout débouché, en France, sur une sorte de mode sans lendemain, pour un genre qui restait complètement dans sa cage, désormais marqué d'un X, et condamné à disparaître des salles à plus ou moins brève échéance. Lautner, toujours témoin de son temps, et Francis Veber, scénariste qui montait à l'époque, ont eu l'idée d'une comédie qui se situerait dans le milieu du porno, en choisissant des protagonistes qui lui sont étrangers: aussi bien Pierre Richard, Miou-miou et Henri Guybet, que Renée St-Cyr et Sabine Azéma, tous vont être mêlés au genre pornographique, et tous sont des novices. Ce qui nous permet d'entrer dans le film sans aucun problème.
Photographe professionnel, François Perrin (Pierre Richard) souhaite réaliser un film, basé sur un script qu'il a écrit en compagnie de son ami Henri Mercier (Henri Guybet). Mais si ce dernier, un idéaliste qui travaille par ailleurs dans les établissements Ferroni (On y fabrique des pâtes), rêve d'un film qui garde sa pureté, et qui soit un grand drame à message sans concessions, Perrin lui sait bien que des concessions, il va falloir en faire un certain nombre. Sans en avertir son copain, il signe un contrat avec le seul producteur disposé à mettre le film en chantier, Bob Morlock (Jean-Pierre Marielle). Sa spécialité? Le porno.
Les complications se multiplient: non seulement il faut cacher à Henri le plus longtemps possible que son film rêvé n'est pas du tout ce qu'il attend (le titre, pour commencer, n'est plus Les miroirs de l'âme, mais plus poétiquement La vaginale), non seulement il va falloir faire accepter à Christine (Miou-miou), la petite amie de François, actrice au Splendid, que son compagnon travaille dans la fesse, mais en plus Madame Ferroni (Renée St-Cyr), enthousiasmée par le projet de Henri Mercier, lui prête sa villa Tropézienne, et sa fille Claude (Sabine Azéma) pour jouer un rôle, celui d'une jeune femme dont évidemment elle ne sait pas qu'elle est dans la nouvelle version, disons, quelque peu malmenée...
Lautner met cette fois son art au service d'une comédie de moeurs, totalement dénuée de la moindre intrigue policière, et débouchant souvent sur du burlesque physique, très bien mené. Je ne sais pas quelle est la part de Pierre Richard dans cet aspect, mais par exemple, la première scène qui sert de fond au générique, nous montre le photographe à l'oeuvre dans son studio. Il doit doit prendre un cliché d'un parterre de fromages, pour une publicité, et est particulièrement concentré... Mais deux mouches se mettent à tourner autour du fromage. la scène prend son temps, et on se doute que l'acteur, à la fin, ne sera pas propre... Le réalisateur n'oublie pas non plus son plaisir à démantibuler les voitures, comme en témoigne une scène très drôle qui fait intervenir Francis Lax.
Mais une grande part de la comédie de ce film est bien sûr basée sur l'arrivée de tous ces candides dans l'univers de Bob Morlock (Jean-Pierre Marielle est parfait évidemment en producteur de films de fesse, on s'en doute) ou sur le plateau d'un film porno... Le décalage entre ces braves gens et le milieu qu'ils intègrent est admirablement saisi dans une scène qui se joue sur deux plateaux à la fois: à Toulon, Mercier, invité chez les Ferroni, parle avec passion de Les miroirs de l'âme, pendant qu'à Paris le scénariste Ploumenech (Gérard Jugnot), chargé de réécrire le scénario des deux amis, explique à Morlock et Perrin les changements entre le premier jet et la nouvelle version de La vaginale! On s'amuse beaucoup dans les allers et retours (j'ai hésité à écrire "va et vient"...) ou dans la "conversation" qui va se dérouler d'un lieu à l'autre! Et les scènes finales, lors des répétitions des scènes-clés, permettent de grands moment, la plus fameuse scène étant bien sûr celle de la confrontation entre la très très timide Claude, et l'acteur Slimane (Jean Luisi), dans le plus simple appareil.
Lautner et Veber ont adopté un ton juste, qui raille avec intelligence les excès du porno, mais toutes les scènes ne s'imposent pas. Le personnage de Marie-France, la secrétaire obsédée de Morlock, et son déshabillage me semblent de trop... Mais la dernière scène, qui combine le goût pour le baroque du metteur en scène et la nécessité pour les personnages de retrouver la pureté, est une belle idée: les amants se retrouvent dans une voiture immergée au fond d'une piscine, et tout ce petit monde corrompu de s'extasier devant ces deux amoureux qui restent habillés et se contentent de s'embrasser.
Le film est une comédie bien plus saine qu'on aurait pu le craindre, et se revoit toujours avec plaisir. Pour moi, ceci est le sommet des films réalisés par Lautner dans les années 70.
L'équipe de Arbuckle, en roue libre, dans un restaurant... Keaton est le garçon, obsédé sexuel pas gêné pour faire du gringue à des clientes en présence de leur mari, et Arbuckle est un cuisinier aux méthodes peu orthodoxes, hilarantes bien sur, et salissantes. On retrouve l'innommable cabotin Al St-John, en voyou qui aime à venir embêter les clientes, et le chien Luke, un vrai cabot celui-ci, qui lui tient la dragée haute.
L'histoire est impossible à résumer, mais disons qu'on y voit Arbuckle faire de la cuisine qui ne donne pas envie d'être mangée, pêcher d'une façon inepte: il pêche au chien... et aussi, on y voit, moment fascinant, une danseuse se livrer à des simagrées inspirées manifestement autant de Cléopâtre (Versant Theda Bara, qui avait incarné la fatale reine dans un film de 1917) que de Salomé. Buster et Arbuckle, pris dans la danse, en font des tonnes pour notre plus grand plaisir... avant de s'attabler et de manger des spaghetti de toutes les façons les plus sales possibles...
C'est beau. C'est aussi un moment important dans la vie de Arbuckle et de Keaton, car ce dernier allait quitter le studio pour une dizaine de mois, et se rendre en France pour participer à l'effort de guerre. Il allait sérieusement manquer, et son retour serait fêté en conséquence...