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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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6 février 2025 4 06 /02 /février /2025 21:54

Note indispensable: ce texte, qui suit la chronologie des événements en particulier pour les premières 45 minutes du film, ne cache pas grand chose des mystères que dévoile le film, et s'adresse donc à ceux qui l'ont déjà vu... 

Tourné à la fin de son parcours avec Paramount, en collaboration avec Shamley productions, le studio qui produisait à l'époque les films d'Hitchcock pour la télévision, Psycho contraste apparemment de façon spectaculaire avec les somptueux films réalisés auparavant, notamment Vertigo (1958), ou bien sur North By Northwest (1959, réalisé pour la MGM). Après un générique formellement novateur, du au talent de Saul Bass, accompagné de l'extraordinaire musique de Bernard Herrmann, le film d'Hitchcock commence par un recours inattendu à un titre: Phoenix, Arizona, suivi de la mention du temps aussi inutile qu'exact. Cela sert bien entendu à indiquer un sens factuel, qui est aussi factice, première d'un certain nombre de fausses pistes.

Mais de fait, l'ensemble de cette première partie de Psycho se déroule en effet dans cet état, et la lumière intense qui y règne y met en valeur un monde bien réaliste dans lequel évoluent des petites gens sans histoires, ou du moins sans belle histoire: Marion Crane (Janet Leigh) et Sam Loomis (John Gavin) s'aiment, et veulent vivre leur amour en toute tranquillité, mais comme lui est divorcé et pas encore suffisamment prospère pour la faire vivre tranquillement, il attend le moment propice... Dans un film antérieur, on aurait sans doute eu affaire à des gens qui se seraient occasionnellement rencontrés dans un café ou un restaurant; eux se voient dans une chambre d'hôtel, et ont consommé leur amour, comme en témoigne leur intimité dévoilée, les sous-vêtements, la nudité partielle, puis leur conversation permet d'établir leur petite vie, leurs désirs, leurs rencontres furtives, en cachette pour sauver les apparences. On est devant un film à petit budget au réalisme sordide... deuxième fausse piste. Quant au relâchement de l'habillage (Soutien-gorge, le torse nu de John Gavin) plus le lit, et la situation en elle-même, on peut dire qu'il s'agit de la première transgression du film...

Après cela, bien sur, Marion Crane va commettre une faute, en subtilisant de l'argent qui lui a été confiée à une banque ou elle travaille... En attendant, elle aura participé à une discussion avec sa collègue (Patricia Hitchcock), très bavarde, qui dit des horreurs sur le mariage (On y apprend qu'elle a pu supporter sa nuit de noces grâce à un tranquillisant que lui a donné sa mère)... le genre de comportement qui justifie sans doute l'extrême prudence avec laquelle Sam et Marion assument les relations sexuelles extra-conjugales dans leur chambre d'hôtel... 

Puis Marion prend la fuite, de façon manifestement irrépressible, et elle est parfaitement consciente de la stupidité de son geste, à plus forte raison après avoir été aperçue par son patron, auquel elle avait pourtant dit qu'elle retournait se coucher pour se soigner... Elle veut néanmoins rejoindre Sam, son amant, qui vit à Fairvale, Californie. Hitchcock, tout en continuant son film dans la même veine transgressive, se permet bien sur une touche de symbolisme remarquée par beaucoup: la Marion voleuse contraste avec la Marion amante, par la couleur de ses sous-vêtements; ici, un ensemble noir, là ou les dessous étaient blancs. Elle gardera cette couleur jusqu'à un certain point, mais plus tard. En attendant, chez Hitchcock ou rien n'est gratuit, on a vite fait d'identifier la marque d'une faute.

Cette impression est accentuée par la cavale de la jeune femme, ponctuée de rencontres avec un policier qui fait très peur (On retrouve la vieille phobie Hitchcockienne de la police). On pourra sourire de son comportement erratique, en particulier chez le concessionnaire, ou elle vient en hâte changer de voiture. Sans doute pour détourner les soupçons ou brouiller les pistes, mais elle ne fait qu'empirer les choses... Quoi qu'il en soit, c'est bien sûr de son point de vue que nous assistons à l'ensemble de la cavale, et bien sûr elle se rend bien compte qu'elle n'est pas douée. Dans cette partie du film, toujours baignée par le soleil impertinent de l'Ouest américain, on est encore en plein réalisme, en pleine Amérique profonde. Ca ne va pas durer, puisque durant sa fuite, Marion se retrouve en pleine averse, et va passer littéralement de l'autre côté du miroir: perdue, elle avise une lumière au bout du tunnel de pluie: le motel Bates. Normalement elle n'aurait jamais du y atterrir...

Une fois passée de l'autre coté donc, Marion Crane va rencontrer son destin en la personne de Norman Bates (Anthony Perkins), qui tient un motel. Un garçon un peu timide avec lequel elle sympathise, et de toute évidence leur rencontre est celle de deux solitudes. Le temps, sans s'arrêter, change d'option ici, et Hitchcock ne se permet plus d'ellipse. C'est presqu'une deuxième transgression: il nous a mené par le bout du nez, a installé cette situation d'extrême urgence pour Marion, et maintenant il lui impose, ainsi qu'au spectateur, une halte. Comme chacun sait, il va ensuite être question de taxidermie, le hobby étrange d'un jeune homme désoeuvré dont la mère franchement abusive se manifeste de temps à autre, imposant au jeune homme de passer du temps dans le motel situé à coté de l'imposante et sinistre baraque ou elle règne en maitresse despotique. Il va aussi être question d'échange, entre ces deux personnes qui sont disposées à profiter de la présence de l'autre-jusqu'à un certain point. On sait que Norman, qui espionne Marion se déshabillant par un trou dans le mur de son bureau, la désire effectivement, mais Marion? Elle est un peu décontenancée par le jeune homme, mais à un moment, elle l'invite à partager son repas dans sa propre chambre du motel; c'est Norman qui décline, préférant l'informalité de son salon à coté du bureau du motel. C'est à ce moment, durant la conversation que se situe la première allusion aux oiseaux, qui décorent la pièce: en gravure dans des cadres, et bien sur empaillés, le plus spectaculaire étant une chouette dont les ailes déployées semblent menacer les deux jeunes gens... On retrouvera cette image d'oiseaux, empaillés, dans de nombreuses scènes, et une autre chouette empaillée se trouve d'ailleurs à l'entrée de la chambre de Mrs Bates. Très vite, la conversation dévie pourtant de la taxidermie, pour se concentrer justement sur la mère de Norman.

Puis le film passe par l'extraordinaire scène dite de la douche, sur laquelle je ne m'étendrai pas, pour un certain nombre de raisons: d'une part, elle est suffisamment connue, ensuite elle est un objet cinématographique pur, à voir et entendre. Notons que le story-board en a été dessiné par Bass, qui a défini de lui-même la scène telle qu'elle a ensuite été tournée. Donc Marion Crane prend une douche, et... disparaît du film. Trois transgressions pour le prix d'une: faire disparaître la star, il fallait l'oser; mais en prime tourner sans aucune ellipse une scène de meurtre à coups de couteaux, aussi explicite que possible, enfin sur le corps nu d'une jeune femme (Et cela, sans équivoque, et sans pour autant montrer les "naughty bits", du moins pas officiellement). C'est l'un des aspects, si je puis me permettre cette digression, sur lequel Spielberg est l'héritier de Hitchcock: il s'agit souvent chez lui de montrer l'immontrable, le jamais vu avant, ce qu'on n'ose même pas imaginer. C'est aussi l'un des apports essentiels de Psycho. La scène de la douche est purement et simplement une scène jamais vue ni imaginée auparavant.

L'espace d'un instant, le spectateur, une fois la star du film partie, se retrouve de façon inattendue dans les bras peu assurés d'Anthony Perkins, qui a pour mission de faire disparaître les traces d'un crime, là encore en temps réel. Hitchcock, qui démontra plus d'une fois que tuer n'est ni facile ni une partie de plaisir, se concentre ici sur les conséquences physiques et immédiates d'un meurtre, et la logistique de celui qui doit camoufler la présence du crime. Un soupçon de suspense nous implique même à ses côtés, lors de la lente descente d'une voiture au fond d'une mare: elle cesse sa descente, laissant le jeune homme dans l'angoisse... Angoisse que nous partageons bien sur. 

On se trouve ensuite dans une autre histoire, liée à cette longue exposition: Sam et Lila, la soeur de marion, joignent leurs efforts pour retrouver la disparue. Lila est interprétée par Vera Miles, qui obtient enfin un rôle de premier plan chez Hitchcock qui voulait tant retravailler avec elle (La première fois, c'était dans l'autre film tardif noir et blanc, le quasi-documentaire The wrong man). Une nouvelle forme de transgression apparaît dans l'énoncé fréquent et assez brutal de la faute commise par Marion, révélée à Sam, reprise par le détective qui suit Lila, puis dite à un shérif local qui pourrait les aider; ce rappel constant d'un péché commis par l'ex-héroïne contraste avec les habituels arrangements de la vérité si courants d'un cinéma américain qui tend à arrondir les angles. Autre transgression essentielle, celle qui conduit le détective, un super-crack joué par Martin Balsam, sur la piste de Marion jusque dans le motel Bates... Il s'approche de la vérité, tant et si bien... qu'il va y souffrir d'une mort montrée dans une nouvelle scène à la violence qui varie énormément sur la précédente, mais qui en possède des réminiscences (A commencer par l'extraordinaire musique de Bernard Herrmann). On peut d'ailleurs considérer l'intervention de Richard Farnsworth dans Misery de Rob Reiner comme un remake de cette scène, ou en tout cas un hommage frappant... L'enquête personnelle menée par Lila et Sam les conduira aussi au Motel Bates pour une confrontation avec l'horreur. C'est là qu'on apprendra toute la vérité, au terme d'un film fabuleux, complexe, et on l'a vu, hautement transgressif.

Psycho n'est pourtant en rien inattendu dans l'oeuvre d'Hitchcock: il annonce la couleur, si j'ose dire, dès l'utilisation du noir et blanc, inspiré de son travail à la télévision (dont il reprend les méthodes de tournage afin de travailler dans l'urgence); il y reprend aussi une thématique qui a déjà été exploitée dans de nombreux films; pour s'en tenir aux films les plus proches chronologiquement, on constate que le mariage, le mot de la fin de North by northwest, est ici omniprésent, depuis le fantasme de Marion et Sam au début, jusqu'à ce mensonge imaginé par Lila pour enquêter chez Norman, sous le couvert d'être un couple en pleine lune de miel qui cherche à s'installer dans un motel. Au passage, le mariage passe aussi par les à-cotés: discussion de Patricia Hitchcock, la réflexion de la femme du Shérif de Fairvale en entendant parler de "Mrs bates": "Ah, Norman s'est marié, quelle bonne nouvelle!"... Le mariage donc comme seule issue possible aux amoureux, mais aussi le mariage au fin fond d'un lourd secret: l'amant de Mrs Bates aurait été assassiné parce que la maman de Norman aurait appris qu'il était marié, avec deux enfants. Par ailleurs, la sexualité dans toute sa complexité telle qu'elle s'étale ici baignait tous les films d'Hitchcock depuis les années 20. Et Vertigo était déjà une histoire en trompe-l'oeil, un conte policier qui dégénérait en histoire de fantôme puis en histoire d'amour fou... Ici, il y a à nouveau un mélange réussi des genres... Qui tombe certes un peu en compote lors de l'explication obligatoire d'un psychiatre qui gâche 5 minutes de film vers la fin; Hitchcock se passera avec raison d'explication dans le film suivant... qui sera un échec cuisant partiellement en raison de l'incompréhension du public. Mais The Birds reprendra à son compte la thématique de la mère qui prend trop de place, Hitchcock confiant à Jessica Tandy un rôle toutefois bien éloigné de Mrs Bates... Psycho prolonge et relaie donc les thèmes de l'oeuvre, sans s'en éloigner autant qu'on l'aurait cru.

Ce sommet brutal de l'oeuvre d'Alfred Hitchcock, me semble résumer à lui seul à la fois les aspects les profonds de la réflexion sur le crime, le péché, le sexe, l'amour et la culpabilité du cinéaste, tout comme les côtés les plus jouissivement futiles de son cinéma. C'est cette dernière piste qu'il a choisi d'explorer pour faire la promotion de son film, en 1960, en s'inspirant de Clouzot et de ses Diaboliques. Il est vrai qu'il est courant, en 1960, de s'installer au milieu d'un film dans une salle obscure, et d'en rattraper le début ensuite. Mais Hitchcock a revendiqué sa création, en réussissant à imposer des heures d'ouvertures et de fermeture des salles, une façon d'affirmer la toute-puissance de l'acte de création qu'est le cinéma. Pour finir, il y aura toujours des esprits chagrins pour venir faire la fine bouche sous prétexte de l'age du film, ou de sa relative sagesse face aux bains de sang contemporains, devant ce qui est une des plus belles preuves du génie d'Hitchcock; Il serait absurde de vouloir comparer Psycho à Saw, ou tout autre film... Ce film qui parle avec génie de crime au quotidien, autant d'en commettre que d'en subir, et de se faire, ne serait-ce que l'espace d'un instant, le complice d'un acte délictueux, qui suit avec minutie la cavale absurde d'une personne comme vous et moi qui a volé sans jamais en avoir eu la vocation, juste l'impulsion, et en détaille les conséquences cosmiques dans toute leur brutalité et leur horreur, n'a jamais été égalé, et ne le sera probablement jamais. Je n'écris le "probablement" que par politesse. 

PS: Fairvale, l'Eden recherché par Marion Crane soudain entaché d'horreur et de sang, n'existe pas. Phoenix, si, bien sûr.

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock
4 février 2025 2 04 /02 /février /2025 22:25

Ce n'est pas pour la série Alfred Hitchcock presents que ce film de 48 minutes a été tourné, mais pour la série d'anthologie Startime. Il n'y était pas associé, mais on lui a confié un épisode, et il est probable qu'il a été attiré par l'idée de réaliser un moyen métrage assez imposant, en couleurs, dans es conditions assez proches de celles dont il disposait pour sa propre série. Le film est passionnant, tout en offrant une vue de la vie quotidienne, dans laquelle cette fois on ne trouvera ni mort violente, ni espionnage... Mais bien un thème si éminemment Hitchcockien, celui de la culpabilité sous l'angle du soupçon.

Un incident se déroule, sous nos yeux,  nous le verrons de trois angles différents: un vieil homme, qui règle la circulation à proximité d'une école, a un accrochage avec une mère de famille, qui se trouve être l'épouse d'une huile locale. Des témoins sont présents, un professeur d'une part et un couple qui vient de s'installer en face, dont la femme connait le vieil homme: il sait des choses sur elle qui pourraient lui valoir des ennuis, estime-t-elle... Quelques jours plus tard on signifie au vieil homme qu'il est licencié, car une lettre anonyme le dénonce comme un "vieux vicieux"... Désireux de ne pas le laisser se voir accusé à tort, les membres de sa famille mènent l'enquête...

Le film est une simple promenade, relativement légère, au pays du soupçon, du qu'en dira-t-on, et de la suspicion de classe, ordinaire autant que crasseuse. La famille du vieil homme a un débat, dans lequel s'expose toute la complexité de l'affaire: faut-il laisser dire, et passer à autre chose, ou se battre pour la reputation? En d'autres termes, une accusation dont on sait qu'elle est fausse, a-t-elle besoin d'être ignorée ou combattue? Et quel rôle la société peut-elle jouer face à un crime supposé, ou imaginé? 

En nous associant de fait au destin du vieil homme, le metteur en scène nous rappelle ses sympathies pour le peuple, qui étaient déjà si présentes dans ses oeuvres Anglaises, et qui n se sont jamais démenties. On les a d'ailleurs retrouvées, au fil de certains films, au détour de Shadow of a doubt, ou même The wrong man. Et le dispositif scénaristique qui consiste à utiliser la poudre aux yeux de trois angles d'approche pour une seule scène, est intéressant. Moins toutefois que la façon dont Hitchcock a filmé la quasi-plaidoirie de george peppard devant sa famille, d'un autre angle encore plus inattendu: depuis le plafond du studio! ...Un film qui prend donc de la hauteur!

A noter, si George Peppard ne tournera pas d'autre film pour Hitchcock, en revanche Vera Miles en est à sa troisième collaboration avec lui. Et la quatrième serait sa plus spectaculaire... Ce qui ne va pas tarder.

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock TV
4 février 2025 2 04 /02 /février /2025 22:13

Un Britannique, Cavendish (James Donald), raconte: son arrivée, il y a longtemps, dans un hôtel dans les Alpes Suisses, et sa rencontre avec une jeune femme... Mariée de fraîche date, Mme Stella Ballister (patricia Owens) y apprenait pourtant la mort de son époux, décédé à cause de son impatience de se mesurer à la montagne. Très vite, Cavendish et Stella sont amenés à se revoir, lui lui faisant la cour, et elle s'accrochant à une  idée et une seule: dans quarante ans, le glacier lui rendra le cadavre de son mari...

On cherche évidemment à cerner l'angle romantique dans ce film court de la série Alfred Hictchcock presents. Non que l'oeuvre du maître manque de romantisme, force est de constater toutefois qu'il est généralement teinté de la plus élémentaire noirceur... A plus forte raison dans la série télévisée, dans laquelle rien que de mémoire, on ya assisté à la cavale d'au moins deux maris qui s'étaient débarrassés de leur épouse en étant, disons, créatifs autant qu'impulsifs!

Ce ne sera donc pas une surprise si on constate que derrière l'impeccable attitude si Britannique, le flegme imperturbable de ces protagonistes, se cache une histoire à la méchanceté particulièrement acérée, et un certain sadisme pointu, pour ces gens qui se condamnent à se refuser de laisser libre cours à leur rapprochement (car Stella, entre deux accès de son obsession morbide, le dit sans ambages à Cavendish: en d'autres circonstances, elle aurait cédé à ses avances...

Et au final, tout ça pour... ?

Un film de haute volée, à la méchanceté militante, qui montre le poison des conventions, l'absurdité du romantisme, et la façon dont l'obsession moureuse débouche sur du vide,le tout enveloppé dans une idée poétique que n'auraient sans doute pas reniée un ou deux surréalistes, ce besoin absurde pour Stella de revoir son mari une dernière fois... Y compris quarante ans après sa mort.

 

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV
31 janvier 2025 5 31 /01 /janvier /2025 18:55

Nous faisons la connaissance d'Arthur (laurence Harvey), le narrateur, qui a une exploitation d'élevage de volailles, ultra-moderne en apparence, mais il nous explique aussi sans scrupule ni vergogne qu'il est un tueur...

Et il nous raconte également sa vie amoureuse: lorsque sa fiancée Helen (hazel Court) l'a laissé tomber, il a vraiment apprécié le changement. En revanche quand elle a changé d'avis, il ne l'a pas supportée longtemps...

La disparition de la jeune femme a mis la puce à l'oreille de son ami John (Patrick McNee), qui a alerté la police. Mais Arthur n'a eu aucun problème à se débarrasser du corps...

Un narrateur qui s'adresse directement à nous, de l'humour noir basé sur une intrigue meurtrière, un ton désespérément Britannique... Le film ressemble bien moins à l'oeuvre d'Hictchcock qu'à, disons, Kind hearts and coronets de Robert Hamer! On appréciera le changement, mais ce court film de la série Alfred Hitchcock presents, s'il permet de rappeler l'humour de l'auteur de The trouble with Harry, reste quand même un cas très isolé.

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV
27 janvier 2025 1 27 /01 /janvier /2025 16:23

Shakespeare, dans Hamlet (Acte II, sc. II)  nous gratifie d'une allusion à Hitchcock: Hamlet définit sa folie par la désorientation géographique, I am but mad north-northwest. Le barde avait nécessairement vu le film, ou alors cette introduction absurde n'est ici que pour souligner à quel point il est vain de vouloir à tout prix renvoyer à Shakespeare lorsqu'on a Hitchcock entre les mains. Et si effectivement le titre etait une allusion consciente à Hamlet, quelle importance, réellement? North by northwest est sans doute, pour reprendre la formule chère à Hitchcock, d'abord et avant tout une "tranche de gateau", un film, à consommer avec plaisir. Et peut-être un peu plus, aussi.... Un opéra de celluloid dans sa forme la plus parfaite, la plus classique.

The 39 steps (1935), bilan de la période Anglaise, se présentait comme un fascinant catalogue de tout ce qu'Hitchcock savait faire et souhaitait faire, un film en liberté totale dans lequel on avait le sentiment d'un accomplissment parfait: rien, absolument rien ne manquait, tout était en place, et l'excitation de voir le film est encore palpable aujourd'hui. C'est à peu près à ce type de sentiment que renvoie cette oeuvre de 1959, sorte de bilan de la période Américaine, mené tambour battant, et dont on se dit après tout qu'il ne peut rien y manquer, aucune scène coupée n'attend d'être redécouverte, bref, il est tel qu'il doit être, sorte de mètre-étalon par lequel repenser toute la gamme des films d'espionnage et d'aventures... et à la base de ce film parfaitement Hitchcockien à 100 %, il y a... le scénariste Ernest Lehmann. Celui-ci a de son propre aveu livré clés en mains à Hitch un film parfaitement Hitchcockien, dans lequel il a su insuffler le souffle nécessaire, un personnage à la Cary Grant, des allusions humoristiques à la mère abusive, des lieux emblématiques, une blonde fatale, une histoire d'amour qui se met à prendre le pas sur l'aventure, un faux coupable, une solide dose d 'absurdité, un méchant suave, façon James Mason, et des enchainements anthologiques d'évènements qui ne perdent jamais le spectateur en route, tout en rendant la navigation aussi fluide que possible... On le voit venir, ce brave Lehmann; de là à s'attribuer tout le mérite, il n'y a qu'un pas que peu de scénaristes hésitent à franchir, enflammés par le regard trop partial de la critique à l'égard du réalisateur, sorte de symbole de la politique des auteurs (Voir à ce sujet les remarques hallucinantes d'un Nunnally Johnson s'atribuant tous les mérites de quelques films de John Ford, et considérant l'apport de Ford lui-même comme nul: il n'avait, après tout, que choisi et dirigé les acteurs, défini et orchestré le cadre, imposé le rythme, supervisé le montage et d'autres babioles)... Avec Hitchcock, quand bien même ce brave Ernest aurait effectivement été l'auteur des péripéties dans leur intégralité, on aurait quand même une leçon de mise en scène dans chaque plan, d'une part; et d'autre part, le grand Hitch était célèbre pour sa propension à s'accaparer le matériel, et l'infléchir dans la seule direction possible, celle dictée par la mise en scène. Inutile d'attribuer à quelqu'un d'autre la présence dans ce film d'une hallucinante scène de suspense en plein jour dans un champ, à la fois contrepied du cliché du film noir et mise en abyme exceptionnelle d'une matérialisation du vide, ou d'une allusion salace en bouquet final, ou de scènes de cinéma muet visant à nous montrer en silence, paradoxalement, des personnages qui téléphonent. C'est du Hitchock pur...

Hitchockienne également, cette notion de parcours qui est imposée au personnage principal, de New York, et le Plaza Hotel, à Rapid City, à coté du Mont Rushmore, en passant par Glen Cove, Long Island ou les Nations Unies, voire Grand central Station à New York, Chicago, sans oublier le train Twentieth Century Limited, cher à Hawks, ou une portion importante du film se déroule, devenant ainsi un lieu, plus qu'un moyen de locomotion. Cette géographie s'accompagne bien sur d'une grande lisibilité, chaque lieu faisant l'objet d'une exposition et d'une mention explicite dans les dialogues... Impossible de se perdre en apparence dans ce film dont la perfection narrative est légendaire. Cette perfection est pourtant batie, a priori, sur du vide... en effet, comme il se définit lui-même, le héros Roger Thornhill n'est 'rien': lorsqu'il offre du feu à Eva Marie Saint, cary grant lui explique que le O de son nom, dont les initiales (R. O. T.) figurent sur l'étui d'allumettes qu'il lui a tendu, renvoie à rien, O is for nothing. Ce n'est pourtant pas tout à fait rien puisque la vision de cet acronyme incongru renvoie lors de la fin du film à un signe, la jeune femme découvrant ce même symbole comme une preuve, en plein danger, que Roger est présent, prèt à la sauver du destin qui la menace. Néanmoins le début du film, avec ce Roger Thornhill, publicitaire, est un menteur professionnel, quelqu'un qui a bati son aisance financière sur du vide. Et bien sûr, quand on le prend pour un agent secret (Ce qui est très clair et très Hitchcockein dans le film, grâce encore une fois à la lisibilité et aux enchainements des évènements), Thornhill ne sait pas que cet agent secret est encore plus vide que lui, puisqu'il n'existe pas... Donc, du vide, partout, y compris dans les convictions des méchants, dont l'appat du gain reste la principale motivation pour trahir. Mais de toutes façons, dans ce film, tout le monde ment, personne ne semble croire en rien; comme lorsque quelqu'un dit la vérité, il est ausstôt pris pour un menteur: Martin Landau, en suave secrétaire, dit à Thornhill qu'il est inutile de tenter de prouver son indentité, les papiers ne pouvant qu'être faux, ou encore Van Damm, joué par James Mason, parle des dénégations de Thornhill comme d'une performance... ce thème du jeu, de la mise en scène, est aussi cher à Hitchock. On le retrouve tout au long du film, avec ses manipulateurs, ses objets en trompe-l'oeil, et ses péripéties: le personnage de Kaplan est peut-être inventé, mais cela ne l'empêche pas d'avoir une existence suffisamment tangible, grâce à quelques trucs de mise en scène de la part de la CIA. la fausse mort de Thornhill est dûment mise en scène elle aussi lorsque c'est nécessaire, et Thornhill joue l'imbécile  afin de se tirer d'une situation embarrassante. 

Et puis, il y a Eve. C'est bien sûr son vrai nom, et derrière ce prénom symbolique se cache d'une certaine manière LA femme. Mais bien sur, l'alliage entre Eva Marie-Saint et Cary Grant nous vaut un feu d'artifice, Hitchcock ayant particulièrement apprécié de pouvoir se lancer dans ce qui est apparemment une digression une fois son personnage dans le train, mais qui est beaucoup plus une affirmation de son intérêt pour la rencontre érotique entre un homme et une femme; "Boy meets girl", donc, comme par inadvertance dans un premier temps lorsqu'ils se croisent dans un couloir du train. Puis elle l'invite à sa table, et lui fait du rentre-dedans d'une façon très directe, avant de l'inviter sans aucun scrupule dans son compartiment, où la conversation prend dans la mesure du possible (la censure de 1959 étant quand même un brin tatillonne) un tournant apparemment plus intime. Eva Marie-Saint n'est pas aussi célébrée que peuvent l'être Ingrid Bergman et Grace Kelly, mais elle est fantastique.

Il est intéressant de constater que ce film qui professe donc le trou noir politique (Van Damm, de son coté, ne trahit l'Ouest que par appat du gain, et lorsqu'on lui demande ce que fait son ennemi, l'énigmatique "professeur" de la CIA joué par Leo G. Carroll suppose qu'il "vend des secrets gouvernementaux, peut-être") et l'absence d'engagement (Thornhill, exaspéré d'être pris pour un agent secret, propose à la CIA d'apprendre à "perdre quelques guerres froides"...) a débouché dans le cinéma d'aventures sur un héritage fortement paradoxal, puisque il ne faut pas chercher très loin la filiation entre ce film et la série des James Bond, dont le héros s'efforcera toujours d'être du bon coté, même s'il est évident que la encore les véritables motivations des protagonistes pèsent bien peu face au plaisir du spectateur, qui lui n'a pas besoin d'une cohérence politique. Mais aucun film de ce genre n'est jamais parvenu à la cheville de ce North by northwest dont la gestion miraculeuse du suspense, l'humour parfaitement dosé, et la thématique Hitchcockienne habituelle (fausse culpabilité en tête) se conjuguent avec le plaisir d'une interprétation absolument parfaite. A voir, revoir et voir encore.

 

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Cary Grant
27 janvier 2025 1 27 /01 /janvier /2025 15:28

Hitchcock a généralement eu tendance, dans sa carrière, à se garder d'aller vers le fantastique: la seule vraie exception, bien sûr, est The Birds, dans lequel il imagine une invasion inquiétante d'oiseaux, un phénomène parfaitement incongru et qui restera sans explication. Sinon, l'ambiance de certains de ses films, à commencer évidemment par Psycho, a souvent emprunté au genre fantastique, mais en se gardant toujours de céder à la tentation. Comme le faisait remarquer le metteur en scène, le fantastique aurait probablement forcé les films à fournir des explications pour les phénomènes, ou des développements qui en auraient diminué la portée... 

Avec Alfred Hitchcock presents, en revanche, c'est bien différent: le metteur en scène sest gentiment laissé aller, ça et là, de façon très sporadique, à des écarts. Le cas le plus célèbre est The case of Mr Pelham, un court métrage à l'ironie toute Kafkaïenne... Ce film est le seul de son auteur à jouer sur un registre inattendu pour lui: l'histoire de fantômes... La seule fois où Hitchcock avait tourné autour de ce type de manifestation était pour une vision de folie alcoolique dans The Pleasure Garden, en 1925!

A Londres au début du XXe siècle, un ancien policier (John Williams) invite un certain nombre de convives à un diner très particulier... Il s'agir pour lui de résoudre une affaire non élucidée, pour laquelle il a eu une idée inattendue: confondre le suspect en faisant intervenir, avec la complicité des autres invités, le faux fantôme de la victime...

Bien sûr que le film joue sur une situation hautement improbable, mais le contraste si délicieusement Britannique entre les apparitions (superbement orchestrées) du fantôme, et la mondanité tranquille et apaisée du dîner, durant lequel tous les convives à l'exception du coupable jouent l'ignorance, est particulièrement efficace... On ne s'étonnera pas dans ces conditions que le meurtrier ne finisse par se trahir. 

Ne parlons donc pas, si vous le voulez bien, de la fin.

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV
27 janvier 2025 1 27 /01 /janvier /2025 15:08

En Malaisie, un soir, un officier colonial (James Donald) est coincé dans un lit: il a vu un aspic entrer sous le drap, et s'installer bien au chaud sur son corps. Quand un de ses collègues (Wendell Corey) arrive, il pourrait lui fournir de l'aide, mais il préfère en profiter pour torturer l'autre homme, qu'il ne croit pas: il sait qu'il est alcoolique...

C'est un monument de sadisme, qu'Hitchcock a adapté de Roald Dahl (une nouvelle qui a aussi été adaptée récemment par Wes Anderson, mais de façon sans doute plus fidèle: car dans la nouvelle de Dahl, il n'y a pas de serpent... Juste un homme effrayé, et de la confusion... ). Le film est un court programme de 25 minutes pour la série Alfred Hitchcock presents.

Ce choix des scénaristes ne change rien à l'affaire finalement, car en se reposant sur la dynamique mise au point par Roald Dahl, il permet quand même à la domination sadique d'un homme sur un autre, de s'effectuer, tout en créant un suspense particulièrement fort... On ne peut que croire Harry quand il annonce qu'il y a un serpent sur lui, et de cette confiance dans le personnage, le suspense nait, et se complique de la frustration intense créée par le comportement de l'autre homme. Du grand art...

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV
26 janvier 2025 7 26 /01 /janvier /2025 15:55

Un passager Américain (Keenan Wynn)  d'une croisière est un joueur invétéré, et il se laisse aller à jouer tout le budget de ses vacances sur un pari organisé sous forme d'une vente aux enchères: il s'agit pour les joueurs de déterminer la moyenne de la vitesse du bateau... Tablant sur une tempête violente, il a anticipé que le capitaine serait prudent, mais le lendemain le temps est au beau fixe et le paquebot file à une bonne allure... Il a une idée saugrenue: se jeter à l'eau, sous l'oeil d'une femme (Doreen Lang) qu'il a rencontrée sur le bateau: il faut qu'il y ait un témoin...

C'est à nouveau, après Lamb to the slaughter, une adaptation par Hitchcok d'une nouvelle d'humour macabre de Roald Dahl... Et c'est typique de l'oeuvre de l'auteur Gallois, qui y oppose d'une part la vulgarité de Keenan Wynn, et le snobisme des gens riches qui l'entourent; mais il oppose aussi la classe britannique et le comportement du "héros" Américain. A ce titre, Keenan Wynn y compose un personnage particulièrement désagréable, mais la façon dont une des voyageuses le considère (c'est Fay Wray) est à double tranchant: elle est aussi hautaine, finalement, qu'il est grossier...

C'est un petit film délicieusement ironique, qui repose moins sur le suspense que sur sa chute... Dans tous les sens du terme. Et à propos de sens, le titre est un jeu de mots entre Pool, au sens de piscine, ou d'étendue d'eau d'une part, et du fait qu'un pari collectif est généralement appelé en Anglais un pool.

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV
22 janvier 2025 3 22 /01 /janvier /2025 17:36

Vertigo, c'est l'un des films les plus importants d'Hitchcock, l'un des plus aboutis; c'est aussi un monument incontournable du cinéma Américain, une valse triste de mort, d'amour et d'obsession sexuelle...

Il y a semble-t-il un petit nombre de fans du maître qui confessent une certaine gêne avec ce film, en raison de sa lenteur: de fait, Hitchcock adopte un rythme particulièrement lent, en particulier dans la première partie de l'intrigue. Il s'agit pour lui de suivre le point de vue de John Scotty Ferguson (James Stewart), le détective en retraite qui a été obligé d'abandonner son métier en raison d'un accident survenu à cause de son vertige, qui a couté la vie à un officier de police. Dans ce rôle qui le voit assumer avec panache son âge, pas question pour Stewart de jouer au héros d'action, et de la sorte, "Scotty" devient un nouveau héros Hitchcockien, un de ces Mesieurs Tout-le-monde qui hantent son cinéma dans les années 50 et 60.

En faisant son enquête sur le personnage d'une jeune femme (Kim Novak) hantée par l'étrange présence d'une morte, Scotty doit prendre le temps de se confronter à l'étrange parcours qu'on lui soumet, et le spectateur avec; et puis il faut à tout ce petit monde rentrer dans le ton de cette poursuite avec la mort... Et le spectacle en vaut la peine, comme lors de cette vision presque sortie d'un Norman Rockwell, d'une femme en gris, au milieu d'un parterre de couleurs, chez un fleuriste, ou ce magnifique plan de Madeleine, qui sort d'une voiture sous le Golden Gate, et se place un instant au bord de l'eau, avec un voile qui peine à rester en place... avant de se jeter à l'eau.

Il y a deux énigmes au coeur de l'intrigue de ce film, du moins la première fois. Aucune, finalement, n'a d'importance: oui, on apprend très vite que cette histoire de hantise n'est qu'une supercherie, destinée in fine à se débarrasser en toute impunité de quelqu'un. La victime collatérale sera Scotty, qui se verra proposer toutefois une seconde énigme: il verra, après avoir assisté à la mort de la femme dont il est tombé amoureux, la même jeune femme dans la rue, avec quelques menues différences (Couleur de cheveux, maquillage, etc...). L'énigme qu'il s'impose est la suivante: à partir de cette ébauche prometteuse, peut-il totalement reconstituer Madeleine? Elle n'est proposée qu'à lui, puisque le pot-aux-roses est également expliqué aux spectateurs en même temps que le fin mot de la première partie... le film se transforme ainsi en un spectacle rare: le spectateur du film voit un homme s'embarquer dans une quête obsessive et profondément égoïste, qui consiste à recréer une femme aimée et morte, au détriment d'une femme vivante et aimante. Et bien sûr, elles sont une et une seule... Dès la deuxième vision, toutefois, ces énigmes laissent la place à une série de constructions, à des échafaudages qui certes tiennent du roman-feuilleton, mais mettent en valeur des pans habituellement laissés de côté par le cinéma Américain, entre sacrifice odieux, folie morbide et amour égoïste...

Le vertige de Scotty, son statut de vieux célibataire, son passé à peine évoqué avec son amie Midge, et un certain nombre de symboles concourent par ailleurs à faire du film une parabole de l'impuissance sexuelle. Ca culmine évidemment lors d'une scène célèbre, durant laquelle les héros doivent monter une tour. Scotty abandonnera avant la fin, et cela résultera en une mort soudaine... Le symbole sexuel se double pour une bonne part du film d'un jeu sur la mort, avec une forte utilisation, concernant Madeleine, de codes de couleurs: elle porte du blanc, du gris... Et occasionnellement, du vert. Ce vert se voit en particulier pour faire un lien avec Judy Barton, le sosie, qui porte une robe d'un vert voyant, mais après tout, la voiture de Madeleine était déjà vert bouteille. cette même couleur verte, provenant des néons d'une enseigne d'hôtel, projette sur Scotty inquiet de la réussite de la transformation de Judy en Madeleine, un teint qui le montre plus inquiétant qu'autre chose, et lors de la scène de la transformation ultime, un halo verdâtre transforme Madeleine en fantôme...

Pour faire passer tout ce sous-texte scabreux ou morbide, Hitchcock se sert d'un organe qui est cité dès le générique, à savoir l'oeil. Il donne à voir au spectateur un homme qui subit une mise en scène permanente, un tissu de bobards d'abord destiné à l'appâter afin qu'il accepte le travail qui lui est proposé et qu'il participe involontairement au plan démoniaque de celui qui l'a engagé; ensuite, une première vision de "Madeleine" entrevue dans un restaurant, habillée d'une robe flamboyante, éclairée comme à la parade: une apparition de star, en fait. Puis l'intrigue qui lui est montrée s'épaissit, mais de nombreux détails confinent à la mise en scène cinématographique, et à l'acte de raconter des films: lorsque Scotty et Midge se rendent dans une librairie pour y glaner des détails sur un à-côté de l'affaire, la lumière de la boutique baisse jusqu'à la fin de l'histoire qui leur est contée. Quand ils quittent les lieux, la lumière revient soudainement, comme quand une séance de cinéma se termine...

La magnifique musique de Bernard Herrmann, la photographie constamment inventive, se conjuguent avec l'utilisation fabuleuse des extérieurs: Hitchcock, qui détestait tant tourner en extérieurs, a magnifiquement su montrer la ville de San Francisco, mais aussi d'autres paysages de la Californie du nord. Comme d'habitude, il combine la réalité d'un lieu, et les raccourcis locaux (Goden Gate, missions Espagnoles), au profit d'une intrigue assez folle: une histoire d'amour, d'amour fou bien sûr, mais qui aboutit à la mort, avant de tourner à la folie maniaque. Un joyau noir, donc, d'un des cinéastes les plus doués de tous les temps.

 

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Noir
22 janvier 2025 3 22 /01 /janvier /2025 17:22

C'est le premier film qui propose l'une des adaptations de quatre nouvelles criminelles ou fantastiques, réalisées par Hitchcock pour sa série Alfred Hitchcock Presents, entre 1958 et 1962. Deux autres nouvelles de l'écrivain Gallois seront également adaptées pour la série mais réalisées par d'autres. D'emblée, on est surpris de l'adéquation entre les deux univers... Dahl aimait à s'amuser du crime, Hitchcock le moraliste prenait parfois le parti d'en rire. Mais ici l'humour est noir, très noir, et bien inattendu...

Un policier rentre chez lui, sa femme (Barbara Bel Geddes) est enceinte et elle lui montre une immense douceur, lui promettant monts et merveilles afin qu'il se sente aussi bien que possible. Mais il est froid, distant et finit par lui annoncer son départ: il la quitte pour une autre. Elle refuse et le tue avec un gigot d'agneau qu'elle vient juste de retirer du congélateur. Puis elle met la viande à cuire, et arrange l'endroit: elle part faire des courses et en revenant fait tomber son sac de victuailles afin qu'on croie à sa surprise. Puis elle téléphone à la police...

C'est d'une telle simplicité, qu'il fallait y penser. En choisissant de devenir une criminelle aussi froide que possible (et après tout elle y a été provoquée), Mrs Maloney fait les choses tellement bien qu'on en oublierait facilement que son geste foi, froid, assumé, est à la base un crime du type passionnel. Le film entre d'ailleurs dans une autre dimension quand, une fois la police prévenue, l'intrigue pousse le spectateur à avoir peur pour Mary Maloney que les limiers qui mènent l'enquête ne trouvent la solution avant que le gigot ne soit prêt...

Une fois de plus nous sommes amenés à prendre parti pour un/une coupable, le fait est qu'en prime, une meurtrière y compris chez Hitchcock a rarement eu, au cinéma, d'incarnation aussi calme et douce que Barbara Bel Geddes, qui venait de tourner pour Hitchcock dans un tout autre type de film: Vertigo.

 

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Published by François Massarelli - dans Alfred Hitchcock Alfred Hitchcock presents TV