Cinquième film de Clampett à mettre Bugs Bunny en vedette,Corny concerto (1943) anticipe le travail de Friz Freleng, qui allait représenter dans Herr meets hare un lapin qui s'adonne à du ballet avec rien moins qu'Hermann Goering, ainsi que le fameux (Mais plus tardif) What's opera Doc?de Jones. Et ce nouveau film est une parodie de Fantasia, que Clampett a vu et revu avant de s'y attaquer : il y représente un Elmer Fudd modelé sur le présentateur du film-concert, mais avec un rien moins d'élégance dans le maintien...
Deux oeuvrettes musicales y sont illustrées à la façon de Disney (Et dans un style comme toujours animé par McKimson, mais visiblement bien différent de celui habituel de Clampett): Tales from the Vienna Woods, et Le Beau Danube Bleu, de Johann Strauss. Si le deuxième se voit gratifier d'une intrigue inspirée du Vilain petit canard, le premier est une énième variation sur le principe du chasseur et du lapin... Le premier est Porky pig, le deuxième est bien sûr Bugs.
C'est éblouissant de bout en bout, surtout la première partie, où chaque geste est pensé non seulement pour accompagner la musique, mais aussi en fonction de la marodie et de l'histoire racontée. On peut faire confiance à Bugs Bunny pour en faire des tonnes, et Clampett le rend virevoltant, excessif, en contrôle mais pas que : sur la fin, le lapin est une silhouette qui se perd dans ses excentricités au point de tomber à la renverse...
Le Danube bleu est l'occasion pour Clampett d'improviser une jeunesse de Daffy duck, en canard qui souhaite s'incruster dans une famille de cygnes. C'est impeccable et très drôle, là encore, avec un style qui rappelle Disney, mais qui n'en est pas...
Un chien meurt de faim... et rencontre un autre qui lui, en revanche, se porte à merveille. Il lui donne la recette du bonheur: trouver un maître, faire semblant de l'apprécier, le flatter à l'occasion, et le tour est joué... Pour illustrer ses propos, le film nous raconte la rencontre du chien beau parleur, avec son futur maître, Porky Pig. Celle-ci n'avait pas commencé sous les meilleurs auspices...
Le chien va en fait s'imposer chez Porky, comme seul un personnage de dessin animé peut le faire, et comme beaucoup de personnages de Chuck Jones le feront eux aussi: par l'invasion, l'obsession, et jusqu'à ce que Porky capitule... Et pourtant le film, si l'animation reste parfaitement adéquate, reste quand même bien sage.
Ceci est un classique absolu, en raison du fait que, tombé dans le domaine public, le film a été repris (dans un état épouvantable, bien entendu) dans un nombre incroyable de compilations vidéo, et a été diffusé dans beaucoup de programmes. Du coup, beaucoup de monde la vu! C'est amusant, puisqu'il s'agit d'un de ces films les plus mal polis effectués par la Warner, avant que les dessins animés de l'unité de Schlesinger deviennent tous plus présentables. C'est même un de ces films qui présentent le mieux l'esprit anarchique de Bob Clampett.
Par exemple, qui d'autre aurait pensé faire reposer l'intrigue d'un cartoon sur une cour de justice spécialisée en divorces? Mais c'est exactement de ça qu'il s'agit: Porky Pig est ici un juge qui doit statuer sur les situations maritales de couples en crises, et son affaire principale en ce jour, est la procédure de divorce engagée par Mrs Daffy Duck, contre son mari, qu'elle juge incapable.
Honnêtement, on la comprend: quand elle lui confie la garde de leur oeuf-nouvellement-pondu, il fait des tours de passe-passe avec, et... le perd. Comme l'intrigue est assez directe, Clampett affine son style en laissant ses animateurs se chercher, et faire dans l'excentricité militante. C'est une merveille...
Porky Pig est cette fois le présentateur d'un show radiophonique dans lequel il donne la parole à des animaux. La vraie vedette du film (Particulièrement long à plus de neuf minutes) est donc son invitée, Kansas City Kitty, une chatte volubile et possédant un accent Irlandais particulièrement proéminent. Elle raconte l'histoire de sa vie, et principalement comment elle est devenue la terreur des rongeurs de toute catégorie...
Le titre et l'intrigue sont inspirées d'un talk-show radio authentique, We the people, qui dans les années 30 donnait la parole à des citoyens venant raconter des histoires exemplaires ou inhabituelles. L'histoire de Kansas City Kitty sera bien entendu illustrée par l'essentiel du film, et Clampett et ses animateurs s'amusent avec les codes du cinéma des années 30, en particulier en donnant à la troupe des rats des airs d'une bande de gangsters...
Une fois de plus, Clampett s'amuse avec la censure, en montrant Kansas City Kitty qui nous raconte qu'elle a eu un chaton, puis s'est mariée... avant de se reprendre et de remettre l'histoire à l'endroit. Elle conclut l'épisode en regardant le spectateur droit dans les yeux, avant de s'éponger le front: on l'a échappée belle.
C'est durant la période de calme qui précède la bataille que ce film a été fait, et on jurerait avoir à faire à un film sorti après Pearl Harbor... Et pour cause, Clampett et ses animateurs s'y amusent avec une démonstration de force de l'armée Américaine, qui défile sous nos yeux avec un nombre impressionnant de gags idiots, de railleries de la chose militaire aussi.
C'est même troublant, de voir une équipe de dessinateurs, de gagmen et d'animateurs, qui ne savent pas encore qu'ils seront bientôt réquisitionnés pour l'effort de guerre, et tourneront des films de propagande, notamment les films de la série Private Snafu. Et autre chose troublante: pas patriote pour un sou (c'est l'une de ses immenses qualités), Clampett nous montre des soldats espérant échapper à la conscription...
Un gag par ailleurs me frappe, et me fait penser au ton délibérément adulte pour ne pas dire salace de la série des Snafu, destinés il est vrai non pas au grand public, mais seulement pour usage interne dans l'armée Aéricaine en temps de guerre: le narrateur attend qu'un canon tire, mais il ne se passe rien; on voit alors les deux artilleurs qui tirent à la courte paille. L'un d'entre eux, d'une voix délibérément idiote, dit qu'ils essaient de déterminer "lequel a la plus longue"...
Pour finir, Porky Pig, en quelques secondes de temps à l'écran, bat quand à lui le record de brièveté de ses contributions...
Une excellente idée de départ: une vitrine de librairie, montrant les best-sellers du moment, les vrais: c'est une photographie, et non un cartoon... Puis on passe à l'animation, et toutes les couvertures de livres, vues maintenant en gros plans, sont détournées. Le premier livre, une histoire de l'Ouest Américain, s'anime et nous montre Porky Pig vivant la vie romantique d'un cow-boy le soir au coin du feu. La deuxième couverture, celle du Vilain petit canard, s'anime également, et le canard de la couverture nous est particulièrement familier. C'est Daffy Duck, qui va passer de couverture en couverture et s'attirer l'attention d'un loup (De Wall Street)...
L'idée resservira, bien sûr, en 1946, pour l'éblouissant Book revue, également réalisé par Bob Clampett et sorti en 1946, dans lequel Daffy Duck mènera une revue chantée, dont il sera le maître de cérémonie, largement inspiré par Danny Kaye. Ce film-ci (Très drôle, d'ailleurs) est dans le domaine public, dans la mesure où la Warner n'en a pas renouvelé le copyright. Sans doute à cause d'un énième gag impliquant les Afro-Américains.
Pas d'intrigue, pas de prétexte, comme le titre l'explique à travers un lamentable jeu de mots, Porky's snooze reel (Porky's news reel, et "snooze", une bonne grosse sieste) est en fait une série d'actualités disjointes de cinéma. Un prétexte donc une fois de plus à enchaîner les gags gratuits, les jeux de mots idiots, etc... L'exercice, on le sait bien, est une activité dans laquelle Avery était passé maître, et Clampett, disons, se débrouillait plutôt bien. Mais il n'y a sans doute pas de quoi se relever la nuit.
Pour ce dernier film de 1940, la série des Porky pig inaugure une collaboration inédite: ça faisait quelque temps que McCabe était le principal animateur de Clampett, et celui-ci lui laisse donc un strapontin de metteur en scène. Ce n'est généralement pas une bonne nouvelle, puisque ça annonce le plus souvent un passage de relais imposé, mais ici, c'est pour assurer une transition en douceur: Clampett était promu vers la série prestigieuse et en couleurs des Merrie Melodies, et McCabe pour sa part était promu au poste de superviseur, comme on disait obstinément chez Leon Schlesinger... Cette situation de transition allait perdurer pour quelques cartoons.
Et donc, sinon, le film ne nous surprendra pas trop: il y est question du Mexique, un endroit qui inspire la verve caricaturiste de tout le monde, c'est à dire essentiellement de Clampett et de Mel Blanc qui s'en donne à coeur joie avec les accents et les idiotismes. Et bien sûr, le toréador timide du titre n'est autre qu'un vendeur de "tamales" aperçu un instant au début du film, le cochon Porky pig, aux prises cete fois avec un toro fortement dangereux...
On revient à une intrigue traditionnelle, et à un Porky Pig un peu plus maître de sa destinée, dans ce court métrage qui le voit partir à la pêche en compagnie d'un chat... Probable ancêtre de Sylvester, dans la mesure où il partage la maison avec un canari. Mais celui-ci se suicide avant la première moitié (Le fameux gag récurrent du "Now I've seen everything" a encore frappé!)...
Mais on ne se refait pas, et c'est essentiellement le chat, particulièrement enthousiaste à l'idée de manger du poisson, qui va être le personnage principal malgré tout, dans ses démêlés avec un poisson volant qui a la furieuse manie de se prendre pour la première version de Daffy Duck, aussi bien en voix qu'en comportement (Voir à ce sujet Porky's duck hunt, de Tex Avery, pour s'en convincre)...
Fantasia allait sortir en novembre, et ce film, nettement moins prestigieux, et surtout moins sérieux, a quitté le studio en octobre 1940... Clampett s'y livre avec une inconscience militante à une série d'anachronismes joyeux, en nous présentant une préhistoire taillée pour le cartoon, dans laquelle Porky Pig, pour une fois véritable héros de la chose, serait plus ou moins le roi de tout! Les dinosaures y côtoient donc les oiseaux et les cochons humanisés, pour le plus grand plaisir de tout un chacun.
Et donc, le cochon en question se livre à une chasse à l'ours, parce qu'il n'a plus rien à se mettre. Ca nous occasionne bien sûr une série de jeux de mots autour de bear skin/bare skin, soit peau d'ours par opposition à peau nue, et si on est effectivement en matière d'animation bien en dessous des prouesses de Disney, au moins le film est-il plus qu'intéressant dans sa version noir et blanc, qui se pare d'une atmosphère inquiétante...