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18 juin 2024 2 18 /06 /juin /2024 16:46

A Moscou, une équipe Américaine est venue s'intaller pour trois mois. Sur le tournage de leur film d'horreur de catégorie Z plus, nous faisons la connaissance de Billy Hughes (Marina Zudina), une accessoirisete et maquilleuse qui est muette. Après une journée de tournage saupoudrée d'incidents divers, elle est enfermée par mégarde dans le studio, et va être témoin d'une scène terrifiante. Surprenant ce qu'elle imagine être le tournage en douce d'une scène pornographique, elle voit le protagoniste masculin de la chose sortir un couteau (de sous un oreiller, je vous rassure) et poignarder pour de vrai son infortunée partenaire... Désormais, Billy, que bien sûr personne ne croit (quand ils arrivent à communiquer avec elle, ce qui n'est pas gagné) est l'unique témoin muet d'une sombre affaire de traffic de snuff movies...

Ce dernier terme désigne un genre de films dont on finirait volontiers par croire qu'il n'existe pas vraiment, mais qui a fait les beaux jours d'une série de films à suspense, liés au tabou ultime, celui de filmer la mort du protagoniste d'un film. De fait le film de Waller fait la part belle à une thématique liée au cinéma, depuis la première scène qui dans la plus pure tradition est un film dans le film... Qui va graduellement se révéler comme tel au spectateur, quand on constate que d'une part il y a beaucoup de monde pour assister au meurtre nocturne d'une victime innocente, et que si certains manifestent une indifférence polie, d'autre sont plus franchement rigolards! Ce thème du cinéma ne lâchera jamais l'intrigue, d'autant que l'héroïne est du métier. Les pirouettes qui seront liées au faux, à l'image menteuse, au montage, et aux accessoires de cinéma, seront nombreuses...

Mais le metteur en scène a aussi vu ses classiques, et il se plait à convoquer les inévitables situations à suspense, les mouvements de caméra et le montage les plus efficaces possibles. La musique aussi, assez "Hermanienne", accompagne le film à la perfection. Nous n'échapperons pas à une situation à la Rear Window, évidemment.

Bien sûr qu'il est impossible de prendre ce film au sérieux, mais le fait est qu'il se place dans un univers de complications dans la communication: non seulement Billy est elle-même muette, mais elle et ses collègues anglo-saxons sont coincés à Moscou, où peu de gens parlent leur langue... Ce qui ne favorise jamais l'échange, loin de là.

C'est d'autant plus ironique que le film est en fait une co-production internationale, réalisée à Moscou même (peu de temps après la гласность, "Glasnost" en français, et la fin de l'empire Soviétique (vous savez, l'ancêtre de la dictature actuelle) par une équipe anglo-saxonne et Allemande. Waller lui-même est Allemand... S'il pourrait sans souci être considéré comme un exemple flagrant de réussite d'une co-production Européenne, cet excellent thriller parfaitement réalisé et jamais dépourvu d'humour semble nous dire que le tournage n'a pas été de tout repos! 

Une dernière chose, au passage: Waller qui avait de la suite dans les idées, a tourné la première scène de son film en 1986, profitant d'une rencontre avec un immense acteur. Non seulement ce dernier a été intégré au montage, et en plus il joue un rôle crucial (le script du film ayant été "construit" autour de sa participation, mais en plus il a refusé tout paiement. Voyez le film pour découvrir son identité...

Ah, on me signale que selon toute vraisemblance, un public qui désormais appelle les acteurs "le mec qui joue dans..." et ne va pas voir des films tournés plus de six mois avant le temps présent, seront bien à la peine... Bon, tant pis pour eux.

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Published by François Massarelli - dans Suspense Boo!!
14 janvier 2024 7 14 /01 /janvier /2024 11:32

Topper? C'est un banquier (Roland young) marié à une héritière-bien-comme-il-faut (Billie Burke) qui aimerait tant que son mari soit un peu plus sophistiqué, et qui lui monitore tous les aspects de sa vie: par exemple, le dimanche, on mange de l'agneau... Bref, Topper, qui est raisonnable, avec un métier raisonnable, une vie raisonnable, et une épouse raisonnable, aimerait tant un peu de fantaisie...

Les Kerby, en revanche... George (Cary Grant) est un riche actionnaire de la banque Topper, et donc il se permet tout ce qu'il veut. Son épouse Marion (Constance Bennett) l'assiste allègrement dans une vie dissolue, un parcours de fêtards décidés à ç=tout tenter, tout le temps... Bref, un couple déraisonnable. Et pourtant...

Topper, clairement, a un faible plus que prononcé pour Marion, qui adore le faire tourner en bourrique. Alors quand George et Marion meurent dans un accident de la route (qu'ils ont bien cherché par leur inconséquence), ils ne peuvent que revenir hanter leur pauvre ami Topper.

C'est l'une des premières screwball comedies, contemporaine de l'ineffable Bringing up baby, et force est de constater que Cary Grant y est totalement à son aise, même si son rôle reste quand même limité. Disons qu'il y est à la lisière entre personnage principal et personnage secondaire: il est d'ailleurs crédité en deuxième position... C'est une production Hal Roach, car le producteur sentait bien avec le succès des longs métrages Laurel et Hardy que le marché des courts métrages, qui avait fait son studio et sur lequel il basait son modèle économioque, était en train de mourir. Donc Topper est une étape importante vers une tentation de respectabilité, d'où une durée assez longue, ce qui est très rare dans le studio Roach. Comme les autres films du studio à cette période, la distribution en a été assurée par la MGM...

C'est gentiment loufoque, ou loufoquement gentil, c'est selon; on voit bien qu'il esxiste un genre à part entière, la comédie de fantômes, dont ce film (avant le Fantôme à vendre de René Clair) serait en quelque sorte exemplaire: le sel y repose sur l'absurdité de la situation (Topper étant la dernière personne qu'on imagine avec une vie intérieure, le voir constamment dans l'embarras face à des fantômes invisibles est le principal ressort du film, en particulier quand celui qui assiste à la scène est Eugene Pallette) bien plus que sur une quelconque épouvante. Le film ne joue jamais la carte du fantastique pour faire peur, mais utilise à fond l'idée que le couple des Kerby, étant déjà passé de vie à trépas, on pouvait sans trop craindre la censure les représenter dans toute leur malice et leur amoralité... Et les Kerby vont incarner d'une certaine manière les mauvais instincts de Topper.

Quant à ce bon McLeod, il a toujours été un fidèle exécutant, adroit sinon doué, et était pluôt à l'aise dans la comédie. Quand comme c'est le cas ici, il disposait d'acteurs particulièrement doués, il faisait un excellent boulot. Mais soyons quand même clairs: LE film de la screwball comedy (un genre, après tout, auquel les courts muets de Roach ont énormément préparé), pour les années 30, c'est... Bringing up baby. Définitivement!

 

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Published by François Massarelli - dans Screwball comedy Boo!! Cary Grant Hal Roach
3 septembre 2023 7 03 /09 /septembre /2023 09:05

Eloise Turner (Thomasin McKenzie), une jeune femme qui a grandi sans ses parents en Cornouailles, chez sa grand-mère, ambitionne de devenir créatrice de mode, et a obtenu ne place dans une prestigieuse école Londonienne... Au-delà de l'angoisse de "la grande ville", elle a des angoisses, liées à une situation particulière: elle est "visitée" souvent par sa maman, qui s'est suicidée et se tient souvent avec elle dans les miroirs et autres réflections. Mais ce qu'elle ne sait pas c'est que dans la jungle du monde du XXIe siècle, même à l'époque de l'inclusion, une jeune femme foncièrement différente (elle crée elle-même ses vêtements, se tient à l'écart des fiestas, et a contrairement au reste de l'humanité d'authentiques goûts musicaux privés de la moindre tentation d'auto-tune: l'un de ses disques de chevet est The Kinks are The Village Green Preservation Society, quand même!!!) sera automatiquement victime de raillerie...

...ce qui se manifeste très vite. Elle quitte donc sa résidence universitaire et prend une petite chambre chez une dame, Mme Collins (Diana Rigg), et s'installe dans une ambiance plus propice à étudier. Sauf que dès la première nuit, elle est "transportée" en rêve dans les années 60, et y devient le double d'une mystérieuse jeune femme, qui souhaite devenir chanteuse, Sandie (Anya Taylor-Joy). Les "rêves/passages de l'autre côté" vont se multiplier, et révéler une image inquiétante des années 60, et très vite Eloîse se rend compte que sandie est en danger de tomber dans les mains d'un cercle de prostitution...

Une belle idée, finalement, celle de signifier la différence non seulement par un comportement décalé pour l'époque (le fait d'avoir une culture par exemple, ça ne court plus tellement les rues), mais aussi par un "don" surnaturel qui au départ est ambigu: simple déraillement psychologique, ou vrai don de médium? On maintient l'intérêt jusqu'à la première "visite" d'Eloïse dans les années 60. Autre bonne idée, celle de "signifier" les "passages" de l'autre côté, en utilisant miroirs et réflections... Et après...

Après, ça devient le grand n'importe quoi et le grand guignol. Le film ne tient aucune de ses promesses, le personnage fragile se perd dans ls clichés du genre fantastique/horreur, et le myétsère de pacotille qui sert d'enjeu sur le reste du film le paintient très articifiellement en vie... Tant pis. 

C'était le dernier film de Diana Rigg, donc entre elle et les Kinks, on a quand même deux points positifs pour rappeler les années 60, ce n'est déjà pas si mal.

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Published by François Massarelli - dans Boo!!
30 avril 2023 7 30 /04 /avril /2023 08:58

On reprend les choses là où on lesavait laissées avec A quiet place: la famille Abbott, du moins les quatre survivants, doivent faire face à l'abondance de sales bestioles venues pour les tuer, et même si le danger est toujours réel, ils ont accidentellement trouvé le moyen de tuer les monstres hypersensibles au son (d'une façon qui n'est pas sans rappeler... Mars Attacks!) grâce à Regan, l'aînée mal-entendante de la famille... Mais on fait aussi la connaissance d'Emmett, un voisin qui va les recueillir et les aider à propager le fait de pouvoir tuer les intrus.

La suite est le plus souvent une sale manie, un poison inutile, et de plus en plus à l'ère Netflix, une sorte d'anomalie narrative, propice à la réression. Pourquoi encore m'en prendre à Netflix? Parce que le cinéma a toujours reposé sur un morcellement de la vie, on SAIT, du moins normalement, qu'un film n'est qu'un fragment d'un arc, qu'un personnage qui arrive dans un film à un point A et nous quitte à un point Z ne nous est ptrésenté que dans la mesure où ces fragments de vie sont pertinents pour le film qui nous est montré. Mais avec les séries et leurs arcs narratifs étalés sur une multitude de saisons, sans parler des spin-offs, tout semble donner au spectateur l'ilusion qu'on ira vers chaque piste, et qu'on explorera chaque personnage. Comme s'il fallait nous montrer, par exemple, la vie du méchant incarné par James Mason dans North by northwest, dix ans avant sa rencontre avec Cary Grant... Ou comme s'il fallait, par exemple, suivre Johnny Gray (Buster Keaton) jusqu'à la fin de la guerre civile, et donc le voir subir l'humiliation de la défaite. Bref: le problème avec les suites, ou prequels, ou spin-offs de tout poil, c'est que, d'une part c'est prétendre que le spectateur ne peut pas remplir les blancs et les vides tout seul; d'autre part, c'est inutile. Même The Godfather Part II, jugé nécessaire par Coppola parce qu'il souhaitait explorer des éléments de l'histoire de Mario Puzo qu'il n'avait pu adapter, est foncièrement inutile à The Godfather. Qu'il ait été un meilleur film est presqu'un accident, et je dirais la même chose de tous les films de la saga Star wars sortis après le Star wars de 1977... 

C'est donc agaçant, quand un film vous a satisfait, de devoir ensuite se coltiner la suite. D'où mon appréhension agacée... Qui ne dure pas longtemps: même si on a un peu peur devant ce film qui commence par nous donner un contexte (le premier était structuré par un calendrier, et commençait au "jour 80" d'une situation qu'on découvrait au fur et à mesure, celui-ci remonte au "jour 1", et nous donne à voir deux éléments qui auront de l'utilité; d'une part, Emmett (Cillian Murphy), le voisin, qui faisait partie du cercle d'amis des Abbott, est présent; d'autre part, on nous montre l'univers d'une famile qui a déjà intégré la surdité de Regan, et qui va donc avoir un atout dans sa lutte contre des créatures maléfiques sensibles au son: une connaissance accrue du langage des signes. Sans compter sur le fait qu'il leur faut très peu de temps pour comprendre ce qui fait réagir les sales bestioles...

On ajoute donc à l'angoisse (superbement distillée) des débuts de solutions, on étend un peu l'univers des Abbott, et on fait la connaissance d'autres dangers. Et surtout on voit ici des enfants se prendre en mains, et potentiellement sauver le monde. Le suspense, la tension générée par la situation, l'utilisation magistrale de jump scares, la dette assumée envers Spielberg, le poids du regard dans la mise en scène... tout concourt à la réussite du film.

Maintenant peut-on aussi se contenter du premier film? Bien sûr. comme toute suite, aussi réussie soit-elle, ce film est inutile.

Comme tout film, d'ailleurs...

 

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Published by François Massarelli - dans Boo!!
28 avril 2023 5 28 /04 /avril /2023 18:56

Après l'apocalypse, dans une zone rurale des Etats-Unis, nous faisons la connaissance d'une famille: la mère, le père, et leurs trois enfants, tous nés avant. Il faut donc les éduquer à la nouvelle donne, désormais les humains sont traqués en plein air par des créatures impitoyables, qui ne voient rien mais ont l'ouïe très fine. Seule solution pour survivre et éviter une mort atroce, ne pas attirer l'attention, donc éviter le moindre bruit...

C'est plus que notable, à l'heure de la standardisation tous azimuts, par le doule biais du numérique à gogo, et des plateformes de streaming, un film d'angoisse ("d'épouvante"? "d'horreur"?) arrive et au lieu de reprendre ou de faire évoluer les codes, il propose quelque chose de radicalement différent, jouant justement sur le silence... La tension est très forte, générée par cette situation qu'on comprend très vite, dès la première séquence (magistrale), et qui nous explique tout en situation, par les gestes, les regards, les précautions, et un peu seulement par la communication, faite de gestes et de langage des signes pour l'essentiel...

Le terrain de jeu, finalement, n'est pas que l'Amérique rurale, c'est aussi la famille, dans ce film où la notion de survie est intimement liée à la nécessité aussi de protéger les autres. Chacun se réfugie dans une part de tâches, qui donnent du sens à chaque minute. Et de par la particularité physique de ce film presque sans parole, on entre sans effort dans la tension qu'il véhicule. Si je dois exprimer une réserve et une seule, je pense que je ferai comme d'habitude, en disant à quel point les monstres ici présents sont laids. ...et surtout ils ressemblent à tous ceux qu'on voit un peu partout, les crétaures excessives créées par la compagnie Weta de Peter Jackson, ou bien la bestiole de The host de Bong Joon-ho, ou encore celles de The Mist, de Frank Darabont...

En choisissant de réaliser un film d'horreur dans un cadre bucolique, au milieu d'un champ de céréales, et avec des gens qui devront tout faire pour ne rien dire ou ne pas faire du bruit, y compris lors d'un accouchement, Krasinski casse les codes, et réalise un tour de force qui en plus a le bon goût d'être plutôt court, et de se limiter à l'essentiel. C'est vraiment bien, et ça mérite d'être vu et revu... Mais fallait-il vraiment une suite? On verra. 

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Published by François Massarelli - dans Boo!!
26 avril 2023 3 26 /04 /avril /2023 17:16

Dans la famille Freeling, on vit dans une petite maison, qui fait partie d'un projet de lotissement ne demandant qu'à s'agrandir, porté justement par le patron de M. Freeling... Le père travaille donc dans l'immobilier de masse pendant que la mère est au foyer pour s'occuper de ses trois enfants: une adolescente, un jeune garçon, et la petite dernière, Carol-Anne. L'atmosphère est assez libre, et il y a toujours une télévision allumée... Ce qui attire la première crise de somnambulisme de la petite. Puis des événements étranges se produisent, et Carol Anne disparaît... dans la télévision. 

C'est l'un des films les plus emlématiques de Tobe Hooper, le réalisateur du célère Texas Chainsaw Massacre (Massacre à la tronçonneuse), et auteur de nombreux films à vocation horrifique, ce qui n'empêche pas le film de multiplier les moments de comédie. Par bien des côtés, l'aspect parodique du film est à prendre en compte, d'autant qu'il y a suffisamment d'indices pour y trouver une ironie cinglante vis-à-vis non seulement du conformisme à l'Américaine, de la télévision et de son omniprésence, mais aussi du genre lui-même. Une réputation de méta-film que certains décèlent également dans son film de slasher le plus célèbre!

Mais le film est pour toujours le théâtre d'un conflit d'auteurs peu banals, même si les choses se sont réglées après une série de soucis par voie de presse: c'est que le film a été produit par Steven Spielberg, mais l'auteur de Close encounters of the third kind ne s'est pas arrêté là... Il a aussi participé au script, qui est d'ailleurs basé sur une histoire de son cru. La presse s'est emprêssée de spéculer sur le fait, et le fait que le film soit beaucoup plus grand public que d'autres a poussé certains critiques à mettre en doute le rôle de Hooper dans la réalisation. Hooper s'en est plaint dans la presse, et Spielberg lui a écrit une lettre ouverte, rappelant le rôle de chacun: un producteur-auteur d'une part, un auteur-réalisateur d'autre part. Et Spielberg, s'il a constamment joué avec les épices du genre, n'a jamais réalisé de fiml d'horreur, se contentant de prendre le meilleur du genre pour l'injecter dans des thrillers plus classiques. On aurait plutôt l'impression, ici, d'un Tobe Hooper s'amusant à imiter le style et l'univers de Spielberg pour délayer les moments horrifiques dans son film. Mais une fois qu'on est dans l'horreur, les effets s'enchaînent et Hooper se plait à en rajouter... 

N'empêche, l'univers de Spielberg est bien là, à travers cette famille qui vit heureuse sans s'apercevoir de son impressionnante dysfonctionnalité, et les scènes s'enchaînent, qui nous permettent d'envisager un naufrage futur. Qu'il y ait un drame de maison possédée (cette manie qu'ont les promoteurs de construire sur d'anciens cimetières... Un gag, dans le dialogue, nous rappelle d'ailleurs The Shining), c'est sans doute plus un avat-goût qu'autre chose! Une autre piste est à avancer, toutefois: le film se situe en plein Reaganisme triomphant, incarné bien entendu par le promoteur véreux, et l'optimisme professionnel irresponsable du héros. Le début du film est notable, puisqu'on y entend l'indicatif d'arrêt des émissions (personne n'éteint jamais les postes de télévision dans le film!), qui est justement l'hymne national, le Star-Spangled Banner. Et pendant que son épouse roule des joints, M. Freeling lit une biographie du bien-aimé président! Le film en devient une peinture au vitriol des classes moyennes à l'accession de Reagan à la Maison Blanche.

Hooper ou Spielberg, le film reste une sympathique et légère incursion dans l'horreur, sous pavillon familial; un film extrêmement bien fait, qui participe à sa façon d'un recentrage du cinéma de genre au début des années 80, à l'écart aussi bien du conformisme d'un cinéma familial, et de l'enfer des vidéoclubs, où tant de films d'horreur finiront bientôt. A sa façon, c'est un classique, et c'est aussi l'une des premières productions de Spielberg pour lesquelles il n'aura pas été le réalisateur: comme chacun sait, il y en aura d'autres! Enfin, ce film d'horreur, avec de vrais bouts du diable dedans, a été distribué par la très comme il faut Metro-Goldwyn-Mayer. Il est probable que parmi les cadavres fumant qui s'agitent dans la dernière bobine, il y a ce bon Louis B. Mayer...

 

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Published by François Massarelli - dans Steven Spielberg Boo!!
16 avril 2023 7 16 /04 /avril /2023 12:01

La même année qui vit la sortie de Duel au cinéma (en Europe), le metteur en scène a été invité à réaliser un nouveau film de long métrage pour la télévision, inspiré d'un script de Robert Clouse: ce dernier n'est pas un inconnu des amateurs de films d'action, et le propos de ce mini-long métrage (73 minutes) était bien dans la ligne d'un cinéma de divertissement, qu'on en juge:

Une famille de New York, en villégiature en Pennsylvanie, aperçoit une belle maison, et l'épouse constate qu'elle est à vendre. Ils l'achètent, et commencent à y habiter avec leurs deux enfants, un garçon et une petite fille qui commence à marcher... L'épouse, Marjorie (Sandy Dennis), qui ne travaille pas reste à la maison pendant que Paul, le mari (Darren McGavin), réalisateur de films de publicité, se rend à New York tous les jours. Mais Marjorie sent une présence, et commence à écouter les voisins qui eux savet que la maison est la demeure d'un démon redoutable. Marjorie commence à se demander si elle ne serait pas possédée...

C'est assez étonnant que la télévision Américaine, dernier rempart dans les années 70 des conservatismes de tout poil, ait confié la réalisation d'un film d'épouvante au jeune réalisateur de Duel; il avait montré qu'il pouvait sur un budget très serré aller loin dans la démonstration émotionnelle, et la manipulation émotionnelle du spectateur... Pourtant, pendant le plus gros du film, Spielberg se retient, préférant effectivement distiller par toutes petites doses le poison du fantastique, gardant l'explosion de frissons pour la fin: c'est très efficace, et du point de vue de la production, qui souhaitait sur un petit budget avoir un film qui fait peur mais pas trop, situé dans le cadre sacro-saint de la famille, c'était une mission accomplie haut la main.

Mais il est vraiment très troublant, dans ce film bardé de références et de messages subliminaux tous liés à la vie de Steven Spielberg, d'y trouver des traces de ce que The Fabelmans met en lumière, cette relation brisée entre une mère au foyer qui perd pied, et le reste de sa famille. S'il y a bien un personnage que Spielberg charge (discours parfois rendu obscur par une évidente consommation d'alcool pourtant pas mentionnée dans le dialogue, gifles et colères soudaines, caprices même), c'est celui de la mère. Sinon, Spielberg est déjà en pleine possession de son art, et le montre tranquillement; il profite aussi avantageusement d'un script qui lui permet de citer Les diaboliques de Clouzot: réminiscence inconsciente, copie ou coïncidence? Je ne sais pas et peu importe, mais l'idée est très bonne, et fonctionn presque à la fois comme un fil rouge et un coup de théâtre... 

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Published by François Massarelli - dans Steven Spielberg Boo!!
2 avril 2023 7 02 /04 /avril /2023 09:00

Julie et sa mère ont réservé une semaine dans un petit hôtel du pays de Galles: la maman fête son anniversaire, et la fille, qui vit un passage troublé dans l'écriture d'une oeuvre qui ne veut pas sortir toute seule, lui a sélectionné un établissement dans lequel la digne dame a vécu durant sa jeunesse... Mais quand elles arrivent, tout ne se passe pas comme prévu: d'une part la seule employée présente dans l'hôtel est presque hostile, et assez peu coopérative. Ensuite on annonce que toutes les chambres sont prises, mais nous ne croiserons aucun client. Enfin, Julie, sa mère et leur chien vont surtout passer un séjour en tête-à-tête, et le caractère compliqué de la vieille dame rend les choses parfois ardues...

On sait, en entrant dans le film, que c'est un "film de fantôme"... C'est comme ça qu'il est vendu, et on y ressent un certain nombre de symptômes, assez rapidement, qui tendent à le confirmer: des visages diaphanes entr'aperçus aux fenêtres, des murmures, des bruits, et puis le contraste entre la solitude des protagonistes, et l'annonce qui leur est faite d'un hôtel bondé. 

Puis, un autre indice finit par prendre toute la place: Tilda Swinton joue les deux personnages, et bien sûr on pourrait prétendre que c'est la raison pour laquelle durant environ 75 des 90 minutes, on ne la verra jamais incarner les deux dans le même plan. On sait aussi qu'aujourd'hui, on aurait pu à moindre frais incruster 45 versions de l'actrice sur le même plan, sans aucun problème, et du reste à un moment, on a enfin un plan qui les inclut toutes deux, de part et d'autre d'une table. Mais le choix de procéder par champ (Tilda jeune)/contrechamp (Tilda âgée) permet d'associer le spectateur à cette interrogation: l'une de ces femmes serait-elle toute seule?

En fait l'interrogation ne dure pas longtemps, le comportement gêné de l'employée de l'hôtel, qui donc se retrouve face à une femme seule qui fait semblant de parler à une absente, nous renseigne assez vite... Alors peut-être est-ce ce qui fait que les spectateurs de cet étrange film partent de la salle en ricanant. Peut-être se sentent-ils lésés, car si c'est un film de fantôme, eh bien il se refuse à nous faire peur, préférant distiller un certain malaise pour raconter un deuil qui n'arrive pas à se faire, un bloquage du à une perte ingérable, et pour tout dire une incapacité à aller de l'avant et affronter la vérité de la finitude de la vie.

Ce qui en soi est un beau sujet, mais cela fait-il forcément un beau film? Disons poliment que ça fait un film intrigant, qui tient debout surtout parce que l'actrice qui l'incarne est tellement exeptionnelle qu'on a beau savoir qu'elle joue deux rôles, on l'oublie très vite. C'est le principal atout d'un film, autrement, assez austère, et qui ne fait pas beaucoup d'efforts pour nous retenir.

 

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Published by François Massarelli - dans Boo!!
20 février 2023 1 20 /02 /février /2023 23:15

Antonio Bay, Californie, un petit village de pêcheurs: un étrange brouillard envahit la côte par intermittences, et pour commencer, les trois marins du bateau de pêcheurs pris au piège de la brume sont assassinés. Un certain nombre de personnes vont graviter autour de l'affaire, et découvrir que le village, créé il y a cent ans exactement, a été le théâtre d'une horrible tragédie: afin d'éviter de propager la lèpre, six personnes atteintes de cette maladie ont été délibérément coulées par les fondateurs de la ville, cent années plus tôt. 

Le film est l'un des premiers de Carpenter, qui allait ensuite s'illustrer dans tous les genres du suspense et de la terreur. C'est aussi un modèle: en terme de montage, de découpage, d'économie de moyens, de narration et d'interprétation, excusez du peu! Pour conter son film, Carpenter pose parfaitement son exposition et ses personnages, et distille avec savoir-faire les informations. Il nous prévient sans filtre ("Six will die"), puis il ménage ses effets de terreur, s'amuse de nous créer de fausses peurs avant de nous en asséner de vraies, et fait vaguement semblant, sous le conte horrifique, de s'inquiéter des tourments indicibles de l'âme Américaine...

...Mais surtout, il le fait avec Jamie Lee Curtis, mais aussi avec sa maman, la divine Janet Leigh, dans un rôle de bourgeoise du comité de fêtes qui va devoir affronter la nouvelle de la disparition de son mari. Ce n'est peut-être pas le plus effrayant film de tous les temps, mais sous couvert de nous faire peur, il nous fournit un ingrédient essentiel: le fun.

 

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Published by François Massarelli - dans Boo!! John Carpenter
13 novembre 2022 7 13 /11 /novembre /2022 17:13

27 années après les événements du chapitre 1, les sept membres du "club des losers", les ados qui avaient triomphé du clown Pennywise, se sont éloignés de Derry, Maine, la ville où la plupart d'entre eux ont grandi, et ont souffert. Tous, sauf un... Et tous ont oublié ce qui s'était passé, leur amitié, leur serment, leurs aventures surnaturelles et leur triomphe... Sauf un: Mike est resté. Bill (James McAvoy) est devenu écrivain, et comme il travaille pour le cinéma il souffre; Beverly (Jessica Chastain) s'est mariée à un sale type avec des tendances aussi violentes que son père; Richie, le rigolo de la bande, fait du standup; Eddie, l'hypochondriaque, l'est toujours; sa mère est décédée, mais il s'est marié à une épouse qui la remplace avantageusement! Stanley aussi s'est marié, et Ben, le "new kid" du premier film, a perdu ses kilos et ses complexes...

Mais Pennywise, comme annoncé, puisqu'il était découvert dans le premier chapitre qu'il apparaissait tous les 27 ans, est de retour. Mike, qui veille à Derry, contacte ses copains. Tous vont venir, sauf Stanley qui décide de se trancher les veines...

Oui, hein: ça commence bien. Ca fait quelques années que Stephen King nous fait comprendre que grandir, c'est souvent assumer les frustrations du passé, voire les emmener avec soi dans le futur... Et le fait qu'il y ait un écrivain, qui plus est en conflit avec la production des adaptations de ses films (on reconnaîtra d'ailleurs Peter Bogdanovitch, dans son propre rôle, en metteur en scène qui explique à Bill que la fin de son roman est pourrie, donc on va la changer) nous renvoie à tant d'autres oeuvres de King où un auteur occupait le centre de l'intrigue, de The body à Billy Summers en passant par The Shining et Misery... King s'est d'ailleurs lui aussi laissé aller à une petite apparition-gag... Une façon d'assumer une part du film?

Pourtant, il n'y a sans doute pas tant de quoi pavoiser. Bien sûr, on apprécie de retrouver les personnages, et le fait que chacun des héros du film soit si proche d'un acteur à l'autre pour permettre une vraie identification... Et cette dynamique presque Spielbergienne qui faisait le sel du premier chapitre se retrouve elle aussi... Mais voilà, It est une saga d'horreur. Et ce que veulent les gens, c'est du frisson. ON en veut aussi, donc tout devrait aller pour le mieux... Mais non: je sais, le cinéma, maintenant, peut tout faire. Mais ce n'est pas une raison! Pour chaque fois où les créateurs d'éfféspécios se sont lâchés en en rajoutant des tonnes, et en pimentant de mille et un effet dégoûtant, on regrette. Les personnages sont formidables, mais on est agacés par le grand guignol, qui n'était pas aussi omniprésent dans le premier. Pourquoi, quand on adapte King, faut-il qu'on exagère? Les moments les plus forts du film restent ceux où la violence est réelle, comme ce préambule glaçant dans lequel un couple gay se fait passer à tabac par des salauds... 

Mais la leçon à l'amertume tenace de Stephen King passe quand même: bienvenue sur terre, vous êtes là pour que ça se passe mal... Et plus vous vieillirez, pire ce sera: les sept amis, au début du film, ne sont, mais alors pas du tout heureux... bref, comme d'habitude, derrière les paillettes de l'horreur, l'horreur de la vie.

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Published by François Massarelli - dans Boo!! Stephen King