
Ce film prend son temps, et commence de façon presque routinière. Le premier acte sert essentiellement à établir ce qu'on peut considérer comme l'ambiguïté matrimoniale, terreau de tant de films des studios Roach: Charley Chase et Katherine Grant sont mariés, ils ont tout pour être heureux, mais ils ne peuvent pas s'en empêcher, à la première occasion, ils se chamaillent. Dans ce prologue, justement, le prétexte d'une querelle arrive à point: la voiture est à changer, Monsieur suggère d'en acheter une bien meilleure, ce à quoi Madame rétorque: sans doute pour pouvoir conduire d'autres femmes...
Le deuxième acte montre Chase qui vend sa voiture, et en fait cela va créer une situation embarrassante pour la suite; il conseille à un acheteur irascible d'acheter précisément son véhicule, mais celui-ci se désagrège littéralement dans les deux minutes qui suivent l'achat. Le nouveau propriétaire (George Siegmann), c'est embêtant, est un tueur qui vient de sortir de prison...
Le troisième acte prend tout ce qui a été établi et part dans une nouvelle direction: le patron (William J. Kelly) de Charley demande à celui-ci, qui parade sa nouvelle voiture, de conduire sa petite amie (Symona Boniface). Il ajoute qu'il lui faut être discret, puisque sa maîtresse vient d'apprendre que son mari est sorti de prison (Devinez de qui il s'agit...). Et bien entendu, alors que Chase accompagne la dame tout en montrant les avantages de son véhicule, ils sont repérés par l'épouse légitime de notre héros qui en vient assez logiquement à la conclusion qui s'impose...
Tout est donc en place pour un quatrième acte dans lequel tout ce petit monde va se retrouver pour une salade de quiproquos assez réjouissants, qui vont culminer dans l'idée saugrenue (Et qui sera ensuite recyclée à plusieurs reprises dans l'univers de McCarey) d'une troupe de gens qui sont réunis au même endroit et qui pour des raisons différentes, ont tous l'idée de se déguiser exactement de la même façon, afin de préserver leur anonymat. Visuellement, c'est bien sûr extrêmement drôle...
Le "caretaker", c'est la personne qui gère un petit établissement au nord de la ville, où on peut se retrouver à l'abri des regards. Essentiellement c'est un "speakeasy" de luxe. Le personnage, très moustachu, est joué par James Parrott dans l'une de ses rarissimes apparitions dans un film de son grand frère. On voit aussi James Finlayson, en détective en mission. Il n'a pas de moustache, pour une fois... Enfin, car il faut bien parler des sujets qui fâchent, ce film extrêmement bien construit et très drôle, possède une lourde tache: un gag antisémite. Ce qui nous rappelle que le cinéma de ces années dorées, et en particulier les comédies, était friand de gags ethniques: Harold Lloyd, Buster Keaton en ont beaucoup usé. Chaplin a beau avoir coupé une scène douteuse dans Modern times (Une caricature d'usurier juif), elle est désormais visible sur les DVD, et Larry Semon ne faisait aucun film sans y inclure des gags douteux autour de son complice, l'acteur Afro-Américain Spencer Bell. Autres temps, autres moeurs... C'est vrai qu'ici c'est particulièrement bas, mais le film n'en est pas moins une belle preuve de la qualité exceptionnelle des films de Charley Chase et Leo McCarey.