Un petit film (deux bobines), mélange d'animation et d'ingénierie assez efficace, montre au spectateur les traces de la théorie de la relativité d'Einstein, et tente d'en expliquer les contours à partir d'exemples concrets, pris dans les technologies en vigueur en 1923.
Les Fleischer étaient des touche-à-tout, et non seulement bien sûr ils ont appliqué leur talent pour l'animation, avec les résultats que l'on sait, mais ils ont aussi tenté (san trop insister) l'aventure du court métrage burlesque. Ils ont aussi, comme en témoigne ce film, tenté une approche de la vulgarisation scientifique par le cinéma...
Disons que cette fois, ils n'ont sans doute pas été si inspirés que ça, puisqu'une partie de ce film est en fait une réappropriation par Dave Flesicher, de matériel tiré d'un film allemand, Die Grundlagen der Einstein-Relativitäts Theorie (également connu sous le titre de Einstein Film) réalisé par le specialiste de la vulgarisation scientifique, Hanns Walter Kornblum. Impossible de savoir, à l'heure actuelle, ce qui est importé de ce long métrage, ou s'il n'a été qu'une vague inspiration...
On n'attend pas forcément Dave Fleischer en réalisateur de comédies en "livre-action", lui qui si souvent porté haut, et dans des directions bien différentes de celles choisies aussi bien par Disney que Warner, l'étendard du cartoon...Mais voilà, avec ou sans son frère Max, Dave Fleischer faisait du cinéma, ce qui l'a amené à lancer longtemps avant que le succès de Betty Boop n'emporte tout sur son passage une série de comédies de slapstick, sous haute inspiration des films de Mack Sennett...
Dans ce film préservé par miracle (et parla grâce de Pathéscope, qui éditait des versions réduites en 9,5mm de films divers), on voit en effet que l'influence de la Keystone des premiers temps est très forte: l'intrigue tourne autour d'une troupe de chorus-girls qui sont dans le collimateur de la mère-la pudeur locale (Flora Finch)... Mais le fils de la dame en question en pince pour l'une des fillles de la troupe, ce qui va compliquer les choses. En prime de cette intrigue très peu originale, un bandit évadé et une troupe de policiers-pompiers vont semer un peu plus de désordre...
Honnêtement, c'est peu concluant: ce type d'histoire qui oppose une héroïne supposée sexy, à une vieille dame forcément mal fagotée, c'est du Mack Sennett en effet, mais pas de la meilleure eau... Mais il y a un aspect qui ne trompe pas, par contre: Fleischer demande beaucoup de discipline à ses comédiens, et en particulier il les fait réagir avec une rigueur exemplaire. Mais l'effet devient plus mécanique qu'autre chose. Ce qui marche dans l'animation n'est pas forcément fait pour êytre joué par des acteurs. Sinon, le film offre un rôle en or à Flora Finch, une actrice somme toute distinguée qui a aussi bien sur briller dans la comédie que dans des films plus traditionnels. Elle s'est illustrée chez Grffith, à la Vitagraph (aux côtés de John Bunny) et à fini sa carrière dans The women de Cukor...
Ce film rare (péservé grâce aux efforts de l'indispensable Ben Model) présente la première manière des frères Fleischer, qui seront à une période des concurrents sérieux à Disney, avant l'avènement des départements cartoon de la WB et de la MGM... Leur idée était de mêler le cartoon et la vraie vie dans des saynètes qui osaient repréesenter les concepteurs des films eux-même (soit Dave et Max Fleischer, respectivement réalisateur et animateur) en dialogue voire en lutte avec leurs créatures d'encre et de celluloïd, en particulier Koko le clown, justement héros de ce film...
Il y joue avec la liberté que lui procurent ses concepteurs, et crée à son tour une ravissante poupée mécanique pour danser avec lui... Mais ça dégénère bien vite.
On voit ici que la comparaison avec les oeuvres contemporaines de Disney (Alice in Cartoonland) tournerait bien vite à l'avantage des deux frères. Leur film est plus riche en invention, et possède déjà ce ton libre et quasi "adulte" qui ferait la réputation du studio à l'époque de Betty Boop...
Par bien des côtés, ce court métrage prolonge et complète le fameux Snow white des Frères Fleischer, avec Betty Boop, sans pour autant pouvoir rivaliser avec lui: Betty Boop y est presque une invitée, comme dans l'autre film, et son allure lui vaut d'être repérée et courtisée (pour rester poli, mais on entre dans un territoire toujours aussi libidineux) par le "vieil homme de la montagne" du titre, et bien sûr, il y a de la musique...
Mais justement: la musique, comme pour l'autre film, est confiée à Cab Calloway et ses hommes, grâce au fructueux contrat qui lie la Paramount et Irving Mills, le manager du musicien (et de Duke Ellington, qui apparaîtra à cette époque dans un film délirant de Mitchell Leisen): et cette fois, le film commence par nous montrer l'orchestre et le leader, pas un hommage léger quand on considère la condition raciale encore compliquée à l'époque! Sinon, le vieil homme de la montagne succède au personnage de Koko le clown blanc pour recevoir la voix du chanteur, qui se lance avec Betty Boop dans un hi-de-ho d'anthologie...
Alors que la méchante Reine se contemple dans le miroir (et on se demande bien pourquoi), et réclame constamment l'assurance de sa beauté, sa belle fille arrive, et le miroir change d'avis: c'est Betty Boop. La marâtre décide donc de se débarrasser d'elle...
C'est peut-être le chef d'oeuvre des productions Fleischer, toutes tendances et toutes séries confondues, et en pleine période pré-code, c'est un film furieusement en avance sur tous les autres studios d'animation! Le principal maître d'oeuvre n'est pas le metteur en scène Dave Fleischer, mais l'animateur Roland Crandall qui a quasiment assumé l'animation du film en solo.
On ne peut pas dire que l'intrigue soit autre chose qu'un prétexte, préfigurant les dérapages incontrôlables de Bob Clampett de quatre bonnes années. C'est extravagant en diable, et le contrat qui unissait la Paramount, les Flesicher et Cab Calloway nous gratifie d'une hallucinante version de St James Infirmary, durant laquelle Cab double Koko le clown, devenu par la grâce du miroir magique un fantomatique pantin... une vue susceptible de nous hanter longtemps.