Voici une comédie qui nous renseigne assez bien sur le grand n'importe quoi qui règne dans les films de l'écurie Mack Sennett: il en est l'un des modèles les plus typiques... Une intrigue qui part d'une idée loufoque qui ne peut pas tenir toute seule plus d'une demi-bobine, puis des ajouts et digressions toutes plus hasardeuses les unes que les autres, pour mener à, et finir sur une poursuite chaotique durant laquelle la destruction d'objets matériels, si possible de véhicules, tiendra lieu de principal ingrédient...
Pour commencer, donc, une veuve (Sunshine Hart) souhaite se marier avec la plus belle moustache du conté, elle ne peut donc que choisir Billy Bevan. Mais il y a de la concurrence: l'héritière officielle, la fille de la dame en question (Natalie Kingston), est convoitée par deux malfaisants. L'un d'eux est agent immobilier, et refourgue à Bevan et sa dame une maison préfabriquée sur la plage: cela occasionne moult gags, et c'est bien sûr l'une des digressions mentionnées plus haut, permettant entre autres de faire un détour par la case des Bathing beauties, ces naïades qui ont fait la réputation et la fortune de Mack Sennett!
Et puis une maison préfabriquée, c'est meilleur quand c'est monté sur roues, et accessoirement tiré par des chevaux. Donc dans cette histoire sans queue ni tête, toute l'humanité malade semble déterminée à se retrouver à la poursuite de cet étrange attelage, dont des gens en uniforme: non pas, cette fois-ci, des policiers, mais bien des pompiers... La routine, quoi.
A noter: le film est alternativement crédité à Eddie Cline ou Del Lord. Si Cline travaillait effectivement à Sennett et est effectivement l'un des auteurs du script et des gags, le style de la poursuite idiote en elle même, porte la marque de Del Lord.
Billy Foote (Billy Bevan) est professeur de danse... Il apprécie particulièrement son métier qui le met en contact avec des bataillons de jeunes femmes de belle allure... Son épouse, qui l'accompagne au piano, un peu moins! Il reçoit la visite d'une élève potentielle (Thelma Parr) qui lui demande de lui donner des leçons à domicile, mais elle l'avertit que son mari est très jaloux...
On voit où ca va aller, mais ce qui est remarquable, pour un film Sennett, c'est qu'une très large part du film se déroule, sans aucune poursuite et sans trop d'exagération, dans un salon où quatre hommes jouent au poker. L'un d'entre eux est Billy Foote, qui croit échapper au mari de la dame mentionné plus haut; un autre est le mari, le vrai: c'est Vernon Dent. La film, en plaçant de façon savante un certain nombre d'éléments, a permis à cette situation d'être claire et nette...
Et le film est une lente mais inexorable montée vers l'inévitable confrontation, qui repose pour l'un (Dent) sur la colère rentrée, et l'accumulation de frustration, ainsi pour l'autre (Bevan) que sur la réalisation progressive et troublante de la vérité de la situation. On se croirait presque chez Hal Roach, dans un Charley Chase!
Un avocat doit faire passer un héritage (un magasin de grand luxe) à deux personnes, à la condition express qu'ils ne soient mariés ni l'un ni l'autre... L'une, donc, Madeline Hurlock, vient de convoler en justes noces avec Kewpie Morgan; l'autre, un cocher (Billy Bevan), va se marier avec Sunshine Hart qui l'a séduit avec ses tartes. Quand il les contacte, ils font croire à l'avocat qu'ils ne sont pas mariés, et vont semer la pagaille dans le magasin...
C'est une bonne idée, et un scénario qui se tient drôlement bien. Tout en étant fidèle à la manière de Del Lord (gags physiques, plus c'est gros plus ça passe, utilisation savante et millimétrée d'animation cartoonesque), le film reste concentré sur l'intrigue et nous intéresse à c qui est bien plus qu'un prétexte simple. Le studio Sennett a toujours été un endroit dans lequel le contraste entre les classes sociales était, même de façon très caricaturale, présenté sous un jour formidablement positif... Ici, avec ces deux héritiers opposés (la jeune femme est plutôt bourgeoise, et Bevan, comme d'habitude, est un anachronique chevalier de la débrouille), c'est clair.
Le début de ce film est perdu: on y apprend que Billy Bevan, qui est chauffeu, est marié avec Madeline Hurlock, mais celle-ci ne peut trop le révéler, car elle est actrice de cinéma et son contat stipule qu'elle ne peut être mariée durant le tournage du film sur lequel elle travaille. Mais le mari a du mal à gérer la façon dont son épouse passe ses journées dans les bras d'autres... Et c'est d'autant plus compliqué qu'il est engagé pour conduire sur les tournages.
C'est l'un de ces nombreux films qui permettaient, chez Sennett, de voir l'envers du décor, et de parodier pour le plus grand bonheur du public, la façon dont les studios des années 20 fonctionnaient... Ils sont souvent formidables et formeraient presque un genre à eux seuls!
Et le titre s'explique par le fait que lors d'un tournage, un lion appartenant au studio s'infiltre sur les tournages et dans la vie des protagonistes. Il y a donc sinon des cascades, en tout cas beaucoup de gags assez typiquement proches du cartoon, ce qui est assez courant sur les films de Del Lord.
Une "lizzie" est une voiture bricolée, dans l'argot des années 20. C'est un terme qui a du accrocher l'oreille de Del Lord, qui a d'ailleurs tourné plusieurs films dans lesquels des véhicule improbables se poursuivent dans une frénésie de destruction...
Dont celui-ci. Billy Bevan est mécanicien dans un garage qui participe à une course rurale, dans les collines (autour de Los Angeles, donc pour ce qui est de la ruralité...). Et bien sûr, le final sera une poursuite de folie, dans laquelle les tacots s'emplâtrent les uns dans les autres, avec méthode et sans aucune retenue.
Le film commence d'ailleurs par un rêve durant lequel Bevan conduit...un lit.
C'est de toute évidence un cas d'école et ça ferait même froid dans le dos, si on y pensait un peu plus (des cascades sur les pentes des collines Californiennes, par exemple, on se dit que c'est quand même dangereux...), mais c'est grâce à ce genre de films, qu'aujourd'hui le studio de Mack Sennett est passé à la postérité comme un endroit de destruction systématique. Et le film, réduit pendant des années à une bobine, a désormais retrouvé son métrage intégral depuis la restauration de 2021.
Un agent de Wall Street (Andy Clyde) va marier sa fille (Natalie Kingston) à un malfaisant (Sid Smith)... Mais le concierge (Billy Bevan) veille au grain...
C'est très moyen, mais c'est au moins un film de deux bobines dans lequel on a une histoire... Ce qui n'était pas toujours le cas des films réalisés chez Sennett à l'époque, souvent assemblés vite fait mal fait. Bevan est clairement, au milieu d'une distribution solide, le principal atout et apporte sa bonhomie et sa simplicité (sans oublier sa moustache!) à l'affaire.
Et bien sûr, le film se termine par une poursuite totalement idiote! On ne pourrait sans doute pas s'en passer.
Ce film, réduit aujourd'hui à un fragment de quelques minutes, est une victime paradoxale de l'usure du temps. Il avait été selectionné pour fournir des éléments à une compilation de Robert Youngson, qui s'intéressait au burlesque Américain; la seule copie existante est donc ces extraits, bien que le film n'ait finalement pas été retenu dans le montage final du film de Youngson! quoi qu'il en soit, c'est en quelque sorte parce qu'il a été coupé, qu'il a été partiellement conservé!
Youngson l'avait coupé de manière à garder les gags et leur énergie (un des points forts de Del Lord, dont les films accumulent les gags et la destruction dans un maelström de loufoquerie)... s'il fallait faire un inventaire, voici ce qu'il faudrait en dire: un séducteur kleptomane (Harry Gribbon), une manucure armée (Charlotte Mineau), une voiture qui traine un homme jusqu'à une plage (le chauffeur est Billy Bevan sans moustache), une chaussire qui fume, des beautés qui se baignent, un faux officier de l'armée de l'air, un vrai pilote, un avion qui va souffrir, une baraque de hot-dogs qui était mal placée, une bagarre dans les airs, quelques loopings, et une fin abrupte.
Comment s'étonner que les surréalistes aient été si fascinés par les films des studios Sennett?
On le sait bien, les gags se recyclent comme un rien dans le Hollywood burlesque. Un gag apparu chez Billy West dans les années 10 peut très bien se retrouver ensuite aussi bien chez Charley Chase, Max Linder, voire les frères Marx. C'est d'ailleurs précisément le cas... Mais il ne s'agit en rien d'un plagiat, juste d'un vaste bien commun, dans lequel puisent à volonté des gagmen qui doivent fournir, et qui bien souvent passent d'ailleurs d'un studio à l'autre. Mais les décors? Eh bien, et les travaux formidables de l'historien John Youngson sont là pour le prouver, oui, les décors se recyclent d'un film à l'autre... Ce film en fait la preuve.
Etant un film de Del Lord, on ne va s'attarder ni sur la finesse, ni sur l'intrigue. Mais ce qui me frappe en le voyant (Outre une énième occasion pour Madeline Hurlock de faire la démonstration de sa sexytude), c'est que les deux personnages principaux, interprétés par Andy Clyde et Billy Bevan, sont des livreurs de glace (D'où le titre), qui doivent monter et descendre en permanence un escalier très impressionnant, situé à flanc de colline...
Aller d 'un point à un autre, ou pas, un bon vieux ressort de la comédie, sachant qu'en route il peut arriver bien des déboires. Et comme en 1926, pour traverser tout le continent Américain d'est en ouest, on fera bien sur confiance à la voiture, ce qui attend Billy Bevan, entre les mains du spécialiste de la cascade automobile sera du plus haut burlesque...
Pas tant que ça, remarquez: pour une fois, Lord a poussé Bevan a créer un personnage, celui d'un insupportable boute-en-train. Il est tellement irritant, que son patron le mute sans lui demander son avis... en Californie. Ce qui peut paraître étrange si c'est une punition, mais je crois qu'il nous fait laisser toute lecture logique au vestiaire avant d'aborder un film comme celui-ci. Sur la route (qui passe, bien sur, par monts, vaux, marais et canyons, sinon ce ne serait pas du plus haut intérêt...), lui et sa famille (Epouse et belle-mère sont fournies avec le tacot) rencontrent en permanence une autre famille: un couple, dont l'irascible élément mâle est Vernon Dent. Et il va souffrir, toute la route durant, du sens de l'humour inapproprié de Bevan...
La chute sera prévisible et inévitable car après tout rappelons que le héros du film n'a jamais mis les pieds dans la branche Hollywoodienne de son entreprise, il ne connait donc pas encore son patron...
C'est en une seule bobine que l'équipe de Del Lord a fait ce film, un cas d'école en matière de crétinisme total, en même temps qu'un film tellement bouffon qu'on ne peut que rendre les armes. L'intrigue est située dans une île des mers du Sud donc on peut dire qu'il y aura des gags liés à une vision noire de l'anthropologie... C'est exactement ce qui se passe: Andy Clyde et la troupe de Sennett y jouent une tribu locale. Clyde se contente d'un peu de maquillage, mais les autres possèdent... un T-shirt "noir" du plus étrange effet, et d'abominables perruques afro! Sur l'île, donc, la princesse (Madeline Hurlock, pas du tout maquillée, comprenne qui peut), a vu dans un magazine un portrait de Billy Bevan, et ne voudra pas d'autre homme. Vernon Dent, puni, a pour mission de le ramener, ce qu'il fait.
Une fois Bevan arrivé, le film devient un peu plus surréaliste encore, et une bonne partie voit l'acteur plonger pour effectuer une épreuve d'admission: plonger au milieu des requins. Et il craque même une allumette sous l'eau, c'est dire! La dernière partie du film est consacrée à une rencontre de l'acteur avec une sirène.
Et e pire, devant ce qui est un festival de n'importe quoi qui dure douze minutes, c'est qu'on a parfois le sentiment qu'il a pu être plus long, coupé soit par l'outrage des ans, soit par un monteur quand même un peu plus lucide que tout le reste de l'équipe!