/image%2F0994617%2F20240224%2Fob_96b854_des-femmes-disparaissent.jpeg)
Ce film commence par un avertissement en forme de profession de foi: certes ces situations scabreuses sont choquantes, mais ce serait se voiler la face que de ne pas vouloir les montrer dans toute leur horreur… Mouais…On connait la chanson, finalement, et nous ne sommes pas dupes : ce que Molinaro veut, dans ce film (son deuxième long métrage), c’est accomplir sans aucune entrave un film noir à la française, et pas (pas seulement?) de dénoncer la fameuse « traite des blanches »…
Pierre (Robert Hossein) est soucieux, il a bien vu que sa petite amie Béatrice (Estella Blain) est constamment sortie le soir, et sans lui qui plus est. Et alors qu’il l’espionne, dans une de ses sorties (elle se rend chez une couturière), il est agressé par deux patibulaires voyous. Il avait raison de s’inquiéter : sous prétexte de mettre de jeunes modèles en mal de carrière internationale en contact avec un groupe de notables chez lesquels elles s’encanaillent, la couturière (Jane Marken) tend un piège à de naïves jeunes femmes qui vont vite se retrouver embrigadées dans un système international de prostitution…
/image%2F0994617%2F20240224%2Fob_81b47d_s-l1600.jpg)
Pour commencer, cette époque est intéressante par la façon dont le film noir français dépassait les limites expressives du cinéma noir Américain, en étant souvent plus direct. En étant aussi, soyons juste, vraiment sous influence des grands auteurs (Lang, Siodmak, Hitchcock, Wilder): ici, on est quasiment au pays du mal absolu, incarné par deux méchants impressionnants… Jacques Dacqmine, en homme du monde, incarne un chef mafieux qui cache sous une apparence affable une vraie diablerie, et surtout Philippe Clay, en dandy impeccable et maniaque, froid et constamment tenté de commenter avec une impressionnante acuité la situation, est un chef d’œuvre de méchant qui donne à lui seul une justification en or pour voir le film. On pense à un lointain cousin de Lee Marvin dans le film de Lang, The big heat…
Robert Hossein est aussi très intéressant en candide à blouson noir, un héros qui pourrait bien être lui aussi, en marge de la loi. Il sait se battre, il fonce dans le tas, et la liste de ses ennuis sur la nuit de galère qui nous est contée dans le film, est particulièrement impressionnante… Bon, il faudra admettre qu’en général, le film pêche par la faiblesse de ses personnages féminins, qui en dépit de la présence d’une légende (Jane Marken) à contre-emploi, et de Magali Noël qui interprète une jeune femme très ambigue, les femmes présentes sont essentiellement de jeunes oies qui vont tomber allègrement dans tous les pièges qui leur seront tendus.
N’empêche, le film est excitant, superbement construit, cadré avec bonheur, monté avec savoir-faire, dur, totalement cohérent, et possède aussi l’ingrédient du plaisir coupable devant ces intrigues canailles d’un autre temps, et quand on pense qu’en plus la bande-son bénéficie de l’intervention de Lee Morgan (Trompette), Benny Golson (Sax ténor), Bobby Timmons (Piano), Jymie Merritt (Contrebasse) et art Blakey (Batterie), donc des jazz messengers, qui étaient de passage à Paris, on se réjouit encore plus.
/image%2F0994617%2F20240224%2Fob_db336c_5973-backdrop-scale-1280xauto.jpg)