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28 août 2024 3 28 /08 /août /2024 23:13

Passer de Little women (Les quatre filles du Dr March) à ce film... Il fallait le faire! S'il est des films qui inventent un genre à eux tout seul, celui-ci est un OFNI absolu: un film qui ne ressemble à aucun autre. On peut toujours espérer que la Warner s'abstienne de lancer une suite, mais... On ne se fait pas trop d'illusions...

Dans le monde de Barbie, créé par Mattel "afin de permettre aux jeunes filles humaines heureuses", vivent des Barbies et des Kens. Parmi eux, la Barbie stéréotypée (Margot Robbie) et Ken (Ryan Gosling) vivent une vie de poupées, sans acun changement, jusqu'à ce que...

Barbie pense, tout à coup, à la mort... Et le doute s'installe en elle. Des changements physiques interviennent, qui menacent son équilibre. Il lui est conseillé de se rendre dans le vrai monde. Ken, qui a sans le savoir des doutes existentiels lui aussi, est du voyage: dans le monde réel, Barbie rencontre celle qui a créé ses doutes, une employée de Mattel qui dessine des Barbies déjantées, mais Ken découvre que le monde réel est dominé par les hommes: cela va créer des complications phénoménales en rentrant à BarbieLand... devenu Kendom.

J'ai essayé de rendre compte de la façon la plus directe de ce que le film raconte, mais à la base c'est ça. Enveloppé de rose, plastiquement hallucinant et avec un tour de force: Greta Gerwig a réussi à jouer le jeu de l'esthétique Barbie au premier degré sans pour autant en faire trop. Le seul reproche de ce côté 'produit de consommation' du film, c'est la musique qui tente de se conformer au goût actuel: soit de la soupe répugnante. Mais sinon la façon dont l'intrigue évolue sans jamais se vautrer dans la facilité, et joue de toutes ses couches de sens, est bluffante.

Mais oui, le film est un jeu permanent sur le décalage inévitable entre l'existence plombante d'une entité qui stéréotype les genres jusqu'au stigmate, et la nécessaire remise en question des codes, des genres tels qu'on peut enfin les concevoir en 2024. La quête de Barbie est une quête féministe, dans laquelle deux femmes que tout oppose (elles sont une mère et sa fille) vont aider, enfin, les Barbies à y voir clair, pendant que les Kens s'allient pour être des hommes, c'est à dire non seulement inutile et vaguement décoratifs, mais en plus lourdingues! Le film est constamment surprenant, depuis la scène d'ouverture qui parodie 2001, en passant par la narration pince-sans-rire de l'immense Helen Mirren, jusqu'à ce gag discret mais hilarant, quand Margot Robbie/Barbie exprime des doutes sur sa beauté, en voix off: "note aux cinéastes de l'adaptation: ce serait embarrassant d'engager Margot Robbie"...

 

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Published by François Massarelli - dans Greta Gerwig Ryan Gosling
15 octobre 2023 7 15 /10 /octobre /2023 16:41

Dans les années 1860, la famille March, du nom du pasteur qui est le chef de famille comme on disait alors, la mère (Laura Dern) et les quatre filles doivent faire face à l'absence du père, aumonier militaire retenu sur le front de la Guerre Civile... Les quatre filles sont toutes bien différentes: la plus âgée, Meg (Emma Watson), ne jure que par un destin de femme mariée, selon son rang bien évidemment; Josephine, dite Jo (Saoirse Ronan), se destine à une carrière d'autrice; elle écrit et met en scène des spectacles qui mettent en valeur toutes ses soeurs, pour le bénéfice de sa famille et de leurs amis elle dit à qui veut l'entendre qu'elle ne se mariera jamais; Amy (Florence Pugh) hésite ntre l'influence de Meg, et la tentation du mariage, et l'influence de Jo (avec laquelle elle se chamaille constamment), elle a un intérêt pour la peinture; enfin, Beth (Eliza Scanlen), la plus fragile, est pianiste, de tempérament constant, et hélas bien malade. Au point qu'il faut souvent s'inquiéter pour elle... Deux jeunes hommes vont graviter autour de la famille et en particulier autour de Jo et Amy: un voisin, Theodore "Laurie" Laawrence (Timothée Chalamet), qui est attiré par Jo mais fait beaucoup d'effet sur sa jeune soeur, et plus tard dans le récit, Friedrich (Louis Garrel), un précepteur Européen que Jo rencontrera à New York...

"Plus tard dans le récit"... J'admets, j'ai triché: on rencontrera Friendrich avant les trois soeurs de Jo, car le récit est ancré en 1868, alors que Jo est devenue enseignante et qu'elle cherche à placer des nouvelles et un roman. Le film est raconté en flash-backs et flash-forwards, ce qui est peut-être une concession à la modernité (car il faut bien dire qu'en matière de nouveauté, cette histoire a du plomb dans l'aile!), mais permet surtout à Greta Gerwig, totalement et seule responsable de l'adaptation du roman de Louisa May Alcott, de mettre en valeur ce qu'elle y a perçu: une fratrie (vous avez remarqué? c'est ce mot qui est utilisé, que les enfants d'un ménage soient mixtes, tous mâles ou tous femelles, ou quelle que soit leur identité) de quatre jeunes femmes qui toutes vont illustrer les choix envisageables d'une femme ou d'une future femme du XIXe siècle... Y compris le décès pour l'une d'entre elles. La chronologie est bouleversée, afin de brouiller les pistes et de laisser à chaque destin un angle pour s'accomplir, sans pour autant avoir le même suspense morbide que le roman et ses adaptations (combien de lecteurs et lectrices, de spectateurs des 6 autres films, ont-ils été traumatisés par le décès de Beth?

En procédant de cette façon et en encadrant le récit de deux scènes qui sont un écho de la réalité (Louisa May Alcott a clairement basé son roman sur l'histoire de sa famille), lorsque Jo tente de placer sa première nouvelle et en voit acceptée la publication, et la fin qui voit le roman publié et Jo débattre du destin de son héroïne principale (c'est à dire d'elle-même), l'accent est mis précisément sur le livre lui-même. Celui-ci, entre le destin contrarié de la petite Beth, le mariage de Meg, qui ne sera ni riche ni de tout repos, et les amours contrariées d'Amy, représente le plus grand succès des "little women" de la famille March... Et l'ensemble des péripéties, entre les provocations de Jo, son désir de secouer ses soeurs (qui toutes l'adorent) et les tentations sentimentales, glisse un message tendrement féministe. ...A sa façon, bien sûr.

Le film se glisse donc plutôt bien dans la carrière atypique de cette réalisatrice (et actrice) qui, après avoir participé en scénariste, actrice et réalisatrice à des projets "indépendants" et souvent fauchés, voire expérimentaux, a obtenu un succès non négligeable et mérité avec Ladybird, oùelle dirigeait pour la première fois timothée Chalamet et Saoirse Ronan, pour un de ses derniers rôles d'adolescente. Un film personnel, une comédie aussi, mais qui recélait des aspects de plus grande gravité... Mais elle l'a voulue, son adaptation de ce classique, puisqu'elle avait commencé à y travailler dès avant Ladybird... Un parcours de femme et d'autrice dont la dernière étape est actuellement Barbie.

Une scène fait écho aussi à la principale différence entre Jo et Louisa May Alcott elle-même... L'éditeur se demande "pourquoi Jo ne se marie-t-elle pas?", ce à quoi la vraie Jo répond qu'elle ne l'a jamais souhaité et le dit constamment... Mais l'éditeur insiste... Une façon comme une autre pour Gerwig de replacer l'autrice du livre devant des "choix" qui lui auront sans doute été imposés avec insistance, lors de la publicationn de son roman, en 1868... Preuve aussi que décidément, pour l'égalité, il y avait du travail.

N'empêche, Louisa May Alcott a tenu bon: pas pour son personnage, qui a du se marier. Non, elle en revanche, a toujours fait l'impasse... Le film pour sa part se glisse donc plutôt bien dans la carrière atypique de cette réalisatrice (et actrice) qui, après avoir participé en scénariste, actrice et réalisatrice à des projets "indépendants" et souvent fauchés, voire expérimentaux, a obtenu un succès non négligeable et mérité avec Ladybird, oùelle dirigeait pour la première fois timothée Chalamet et Saoirse Ronan, pour un de ses derniers rôles d'adolescente. Un film personnel, une comédie aussi, mais qui recélait des aspects de plus grande gravité... Mais elle l'a voulue, son adaptation de ce classique, puisqu'elle avait commencé à y travailler dès avant Ladybird... Un parcours de femme et d'autrice dont la dernière étape est actuellement Barbie.

 

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Published by François Massarelli - dans Greta Gerwig Saoirse Ronan
29 décembre 2018 6 29 /12 /décembre /2018 11:43

2002: Elle s'appelle Christine, mais elle préfère qu'on l'appelle Lady Bird. Avec tout le culot de ses 17 ans, elle veut d'ailleurs l'imposer: à ses parents, ses amis (ils sont d'accords, du reste, puisqu'ils trouvent que c'est cool: je cite, bien sûr), à son lycée, bref à la terre entière; elle ne sait pas exactement ce qu'elle veut faire plus tard, mais elle y travaille, et pour l'instant elle aborde une nouvelle étape de sa vie: après le drame du 11 septembre, sa mère (Laurie Metcalf) a remis en cause son appartenance au lycée public de Sacramento où elle se rendait, elle ira désormais au lycée Catholique le plus huppé de la ville, en dépit de sérieux soucis économiques dans lesquels sont plongés ses parents.

C'est cette année de terminale, par une élève à peu près lambda, mais sans doute persuadée d'avoir une personnalité hors du commun, entre résultats encourageants, petites incivilités, amitiés d'abord avec quelques personnes en mal de sécurité, puis avec les lycéens les plus cool (sic) de l'univers, de dépucelage express en biture inattendue, que le film nous raconte... Ainsi qu'un conflit sourd, mais violent, le pire des conflits: celui entre une mère et une fille, qui s'aiment au-delà de tout raisonnable.

C'est drôle, finement observé, à une certaine distance, mais toujours au plus près du point de vue de Lady Bird. Aucun jugement, finalement, et aucune envie systématique d'adoucir le constat: à la fin du film, on est juste à une nouvelle étape. Mais la confrontation des acteurs, le naturel fabuleux, la tendresse et les non-dits qui sous-tendent le film, en font une réussite exceptionnelle, celle d'un film à l'univers très proche de ceux de Noah Baumbach, mais sans le vernis désagréable de mettre en avant tout ce qui gratte. C'est l'une des deux plus belle réussites de ce beau film, que d'avoir réussi à montrer tous les événements tels quels, mais sans jamais nous repousser. L'autre, c'est l'interprétation fabuleuse: Saoirse Ronan en tête, naturelle des pieds à la tête. Un peu plus âgée, mais pas tant que ça, que la jeune femme qu'elle interprète, elle est formidable. Et Greta Gerwig n'a peut-être pas choisi la date au hasard, elle qui a vécu sa dernière année de terminale à peu près au moment durant lequel le film se déroule...

 

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Published by François Massarelli - dans Greta Gerwig Comédie Saoirse Ronan