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  • : Allen John's attic
  • : Quelques articles et réflexions sur le cinéma, et sur d'autres choses lorsque le temps et l'envie le permettront...
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7 janvier 2016 4 07 /01 /janvier /2016 07:22
The battle of Midway (John Ford, 1942)

Réalisé en 16 mm et en Technicolor, ce film de 18 minutes est sans doute le plus fameux des documentaires de John Ford effectués dans le cadre de l'effort de guerre. C'est, en dépit de tout ce qu'on pourrai penser, un passage important dans sa filmographie. Il est toujours fascinant à regarder, une fois admis les circonstances particulières de sa réalisation, et son ton ouvertement patriotique, qui n'a rien de forcé, du reste, la plupart des participants ayant milité pour le faire. C'est un compte-rendu commenté de la bataille, à laquelle Ford a effectivement participé à l'événement. Il tournait des images sur un porte avion lorsque l'aviation Japonaise a attaqué. Les images sont spectaculaires, et uniques, captées caméra au poing: Ford n'a pas son pareil pour composer de façon rigoureuse dans le feu de l'action! Et le montage semble ne rien laisser au hasard... C'est de son univers qu'il est question, il a tout capté, aussi bien l'effort, la sueur, que la camaraderie des hommes, le sentiment d'injustice devant les constats amers (La destruction par les avions Japonais d'un hôpital de la Croix rouge par exemple), et le film est complété par des commentaires dits par Donald Crisp, Jane Darwell (Interprétant, je vous le donne en mille, la Mère Américaine), et Henry Fonda et sa voix juvénile. De la propagande? Définitivement, mais pas n'importe laquelle: de luxe...

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Published by François Massarelli - dans John Ford Guerre
29 novembre 2015 7 29 /11 /novembre /2015 13:58

On voit très vite ce qui cloche avec ce film: c'est Casablanca 2... Même type d'intrigue, même acteur principal, retour bien sûr de Max Steiner, et si James Wong Howe succède (Brillamment) à Arthur Edeson, Michael Curtiz est quant à lui y toujours de la parie, auréolé de son statut de metteur en scène systématique des oeuvres de propagande de la Warner: après Casablanca, il a réalisé coup sur coup l'étrange Mission to Moscow (Sur "notre ami", le gentil Staline...) et la grosse machine This is the army.

Au moins, avec ce film, on retourne au cycle des productions romantiques chères Curtiz, et bien sûr, on retourne à Humphrey Bogart, mais aussi Peter Lorre dans un rôle plus sympathique (Et plus consistant) que son ambigu Ugarte dans Casablanca. Sont également présents Sidney Greenstreet et Claude Rains, mais aussi en lieu et place d'Ingrid Bergman, une autre Européenne de luxe: Michèle Morgan. L'intrigue est souvent un rappel des thèmes de résistance et d'engagement personnel, mais aussi d'un idéal d'amour passé, comme Casablanca, le tout dans le contexte d'une France occupée.

1944: Un journaliste Américain fait un reportage en Grande-Bretagne, dans une base de la France libre, et dans sa conversation avec le commandant Freycinet (Rains), apprend l'épopée qu'ont vécu avec ce dernier un groupe d'évadés de Cayenne, qui ont rejoint la France Libre en apprenant la défaite, et ont eu ) se battre contre Vichy sur le bateau qui les ramenait en Europe... Le journaliste apprend en particulier la singulière histoire de Matrac (Bogart), le plus flamboyant de ces hommes, un ancien journaliste idéaliste, arrêté sous un prétexte pour son agitation politique dans la France de Daladier, et qui n'avait d'autre préoccupation que de retrouver Paula (Morgan), son épouse...

Casablanca transcendait tous ses menus défauts (Le fameux laisser-passer signé par De Gaulle, qui prouvait à quel point les Américains ne comprenaient pas grand chose à la politique Européenne des années de guerre...) par la puissance romantique de ses personnages, ses intrigues, et sa mise en scène fabuleuse. D'une certaine manière, ce film prend plus de risques encore, et du coup accumule les défauts: trop patriotique, trop répétitif (De même qu'on pourrait s'occuper à compter les "Fuck!" dans un film de Scorsese, on peut toujours passer du temps à compter ici les "vive la France" et les Marseillaises...).

Mais pour ce qui est du romantisme, on y a droit: entre les flash-backs vers la France d'avant (Qui nous renvoie d'ailleurs à un autre flash-back, mais dans Casablanca, celui consacré à "Paris") avec Bogart et Morgan, les aventures des bagnards qui s'évadent et doivent sacrifier l'un d'entre eux, les crapahutages dans la jungle avec de vrais marais dangereux, et le meilleur du film, son intrigue sur le bateau, avec l'incertitude la destination (Marseille et la collaboration, ou Londres et la résistance?), il faut avouer qu'on est servi.

Car si j'admets que ce film est souvent une redite, d'ailleurs parfaitement assumée, de Casablanca, avec le même discours sur la nécessité romantique de l'engagement, qui est de toute façon un thème de l'oeuvre entière de Michael Curtiz, il n'en est pas moins une belle démonstration du talent de toute une équipe pour nous faire accepter tut et n'importe quoi, une sorte de super-Curtiz aussi avec tous les ingrédients qui font sa supériorité: du mouvement (Bateaux, voitures, avions...), du baroque, de l'énorme, du souffle! Et rares sont les films Hollywoodiens qui reposent sur une structure incorporant trois flash-backs en poupées russes. Certes, ce n'est pas Le manuscrit trouvé à Saragosse, mais on est quand même dans une conversation qui débouche sur un retour en arrière dans lequel un retour en arrière occasionne un retour en arrière... Et le peu de gants pris avec la politique Française rappelle que bien des gens en France, comme le personnage joué par Greenstreet, appelaient clairement de leurs voeux une occupation qui allait leur permettre d'installer un fascisme à la Française, Pétain le premier. Pas une leçon d'histoire, non, mais une leçon de romantisme, ça oui.

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Published by François Massarelli - dans Michael Curtiz Guerre
22 novembre 2015 7 22 /11 /novembre /2015 11:40

"Attaque de drones", la formule est magique: il suffit de le dire dans un journal télévisé, et le tour est joué, on comprend instantanément sans avoir besoin d'entrer dans les détails, et le fait que les "frappes chirurgicales" (Autre formule très pratique) aient eu lieu sans la laideur d'un affrontement physique, donne une impression de sécurité qui ajoute à l'efficacité. Oui, mais qui opère une attaque de drone, et comment, à partir de quel poste, de quels ordres, dans quelles circonstances, quelles sont les marges de manoeuvre, et surtout les risques d'erreur? Le film tente de répondre à ces questions, et l'expression "Good Kill" est la conclusion tranquille apportée par le major Thomas Egan (Ethan Hawke) après une mission réussie.

Il y a un aspect documentaire dans ce film, la moindre des choses bien sur. On y voit que les militaires pilotant une attaque de drone sont deux plus un officier supérieur chargé de superviser l'opération; l'un des soldats localise les cibles et supervise le déplacement des drones, l'autre a la difficile part: il ou elle doit faire le travail de précision, cadrer la cible, viser, choisir le bon moment, obtenir l'autorisation et tirer. Thomas Egan, ancien pilote d'avion qui a du se reconvertir à cette nouvelle façon de faire la guerre, fait précisément ce travail, et en souffre. Pourtant, il y a des avantages certains, comme le fait de pouvoir rester sur le territoire Américain, et ne pas risquer de se faire descendre durant une mission, et de rentrer à la maison dans une boîte en bois. Egan rentre chez lui tous les soirs, sauf quand il a des missions de nuit. Mais la vie de famille n'est hélas plus ce qu'elle était, Thomas Egan ayant du mal à avaler le bilan de chaque mission: comme le dit un officier, quel que soit la façon qu'on ait de couvrir les faits par des mots, un pilote de drone n'en reste pas moins un tueur, et c'est ce qui ronge Egan... Alors quand d'une part son mariage finit de s'effriter à force de trop de silence et de vodka, et que d'autre part la CIA commandite une série d'attaques qui sortent de l'ordinaire et ressemblent encore plus à des assassinats, il souffre encore plus et remet tout en question...

Le lieu ou se passe l'essentiel de l'action est une base, dans le Nevada, à quelques encablures de Las Vegas. Les soldats se rendent donc le matin à a base et leur mission est effectuée dans des petits containers aménagés, toute la journée. Les éléments de langage ne ma naquent pas mais on constate que l'essentiel des conversations des hommes et des femmes sert essentiellement à justifier leur travail, ou sa moralité (Soit "Si on ne les tue pas, il vont nous attaquer", soit "au moins je vois mon épouse et mes enfants"). Mais comme le dit un protagoniste à un moment, la plupart des experts qui pilotent les drones sont recrutés à partir de leurs capacités à jouer à des jeux vidéo. On en revient donc à une situation dans laquelle tout repose sur la capacité à faire totalement abstraction de l'humanité et de la réalité des victimes. Ce qui différencie bien sur Egan de ces jeunes loups, c'est le fat d'avoir au moins connu la réalité physique des missions de combat. Ses scrupules ne sont pas d'ordre pacifiste, il ne critique pas la validité de la guerre ou des engagements de l'armée, il en valide la moralité, et souffre tot simplement d'avoir du sang sur les mains.

Et l'essentiel du film montre que même avec la technologie la plus perfectionnée, l'homme tue quand même à tort et à travers, et que les morts innocentes font toujours partie intégrante du décor. Et plus la chaîne de commandement est longue, plus les doutes quant à la moralité de l'action deviennent importants: lors de l'épisode du film consacré à la façon dont la CIA s'impose aux experts de la base pour ordonner des attaques toujours plus douteuses, des enfants, des médecins arrivés sur les lieux d'un bombardement, des passants sont abattus à tout hasard, mais les soldats obéissent à un officier supérieur, qui obéit à un agent de la CIA, qui obéit à ses supérieurs, qui obéissent à... à qui? Le metteur en scène choisit de cadrer aussi souvent que possible les Américains vaquant à leurs occupations, dans leurs villes et leurs banlieues, d'en haut: point de vue de Dieu, ou point de vue de pilote de drones?

Derrière le questionnement de la morale, qui aboutit prudemment à une conclusion ambiguë, mais rigoureuse et largement justifiée, le film en profite pour poursuivre les thèmes de prédilection de Niccol: comme dans ses films de science-fiction "légère" (Gattaca, SimOne et In Time, sans oublier son scénario pour The Truman Show de Peter Weir), il fait reposer son intrigue sur un fait technologique parfaitement clair, cette fois la capacité à frapper à distance sans aucun engagement humain de la part de l'attaquant, et donne parfois l'impression d'assister à un film d'anticipation. Pourtant tout y est rigoureusement authentique... Le réalisateur-scénariste a su poser les bonnes questions, et son film est hautement moral, sans jamais sombrer comme peut le faire par exemple American Sniper de Clint Eastwood dans la moindre tentation patriotique. La réflexion de Niccol porte ici sur l'humanité, non pas sur l'Américain, ou la nation Américaine. Ce n'en est que plus effrayant...

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Published by François Massarelli - dans Andrew Niccol Guerre
12 septembre 2015 6 12 /09 /septembre /2015 18:07

Dans son roman Hearts of darkness, Joseph Conrad imaginait le périple d'un homme parti en chercher un autre, et qui en remontant le fleuve Africain au bout duquel il sait qu'il trouvera M. Kurtz, va découvrir l'horreur de la perte de l'humanité, et mettre sa propre santé mentale en danger de succomber à son tour à la cruauté et à la barbarie. Le livre, paru en 1899, sacrifie bien sûr à l'inévitable racisme ambiant, en décrivant la perte d'humanité de Kurtz comme la contagion d'un lieu barbare, dans lequel vivent des hommes qui pour l'occidental de cette fin de siècle n'a rien d'humain, mais le message, lui, est fascinant, et résonne donc de façon superbe dans le film sur le Vietnam de Francis Ford Coppola. Et à ce sujet, enfonçons le clou, le film n'est ni un pamphlet anti-guerre du Vietnam, ni bien sûr une déclaration d'amour à l'une des plus grosses conneries jamais tentées par les gouvernements Américains successifs (Le film le rappelle, du reste, car comme le dit un protagoniste, si l'intrigue est située après 1968, la source des conflits est à trouver dans les tripatouillages effectués en Indochine sous Truman, lorsque les Américains ont encouragé la création du Viet-Minh)...

Non, si il ne faut pas croire Francis Ford Coppola, spécialiste des formules publicitaires, quand il dit 'Mon film c'est le Vietnam', ce qui ne veut rien dire, il faut rappeler que la genèse du projet, qui était en pleine guerre déjà prévu pour être une adaptation du roman de Conrad, prévoyait une collaboration entre John Milius au scénario, George Lucas à la réalisation et Coppola à la production! Les trois mousquetaires, qui avaient tous échappé à la conscription, voulaient même tourner leur film en plein conflits! Mais au-delà de la présence oecuménique de Coppola, grand showman, Lucas apportait un point de vue sinon gauchiste, en tout cas réfractaire à la guerre et plutôt progressiste, alors que Milius était (Et est toujours) un homme qui se situe très à droite, et leurs opinions respectives sont encore bien présentes dans le film tel qu'il est aujourd'hui...

Avec le capitaine Willard, parti s'enfoncer sur un fleuve en pleine jungle Vietnamienne, pour récupérer (Ou éliminer) le colonel Kurtz, devenu un fou dangereux à cause de cette guerre, le propos se clarifie et permet d'incorporer dans le film une vraie réflexion qui dépasse le simple champ du 'pour' ou 'contre' le conflit, qui n'en finissait pas de gangrener la politique Américaine de la fin des années 60 à la fin de la guerre. on est ici, à suivre le point de vue d'un homme dur, endurci par tous ses échecs et doté d'une mission quasi-suicide, croisant toute l'absurdité des conflits, mais aussi de la survie au jour le jour dans un quotidien sans aucune constante (On y croise des bunnies de Playboy, amenées à grands frais des USA, mais qui se prostituent contre de l'essence afin de pouvoir rentrer chez elles, des Français qui tentent de maintenir leur niveau de vie colonial en rejetant la responsabilité des conflits sur la terre entière, des Vietnamiens aguerris, capables de faire des attentats suicides au milieu d'une attaque de cavalerie aéroportée particulièrement musclée, un colonel fou furieux qui ne bronche pas lorsqu'un obus explose à deux mètres de lui et qui bien sûr charge avec ses hélicoptères au son de Wagner...), et enfin de la façon dont la sauvagerie s'insère, aidée bien sur par la proximité des conflits, par la jungle mais aussi par les drogues qui bouffent le cerveau. Et Willard et 'ses' hommes, le capitaine du bateau "Chief", le cuisinier, l'ado et le surfeur constamment en trip, vont en remontant le fleuve, remonter le temps, croisant les Français coincés dans les années 50 avant d'arriver à Kurtz et sa folie antédiluvienne.

Je pense que si les techniciens et acteur qui ont accompagné Coppola aux Philippines seraient peut-être un peu dur avec moi sur ce sujet, il n'empêche que la décision du producteur de reprendre le film et de le diriger seul était la bonne, car il fallait à un tel film la démesure, le sens quasi-opératique, et le sens génial de l'improvisation dont Coppola dispose à la sortie de ses deux Parrains. Il fallait aussi une vision, qui puisse faire corps avec celle de Willard, et à ce titre, la relation entre Coppola et Sheen est l'un des nombreux facteurs de réussite de ce chef d'oeuvre, que je continue à préférer en version longue car à mon sens, la longueur que d'aucuns jugent excessive rend justice à la folie humaine qui nous est décrite, avec ses nombreuses digressions, qu'elles soient cocasses, douloureuses, ou... ennuyeuses. La scène de la plantation, marquée en particulier par les abominables accents des acteurs, donne en particulier bien le ton. Elle est irritante, mais elle propose à la fois le repos du guerrier, et peut-être le fond du problème, en montrant quasiment les fantômes des coloniaux, qui ont cru devoir s'approprier une terre, et qui vont mourir de la défendre sans véritable raison. Et le film, du haut de ses 3 heures et 16 minutes (Si on omet le générique car le film commence et se termine, selon le voeu de Coppola, sans que jamais il ne soit fait allusion à son titre ou à ceux qui l'ont réalisé...), sans vraie fin et sans vrai début (Avec dès la première minute la chanson des Doors, qui nous assurent que "This is the end"...) ressemble bien à une chef d'oeuvre: démesuré, et si délicieusement imparfait par son inachèvement, ce qui est dans le monde de froideur et d'efficacité technocratique qui est le nôtre un gage de pur génie.

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Published by François Massarelli - dans Francis Coppola Guerre