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18 avril 2012 3 18 /04 /avril /2012 17:10

Prévu donc pour être le dernier muet de Lloyd, Welcome danger est à la place devenu son premier parlant... Le film, très long, avec 113 minutes, est une curiosité, pas éloignée de nombreux films de 1929, qui accusent visiblement le fait d'être des raccomodages de dernière minute: on sait que Lloyd avait fini le film au moment ou la décision a été prise de la sonoriser, et par moment le bricolage se voit. Sinon, bien sur, la durée exceptionnelle tient à l'arrivée du son, et à l'intention de donner du dialogue aux personnages, ce qui on va le voir n'était pas une très bonne idée... Mais on remarque aussi que dès le départ, le film se voulait une sorte d'antholgie Lloydienne, à la fois bucolique et citadine, une comédie de caractère comme d'habitude, matinée de moments de mystère et d'enquête. Voici donc un retour sur cet étrange film...

Harold Bledsoe est un botaniste excentrique, qui se rend à san Francisco suite au décès de son père. Ce qu'il ne sait pas, c'est qu'on va lui confier la direction de la police à laquelle le vieux Bledsoe s'est illustré des années durant, très respecté de ses hommes. En chemin, il rencontre une jeune femme (La mutine Barbara Kent) dont évidemment il tombe amoureux. tout ce petit monde, à san Francisco, sera aux prises avec l'inquiétant Dragon de Chinatown, un chef mafieux dont l'identité reste secrète, en dépit du travail de longue haleine du vieu ledsoe pour le démasquer...Le benêt réussira-t-il à relever le défi?

Bledsoe, c'est un condensé de plusieurs personnages de Lloyd, des nâïfs et des distraits, mais aussi certains parmi les plus durs: on constate qu'il a une faculté d'adaptation assez importante. Mais il a aussi une imperméabilité à l'ironie méchante des autres, qui ne voient en lui qu'un nigaud... Ce qu'il est. Flanqué de Noah young en fidèle agent faireè-valoir, il va pourtant résoudre l'énigme... le film aurait pu être un bon Lloyd, qui louche peut-être un peu du coté de The cameraman de Keaton avec ses séquences situées à Chinatown, mais qui se traine décidément en longueur... L'ajout de dialogues rend le tout deux fois plus long, tout simplement... Et la comédie physique, ici souvent mise à contribution, n'avait pas besoin de ces interjections censées rajouter du réalisme, et qui fatiguent. Mais le film ayant été largement tourné avant d'être parlant, on a au moins la chance d'avoir ici de nombreuses scènes, synchronisées ou non (et le travail est dégoutant à ce niveau, bien sur), dans lesquelles le visuel prime, c'est une consolation. Parmi les meilleures scènes, la rencontre avec Barbara Kent est pleine de tendresse et renvoie un peu à Girl Shy. Mais Roland Lacourbe cite les aventures de Noah Young et Lloyd dans Chinatown, qu'il estime être le meilleur du film, je peine à le suivre: cette séquence de 25 minutes épuise vite son intérêt.. Pourtant, une scène géniale y figure, durant laquelle Young et Lloyd se retrouvent dans le noir, plusieurs minutes... ultime pied de nez au parlant? Sans doute pas, hélas.

 

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Comédie Pre-code
3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 18:33

Après un Kid brother aussi gentiment vieillot que délectable, Lloyd fait un demi-tour brutal, et accomplit une intéresante synthèse de ses films citadins, avec Speedy, un film dont le titre renvoie, déja, à The freshman, dont le héros s'était auto-proclamé "Speedy", en déférence à un personnage de son film favori. Le coté rural et le récit d'initiation mis de coté, Harold Swift est un homme établi, dans la mesure ou il est heureux de vivre et confiant: en effet, il change de boulot comme de chemise, une occasion pour le comédien de nous montrer un homme des années 20, tour à tour "soda jerk" ou chauffeur de taxi; les seuls aspects permanents de sa vie son son amour du base-ball, et sa petite amie, dont le grand-père "Pop" Dillon est propriétaire d'une roulotte qui parcourt la ville avec un cheval. Un grand groupe de transports en commun voudrait s'approprier toute la ville, et ne vont reculer devant rien, mais 'Speedy' va aider Dillon...

New York, vu par cet indécrottable Californien qu'était Harold Lloyd, c'est beaucoup de mouvement, et un hommage à la vie citadine en ces optimistes années 20. Comme Keaton la même année qui tourne The cameraman en contrebande, Lloyd installe ses caméras en des endroits emblématiques, et obtient des images superbes, en appelant en prime à la rescousse le héros du baseball Babe Ruth. Son Speedy renvoie à l'optimisme entreprenant de ses personnages, mais n'est pas encore établi, contrairement par example à son héros de Hot water; il rêve, en compagnie de sa fiancée, jouée par la nouvelle venue Ann Christy (Qu'on ne reverra pas chez Lloyd, du reste), d'un foyer dans une très jolie scène, mais son personnage semble avoir mis de côté toute naïveté; il est immature, mais de façon militante, et ce film de 85 minutes passe très vite. Pour son dernier film muet, Lloyd n'a pas démérité, et on appréciera la bataille de david (Le père Dillon et sa charrette) contre Goliath (Le conglomérat prèt à tout), dans lequel Speedy va bien sur jouer un rôle crucial... La poursuite furieuse renvoie à Girl shy et son final délirant. Par ailleurs, il se paie le luxe d'une virée à Coney Island, comme les héros de ce chef d'oeuvre qu'est Lonesome, de Paul Fejos, la même année.

 

Incidemment, ce ne devait pas être le dernier muet de Lloyd. C'est en 1929, après avoir quasiment fini son film suivant, Welcome danger que Lloyd dit avoir entendu les rires du public qui provenait d'un cinéma ou était projeté un film parlant. Sitôt rentré au studio, sa décision était prise: Welcome danger serait un film parlant, et... il a donc été refait dans cette optique. La fin d'un monde...

Speedy (Ted Wilde, 1928)
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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1928 Criterion **
27 février 2012 1 27 /02 /février /2012 09:06

http://3.bp.blogspot.com/_zAoyoHwC5IQ/S1Hz4JAvoBI/AAAAAAAAH8Q/5aaJLwKC65k/s400/Kid+Brother+(1927)+7.jpgEntre deux films de la veine citadine et satirique de Lloyd (For heaven's sake en 1926 et Speedy en 1928), plus en phase avec le cinéma de l'époque, l'artiste s'est malgré tout repenché sur le monde de Grandma's boy, ajoutant un nouveau chapitre tardif à cette magnifique tendance du cinéma Américain à faire de la parabole rurale... Et la référence à Grandma's boy s'impose d'autant plus que le film en est presqu'un remake, en plus lyrique et plus long. Mais le film a aussi été pour Lloyd l'occasion d'une bataille personnelle, puisque pour la première fois, il lui a fallu changer de réalisateur en cours de route. Avec le contrôle de sa star, la petite histoire du film n'a pas trop filtré, mais au moment de donner un successeur à For heaven's sake, Sam Taylor n'a pas repris sa place de réalisateur: c'est à Lewis Milestone que revient sans doute le crédit de l'essentiel de la direction; mais un contrat avec Hughes rendait sa participation problématique (De même a-t-il été débarqué de Tempest en 1928, au profit de...Sam Taylor, qui a signé le film!). On se doute que Lloyd a comme d'habitude mouillé sa chemise, et participé pour une large portion, mais c'est à Ted Wilde que revient le crédit, partagé par l'obscur J. A. Howe, réalisateur de comédies courtes chez Christie. Ajoutons à ces multiples créateurs le nom de Gaylord Lloyd, crédité comme assistant réalisateur, ce qu'il allait être ensuite sur quatre autres films, et on a une idée de la pagaille...

 

A Hickoryville, petite bourgade du bord de mer, tout va bien: le shérif Jim Hickory (Walter James) et ses deux grands fils (Leo Willis, Olin Francis) veillent au grain. Ils envisagent de faire construire un barrage pour la petite ville, avec l'appui et le respect de la population. Le troisième des fils Hickory, en revanche, est un grand benêt que personne ne respecte, surtout pas ses frères. Son père l'aime bien, mais ne lui fait pas confiance. Et donc, fatalement, dès qu'il est seul, Harold essaie de"jouer" à être son père, dont il aimerait tant mériter la confiance. C'est dans ces conditions que débarque en ville la roulotte d'un "medicine show": une jeune femme, Mary Powers (Jobyna Ralston),  a repris les affaires de son père, plus ou moins sous la pression de "Flash" Farrell (Eddie Boland) et de l'"homme fort" du spectacle, Sandoni (Constantine Romanoff). Ils réussissent à profiter de la naïveté d'Harold pour lui extorquer une autorisation de faire leur boniment à Hickoryville, et d'autre part Harold rencontre Mary dans de dramatiques conditions puisque celle-ci manque d'être violée par Sandoni... Mais s'est-elle choisi le bon chevalier pour la secourir?

 

http://www.silentfilmstillarchive.com/stills/kid_brother063.jpgUn monde rural sans age, des décors absolument superbes, et une façon unique de tirer parti de l'environnement, le film est une immersion complète, comme l'étaient ces autres films que Lloyd a pris comme modèle; on pense bien sur à Tol'able David (Henry King, 1921), aux comédies de Griffith. Mais si la référence est liée à l'histoire du film "sérieux", Lloyd n'a pas négligé les gags, mais a comme d'habitude su parfaitement les intégrer à la trame dramatique, et surtout au développement des personnages. Comme dans les autres films, l'enjeu est ici pour Harold de prouver sa valeur en réussissant à trouver en lui le courage et la force de se mettre en avant. Au contact de Mary, il va réussir, comme le montre cette admirable scène de rencontre entre les deux amoureux, qui se termine sur une ascension: Lloyd la voit s'éloigner, et escalade un arbre de branche en branche pour qu'elle ne disparaisse pas de son champ de vision... Une des scènes les plus drôles voit Mary invitée à rester chez les hickory après la destruction de sa roulotte. Mais les frères Hickory, en chemise de nuit, doivent se cacher par pudeur. Ensuite, une voisine vient proposer l'asile à Mary pour la nuit (Trop d'hommes chez les Hickory!!), ce qu'Harold ne révèle pas à ses frères, et il se fait ensuite passer pour elle afin de profiter de la situation en se faisant dorloter... Mais le clou du film, dans ses deux dernières http://wondersinthedark.files.wordpress.com/2010/02/kid-brother-3.jpgbobines, voit Harold se déchaîner pour sauver aussi bien son père que la jeune femme en résolvant le mystère d'un vol qui risque d'entraîner l'arrestation de son père. Harold se bat comme un diable contre l'impressionnant Sandoni, sur un bateau échoué...

Dernier film de Lloyd interprété par la lumineuse Jobyna Ralston, The kid brother était bien parti pour être sans doute le préféré de son auteur... Mais le manque de succès d'un film qui était sans doute très démodé en a décidé autrement. et The kid brother a été occulté par Lloyd durant des années, jusqu'à ce qu'un Kevin Brownlow admiratif persuade les ayant droit de céder le film pour en diffuser une restauration, accompagnée d'une partition splendide de Carl Davis. C'est bien le moins qu'on devait à ce film tendre, témoin du savoir-faire impressionnant d'un artiste de génie. Pour ma part, j'en ai fait mon Lloyd préféré depuis longtemps...

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1927 Criterion **
23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 09:35

Harold Lloyd a lui-même construit son mausolée, un peu comme Chaplin, mais en plus radical; Longtemps après la gloire, de certains films, il a montré tout ou presque; d'autres se sont vus réduits à des extraits. D'autres enfin ont disparu... littéralement. Malgré un effort pour acquérir, puis conserver les courts métrages de ses débuts, peu ont survécu. Et ceux qui sont toujours là sont rarement montrés.

 

Luke joins the navy (1916, Hal Roach)

Luke's movie muddle (1916, Hal Roach)

http://4.bp.blogspot.com/-HWeiznTTZfo/TgNC73IX_tI/AAAAAAAACAk/81Dk-mVDYvY/s1600/hl5.jpgAvant tout, Lloyd était un acteur. C'est donc en tant qu'acteur qu'il a cherché à inventer un personnage de films burlesques. Après un mystérieux "Willie Work", dont je n'ai jamais vu le seul film survivant (Just nuts), Lloyd est donc devenu Lonesome Luke, une imitation de Chaplin, pour une cinquantaine de courts métrages entre 1915 et 1917. Une quinzaine d'entre eux ont survécu sous la forme de fragments ou de copies plus ou moins complètes. Les films de la série "Lonesome Luke" laissent entrevoir un peu de ce que harold lloyd allait devenir, disons, dans l'énergie dépensée. Mais au-delà, il s'agit principalement de comédies lourdes et peu inspirées, dont le grotesque allait vite devenir encombrant aussi bien pour Hal Roach que pour Lloyd lui-même. Il ne reste, complets ou en fragments, que 16 de ces comédies tournées entre 1915 et 1916.

 

By the sad sea waves (Alf Goulding, 1917), Bliss (Alf Goulding, 1917), Hey there (Alf Goulding, 1918), Two-gun gussie (Alf Goulding, 1918); The city slicker (Gilbert Pratt, 1918), The non-stop kid (Gilbert Pratt, 1918) Are Crooks dishonest? (Gil Pratt, 1918), Don't shove (Alf Goulding, 1919), Ring up the curtain (Alf Goulding, 1919), Just neighbors (Harold Lloyd & Frank terry, 1919), Pay Your dues (Vincent P. Bryan, Hal roach, 1919), Captain Kidd's Kids (Hal Roach, 1919)

His royal slyness (Hal Roach, 1920)

 

Tous ces films, qui mènent Lloyd de son apprentissage burlesque à coup de tartes à la crème, à ses futurs longs métrages qui seront un modèle impressionnant de comédies sophistiquées dans la monde entier, sont un ensemble bien disparate. Les premiers trahissent un manque certain d'inspiration et de subtilité, l'essentiel de l'intrigue étant souvent un vague prétexte pour permettre à Lloyd et Snub Pollard de se trouver ou se retrouver ensemble à provoquer le chaos, en favorisant aussi la rencontre entre Lloyd et Bebe Daniels. Pourtant les premiers films de la série 'The winkle' (Avec lunettes, donc) sont quand même plus élaborés, drôles et inventifs que n'étaient les "Lonesome Luke". C'est non seulement Lloyd qui faisait ses gammes, mais aussi Roach.

Ces quelques échantillons, dont certains sont en piteux état, possèdent ça et là des moments de grace, en particulier dans Don't shove, un film clairement concurrent de The rink, la comédie de Chaplin elle aussi sise dans une patinoire, et surtout Pay your dues dans lequel Roach et Lloyd s'amusent des sociétés "secrètes" plus ou moins maçonniques qui fleurissent en Amérique dans les libarales années 20, et dont ils feront d'ailleurs l'un et l'autre partie toute leur vie...
Mais ça et là, on a des promesses: Le "non-stop" kid est un jeune homme de son temps, précurseur du "jazz age". il drague, et rien n'est trop beau pour parvenir à ses fins; mais déja, on a une tentation de peindre le monde qui entoure le studio, et la vie quotidienne de Los Angeles qui va être si importante chez Roach...

On comprend aussi l'ambition, ainsi que les limites de ces courts métrages, avec The city slicker: Ce film est une fois de plus la preuve d'une sorte d'inspiration commune, qui n'a rien d'un plagiat, entre Lloyd et Chaplin; au moment ou ce dernier tourne Sunnyside, Lloyd accomplit sa version du choc des deux mondes aux Etats-Unis: ruralité et ville. Un hôtel miteux en pleine cambrousse fait appel à un jeune homme citadin pour redorer son blason. Mais contrairement à Chaplin, ce court métrage ne dépasse pas vraiment la caricature joyeuse, par alleurs réjouissante. Il fallait imiter Chaplin, mais Lloyd trouverait plus tard une inspiration propre, qui l'amènerait au sommet... Littéralement.

Enfin, avec les deux derniers films de la liste ci-dessus, on a d'intéressants exemples de ce qu'atait le tout-venant de la production de Roach et Lloyd, alors que ces derniers avaient sorti un chef d'oeuvre avec Bumping into BroadwayHis royal slyness est une intrigue élaborée (qui sera reprise en 1926 pour Charley Chase sous le titre Long fliv the king), avec des développements complexes, et une débauche de décors. Mais l'approximation domine, et le tout est bien moins rigoureux que le film précédent, justement Bumping into Broadway. Enfin, Captain Kidd's kids, en deux bobines, refait le coup du rêve, avec un bateau de pirates dont les occupantes sont toutes enjuponnées. Comme souvent lorsque les films sont soignés de Roach, la mise en scène est bien balourde. C'est le dernier film de Lloyd dans lequel cette tentation de la pochade vite-fait mal fait domine...

 

 

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet Comédie
11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 17:44

Le premier film de Lloyd distribué par la glorieuse et aristocratique paramount est aussi le premier film signé en solo par Sam Taylor. Il partira ensuite, accomplissant divers films d'importances variées, mais soyons justes: d'une part, ses meilleurs films sont ceux qu'il a réalisé ou co-réalisé aux cotés de Lloyd, et d'autre part, une fois de plus, c'est Lloyd le patron. Un patron qui joue gros, toutefois, car il sait que s'il reste son propre producteur, le prestige qui accompagne la parrainage par la firme paramount est impressionnant. Son nouveau film, pourtant, renoue avec de nombreux aspects de son héritage des années Roach, à commencer par des acteurs: Noah Young a ici un rôle important, mais on verra aussi Leo Willis. Ces deux-là ont été souvent les méchants grandioses des films de Charley Chase, Laurel & Hardy... et Harold Lloyd.

 

A nouveau, des années après A sailor-made man, Lloyd joue un homme riche: J. Harold Manners est insupportable, imbu de lui-même, et vit dans une tour d'ivoire conférée par ses moyens infinis. Il s'achète une voiture pour aller avec son costume, et en change en un claquement de chéquier quand il y a un problème. Il ne montre aucune émotion. Inversement, la ission de Slattery Row est une simple roulotte, dont le Père Paul espère un jour faire un vrai toit si un mécène se déclare. Mais s'il fallait compter sur tous les Manners de Los Angeles, ce serait mal parti. On s'en doute, c'est pourtant bien J. Harold Manners qui va fournir les 1000 dollars nécessaires, mais par méprise. Une fois la mission construite, il va s'y rendre pour protester que son nom y soit associé, et y rencontrer la fille de Paul, jouée par Jobyna Ralston. Devinez la suite...

 

Le début du film est un plan de père Paul en pleine évangélisation; il y a un travelling arière, mais ce n'est pas un trompe l'oeil comme souvent. Les trois premières minutes, sans aucun gag, exposent tout simplement ce qui va être le théâtre du film: les rues de Los Angeles, vécues par les sans-abri, les oubliés de la vie... et les malfrats, bien sur. C'est une tendance de ce film, d'éviter tout angélisme, et de confondre assez facilement les pauvres et les gens malhonnêtes. mais les riches en prennet pour leur grade, via l'horrible Manners du début du film, et par le biais de ses copains qui décident de le kidnapper lorsqu'il s'intéresse à une jeune femme qui n'est pas de son monde. et le sel du film provient en particulier de l'incryable complicité entre Manners, enfin converti, et un chef de gang au grand coeur joué par Noah Young. Celui-ci et tout son poids dans la balance, et ce n'est pas peu dire...

 

Comme d'habitude dans un film de Lloyd, le vrai caractère de manners va se révéler grâce à l'énergie qu'il va déployer tout naturellement dans l'exercice de l'altruisme... Mais au passage Lloyd et ses collaborateurs vont se livrer à de fort belles scènes, comme cette visite de la mission durant laquelle Lloyd n'a d'yeux que pour la belle Jobyna, ou cette scène poétique au clair de lune: en plan rapproché, on les croit au bord d'un lac, mais la caméra se recule et révèle qu'ils sont dans un terrain vague, à coté d'une flaque de liquide probablement pas très catholique... et puis comme toujours, une course de dernière minutre permet à Lloyd et ses copains (Des gangsters saouls qui sont acquis à la mission) de rivaliser d'ingéniosité pour arriver à temps à un mariage.

Même si on a vu mieux (Safety last), et si on verra mieux (The Kid Brother, Speedy), un film de Lloyd comme celui-ci, avec sa thématique sociale pétrie de bon sens et d'optimisme, n'a finalement qu'un défaut: celui de n'être qu'impeccable...

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1926 Sam Taylor *
5 février 2012 7 05 /02 /février /2012 18:47

Ce film est le plus gros succès de la carrière de Harold Lloyd, et symptomatiquement, il en a automatiquement fait son préféré, le ressortant presque tel quel, alors que d'autres films, dont Safety last, ont été sérieusement amputés lors de leurs passages à la téévision, sous la supervision de leur créateur. De même, lors de leur come-back commun, Preston Sturges et Lloyd sont revenus en 1947 sur ce film, en imaginant une suite, The sin of Harold Diddlebock. L'histoire, qui concerne l'arrivée au collège d'un ado attardé qui est obsédé par l'idée de devenir populaire, et devient immédiatement la risée de toute l'université sans même s'en apercevoir, colle à la thématique de la révélation du caractère d'un jeune homme, mais se situe dans l'univers ultra-codé du collège. Que le film ait été un énorme sucès n'est pas étonnant; il contient une scène qui en dit long: Harold Lamb est sur le point de rejoindre son université, et est obsédé par un film, dans lequel un jeune homme devient, précisément, la star de l'université... A l'instar de ce film, d'autres productions populaires vont explorer cet univers, notamment avec William Haines, mais on peut aussi citer le peu probant College de Buster Keaton, qui partage d'ailleurs quelques défauts avec ce film, et en est clairement inspiré...

Pour commencer, ni Keaton ni Lloyd n'ont l'age de leurs rôles, et le plus problématique, c'est que l'un comme l'autre étaient des athlètes... il est difficilement crédible de les voir en jeunes non-sportifs. Mais si College s'empêtre assez rapidement dans un discours profondément anti-intellectuel, celui-ci reste bon enfant, et Lloyd prend un malin plaisir à montrer la recherche du vrai soi via le sport pour son personnage... Il est aidé en cela par Jobyna Ralston, la seule vraie amie (Et plus, bien sur...) d'Harold, comme d'habitude son égale et un soutien sans faille. Elle a droit à deux jolies scènes d'introduction: Harold se retrouve assis à coté d'elle dans le train sans la connaitre, et ils font ensemble des mots croisés, égrénant sans se rendre compte de l'effet rendu des mots doux pour correspondre à une définition: Dear, darling, honey... Plus tard, Harold s'installe chez les parents de la jeune fille qui lui louent une chambre, et en voulant nettoyer un miroir, il voit tout à coup le visage doux de la belle...

Si l'embarras, ressort classique de la comédie quotidienne des années Hal Roach est l'un des principaux ingrédients du film, il est ici combiné avec la méprise, base du personnage de Harold Lamb, qui croit dur comme fer en sa popularité alors que le monde entier, ou presque, se moque de lui. On aimerait voir ça dans un autre univers que le college, et cette obsession du sport, d'ailleurs légèrement égratignée par un intertitre: "Tate College, un de ces stades de football auxquels sont rattachés une université..." Mais il ne s'agit nullement de cracher dans la soupe, Lloyd croyait à 100% à son personnage. Il croyait dans le verdict du public, ce qui explique qu'il ait tant cru à ce film, certes bon, mais pour ma part, je ne le trouve quand même pas si fabuleux. A noter que le dernier quart d'heure est comme d'habitude dévolu à un climax bien sur footballistique. Et comme de juste, en dix secondes, là ou Chaplin aurait fait magnifiquement perdre son camp, Lloyd emporte le morceau...

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1925 Sam Taylor Criterion **
30 janvier 2012 1 30 /01 /janvier /2012 07:57

Domestique, ce petit film (Six bobines, soit 60 minutes, pas une de plus) renvoie clairement au style et aux préoccupations des courts et moyens métrages réalisés chez Roach avant 1922 et Grandma's boy. Il y est question de la vie quotidienne dans le sud de la Californie pour un couple de jeunes mariés, à travers quatre épisodes reliés entre eux de façon crédible, autour d'une journée, si on excepte le prologue. Hot water: le titre fleure on la vie quotidienne, mais il est en fait synonyme de problème... On notera qu'il y est question de la vie de mariage comme d'une jungle, mais que comme Lloyd est un artiste plutôt subtil, et qui fuit le vulgaire autant que possible, il ne s'attaque pas à l'épouse. C'est donc la belle famille qui en prend pour son grade...

 

Le film est structuré en quatre parties. Dans un premier temps, un prologue nous montre un Harold fortement sceptique se marier suite à l'attraction irrésistible des yeux de Jobyna Ralston... Sans transition, on passe à la fameuse journée qui occupera le reste du film: il va faire des courses chez l'épicier, et y gagne une dinde qui lui pose de sérieux problèmes dans le tramway. Une fois rentré, il constate que sa belle famille s'est installée en son absence: la maman (La grande Josephine Crowell), une matrone qui envahit façon viking, avec son mot à dire sur tout, généralement dans le sens opposé de ce que souhaite Harold; le beau-frère, joué par Charley Stevenson, incurable feignant. Et un petit frère qui fait bêtise sur bêtise. Mais l'essentiel, pour notre héros, c'est la Butterfly 6 qu'il offre à sa femme, le principal objet de cette troisième partie, qui finira en ruines suite à une virée mémorable en famille. Enfin, ils reviennent à la maison, ou Harold va se heurter à la belle-maman, qui désapprouve son usage domestique d'alcool (Un voisin lui a offert un petit coup à boire en douce pour qu'il tienne le coup lors de l'invasion...). Cette partie, qui couvre le repas du soir, puis une partie de la nuit, est entièrement construite sur une méprise géniale: Harold, qui a utilisé un tampon de chloroforme pour se débarrasser de sa belle-mère, est persuadé que celle-ci a succombé à une overdose. Tous les indices, présentés au public de façon logique, concordent dans sa grille de lecture; non seulement il se croit un assassin, mais en plus il croit voir un fantôme, la vieille dame étant somnambule...

 

Cette construction en trompe-l'oeil est donc la pièce de résistance du film, mais soyons juste: la partie consacrée à la voiture, qui redéfinit d'une façon superbement construite les rapports toujours réjouissants entre comédie burlesque et automobile sans jamais tomber dans l'exagération à la Sennett, est aussi un beau morceau de bravoure. C'est dans tout le film, tourné avec assurance mais aussi une certaine retenue après le final délirant du film précédent, que Lloyd montre qu'il est toujours aussi à l'aise dans la miniature, la construction burlesque et le comique d'observation. Et c'est un plaisir permanent. Je sais que ce film est souvent considéré comme mineur, mais il reste l'un de ceux que je préfère de Lloyd.

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1924 Sam Taylor *
29 janvier 2012 7 29 /01 /janvier /2012 16:34

Ce Girl shy est une grande date du cinéma muet. D'une part, parce qu'il est une impressionnante déclaration d'indépendance d'un des plus importants comédiens de la décennie, ensuite parce qu'en prime c'est un film à la fois dans la tradition des autres longs métrages de Lloyd, et novateurs sur un certain nombre de points. L'acteur-producteur-patron a bien retenu la formule de ses films qu'il a bien sur contribué à créer, mais a aussi fait un peu plus que ce qu'il se permettait chez Roach. Rarement on n'avait vu auparavant un tel soin apporté à la création d'une comédie Américaine, et ce n'est pas un hasard si le film est contemporain des premiers grands films de Buster Keaton qui lui aussi cherchait à étendre le champ d'action de la comédie...

 

Harold Meadows est un benêt, habitant timide et si complexé de la petite ville de Little bend ou il est apprenti tailleur, qu'il en bégaie. Les femmes l'effraient, alors il tend à les caricaturer dans un projet de livre absolument ridicule ou il raconte des aventures imaginaires toutes plus idiotes les unes que les autres, mais ça n'arrange rien: elles ne l'effraient que plus... jusqu'au jour ou il rencontre la jeune, riche, et belle Mary Buckingham, dans le train qui les mêne à la ville. Elle se passionne pour son livre, et surtout pour lui, et il va désormais rêver d'elle. Mais comment assumer la différence sociale?

 

Une comédie, donc, d'une veine classique pour Lloyd, puisqu'il s'agit pour lui de montrer la métamorphose d'une andouille, de le montrer se dépassant pour conqu"rir et mériter la main d'une jeune femme. Si l'essentiel de l'intrigue (Complétée par la menace d'un mariage de Mary avec un butor polygame) concerne bien sur le changement qui s'opère en Harold jusqu'à ce qu'il prenne le taureau par les cornes et vienne la chercher à pied, en moto, en voiture(s), en tramway et même en carriole trainée par des chevaux, on constatera qu'une forte portion de ce film est consacrée à la cour que se mènent les deux amoureux. Et si on y rit, souvent, Lloyd n'a pas hésité à prendre les aspects sentimentaux de front, en choisissant le décor (Une petite rivière, un beau jour de printemps...) et en prenant les deux amoureux au premier degré, aidé d'ailleurs par la complicité et le talent de Jobyna Ralston. Celle-ci, déja active dans Why worry, porte une grande responsabilité de l'intrigue sur le dos. On aime sa Mary Buckingham, son sentiment d'être trahie par l'homme qu'elle aime lorsque Harold fait mine de se séparer d'elle afin de lui éviter un mariage désastreux avec un taileur sans le sou. La jeune femme complète vraiment le jeu de Lloyd: voilà un atout du comédien sur Keaton, par exemple, qui menait ses partenaires par le bout du nez...

 

Dans ce film, comme souvent, l'action mène à une séquence spectaculaire qui prend l'essentiel des trois dernières bobines, lorsque le bègue incapable d'aligner trois mots part de sa petite ville en trombe, et passe de véhicule en véhicule avec une énergie phénoménale. Comme souvent, c'est cette énergie, cette soudaine soif d'action qui va finir de faire d'Harold Meadows un homme... et qui va lui donner l'amour, bien sur! L'acteur est à la fête dans les séquences spectaculaires, même doublé, mais sait aussi étendre son registre en passant du rôle de ce pauvre Harold à son double maléfique, cet affreux bonhomme qui va de conquête en conquête, présenté dans les passages du livre... 

 

L'allongement du film, via le lyrisme des scènes d'amour, même bien complétées par des gags souvent tendres, se passe bien. L'équipe de ses films précédents est ici reconstituée, et le passage à huit bobines se fait sans heurts. Désormais son propre patron, Lloyd a montré qu'il n'avait besoin de personne. Typiquement, malgré tout, ce film serait suivi d'un autre moins ambitieux, afin de pallier éventuellement à un échec de ce film qui ressemble à s'y méprendre à un film sentimental assez traditionnel. Une bonne vieille méthode qui montre bien que Lloyd ne perdait pas le nord. et puis avouons-le: deux films de Lloyd en 1924 - Pourquoi s'en plaindre?

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet Comédie 1924 Sam Taylor *
22 janvier 2012 7 22 /01 /janvier /2012 10:47

 

Après avoir réussi, de façon éclatante, une métaphore du rêve Américain et de l'ascension sociale (Safety last!), Harold Lloyd et son équipe (Les réalisateurs Newmeyer et Taylor, les scénaristes Tim whelan et Ted Wilde, tous ces gens partageant également la casquette de gagmen) sont revenus à un type de situation et de personnage qui renvoie à A sailor made man, ainsi que Grandma's boy, et de fait ils ont ainsi raffiné une formule qui resservirait, qu'on en juge: Girl Shy (1924), The Freshman (1925), For heaven's sake (1926) et The kid brother (1927) seront tous des variations sur le même modèle: un homme inadapté à une situation va finalement se découvrir et se révéler en puisant en lui des ressources insoupçonnées, lui permettant enfin de s'affirmer. Les obstacles à cette découverte du vrai soi, après l'oisiveté des riches dans A sailor made man, et la lâcheté de Grandma's boy, seront toujours différents: bégaiement (Girl shy), timidité et gaucherie (The Freshman), égoïsme et incommunicabilité (For heaven's sake), et enfin un environnement familial étouffant (The kid brother).

 

Ici, le problème renvoie un peu au personnage de A sailor made man. Harold Van Pelham est un hypochondriaque savamment entretenu à coup de pilules par son médecin, qui part pour une ile paradisiaque passer des vacances réparatrices. Il est accompagné de son valet et d'une infirmière personelle, qui est secrètement aoureuse de lui. Chaque changement en lui étant source d'inquiétude, il n'a jamais pris le risque de réaliser ses propres sentiments, et comme en plus il est riche et épouvantablement distrait, il ne peut s'apercevoir de rien. D'ailleurs, lorsqu'il arrive à Paradiso, une révolution vient juste d'éclater, mais Harold prendra au moins 30 minutes à comprendre la situation, croyant même qu'on le conduit à son hôtel sous escorte lorsqu'il est envoyé en prison par les nouveaux maitres de l'île...

 

L'hypochondrie du personnage n'est finalement qu'une part de son problème; le principal écueil pour que le personnage s'ouvre aux autres, c'est sa richesse, son insupportable côté enfant gâté. Mais le génie de Lloyd, qui était un grand acteur, n'ayant jamais peur de varier ses personnages, lui permet de réussir à fédérer les spectateurs derière son insuportable Van Pelham... Sa naiveté à l'égard du monde qui l'entoure est plus ou moins celle d'un enfant, qui ne se rend pas compte que l'habitant qui semble faire une révérence est en fait un homme qu'on vient d'assommer, qui prend les gestes d'une femme qui essaie de retenir la chute d'un home blessé pour une danse spontanée et improvisée en pleine rue, et se met à applaudir à tout rompre... Ces gags situés dans la première demi-heure sont justement célèbres. L'art du trompe-l'oeil est ici utilisé aux dépens du personnage et non du spectateur...

 

Si le film renvoie tout de même, avec son île et sa révolution de pacotille, au grotesque de certains des courts métrages parmi les moins bons (On pense parfois à His royal Slyness), le film est malgré tout sauvé par une construction logique et la création de personnages qui sont solides. Outre Van Pelham et les chefs de la révolution (On y reconnaît le versatile Leo White, pear exemple), on fait la connaissance de John Aasen, un géant de 2m20 qui joue un rôle important aux cotés de Van Pelham, et dont la complicité va lui rendre bien des services. Mais conforme aux mythe du bon géant, ce n'est pas l'intelligence qui l'étouffe. Par contre, jetée en pleine révolution, l'infirmière va se révéler efficace et va prendre la résolution de profiter des circonstances pour prouver à Harold qu'il n'est pas malade, qu'il n'a pas besoin de ses sacrées pilules, et qu'ils sont faits l'un pour l'autre. De son costume d'infirmière, rhabillée avec des habits locaux, la nouvelle leading lady Jobyna Ralston va se révéler beaucoup plus capable que Mildred Davis, qui à ce moment était désormais l'épouse, et non la partenaire du chef. Si Mildred a pu payer un peu plus de sa personne notamment dans Dr Jack, elle était généralement passive, mais Jobyna sera souvent une partenaire à égalité, volontaire et bien souvent plus lucide qu'Harold. Ici, elle porte une grande part de responsabilité dans les idées délirantes des trois héros pour triompher des révolutionnaires...

 

On a souvent comparé Lloyd à Fairbanks, notamment pour l'optimisme de ses courts métrages. Avec ce film, on voit quand même que l'optimisme de lloyd est largement soumis à des circonstances dans lesquelles le personnage doit trouver sa voie. Ces circonstances sont très clairement dues à la rencontre, avec Jobyna, mais aussi avec Colosso le géant. Doug aurait été seul, dans des films comme His majesty the American. Du reste, quand Doug jouait les benêts, il était dur de le croire. Harold, lui, s'en sort bien. Après ce film, il a effectué le grand saut vers l'indépendance... En attendant, même si on voit bien que ce n'est pas son meilleur film, on prend bien du plaisir avec cette superbe construction burlesque, qui se clôt sur un retour à a vie citadine, dans laquelle le bon géant a d'ailleurs un rôle à jouer, fut-il subalterne...

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1923 Sam Taylor *
20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 18:35

Harold Lloyd a quitté la petite ville de Great Bend, pour devenir quelqu'un dans la grande ville. Il a promis à sa fiancée Mildred de devenir important rapidement, afin qu'ils puissent se marier. Mais la réalité ne lui permer pas de monter si vite les échelons du magasin ou il travaille, et il est un simple vendeur au rayon tissus. Lorsqu'elle vient le visiter, il a toutes les peines du monde à la maintenir dans son ilusion, c'est la raison pour laquelle il saute sur l'occasion qui se présente, lorsque ses patrons cherchent un coup publicitaire pour faire bondir leurs ventes, il leur propose de demander à un de ses copains, un ouvrier qui travaille dans la construction de gratte-ciels, et qui n'a pas la moindre complexe à grimper sur les façades des buildings, d'escalader l'immeuble du grand magasin afin de provoquer une affluence record. Mais le jour venu, le copain a maille à partir avec un policier, et c'est à Harold de remplir le contrat s'il veut vraiment monter en grade...

 

Ce film est bien sur le plus connu de tous les longs métrages de Lloyd, et on peut sans aaucun doute facilement le comprendre. Au coeur du film, la fameuse ascension, cette icone du muet, qui fait penser à bien des gens que Lloyd est une sorte de super-cascadeur, ce qu'il n'était pas, ou que tous ses films ne sont qu'un enchainement d'acrobaties. Le fait que Lloyd ait été particulièrement fier de cette séquence, l'ait souvent montrée hors contexte, a bien sur été un facteur déterminant. Mais voir le long métrage entier dans la continuité de ses 73 minutes, c'est toujours une occasion splendide de toucher du doigt le génie d'Harold Lloyd. On mentionnera une bonne fois pour toutes deux faits: d'une part, le comédien a perdu des doigts de sa main droite, ici cachée sous un gant qui la reconstitue: certaines scènes ont du être plutôt compliquées à tourner; ensuite, contrairement à la légende, ce n'est pas le comédien qui a fait toute cette impressionnante scène, mais tous les plans généraux de l'immeuble ont été tournés avec le cascadeur Bill Strothers qui joue le copain de Lloyd dans le film... La substitution de l'histoire est en fait inversée durant le tournage. Sinon, bien sur la topographie particulière de la Californie a permis à l'équipe de tourner les plans rapprochés de Lloyd qui grimpe en trompe-l'oeil. Mais c'est tellement bien fait! L'idée en était venue à Lloyd lorsqu'il avait vu un cascadeur escalader un immeuble en pleine ville; rendu conscient du suspense inévitable inhérent à ce genre d'activité, il avait eu l'idée d'en faire un film. Le nom du cascadeur? Bill Strothers...

 

Il est sans doute un rien facile de le dire, mais ce nouveau long métrage fait partie d'une petite liste, précieuse, de films parfaits: la construction, qui culmine à tous les sens du terme dans cette fameuse scène d'ascension, les gags superbes et riches, et nombreux, les enjeux qui collent si bien aux années 20, et le timing de tous les comédiens, Lloyd en tête, tout concourt à faire du film une réussite. De plus, si on était dans les deux longs métrages de Lloyd devant une glorification tranquille d'une certaine idée de la vie rurale, ici le sujet est bien sur axé sur la vie citadine, et sur une certaine idée du rêve Américain, et l'ascension sociale si simplement et si efficacement symbolisée par cette ascension réelle. 

 

Cette montée sur l'échelle sociale, festival de gags parfaitement enchainés, a été pour Lloyd si importante que le tournage (Durant l'été 1922) a commencé par ces scènes, avant de faire le reste, brillant, mais plus routinier. Lloyd a ensuite attendu le premier avril 1923 pour le sortir, ce qui lui a permis de raffiner son film à travers le système de previews dont il était l'inventeur. Comme de juste, sortant son film un premier avril, il a d'ailleurs commencé le long métrage par un des ses trompe-l'oeil qu'il affectionnait tant: tout concourt à fare croire que le jeune homme est condamné à mort et va être pendu, alors que lorsque la caméra s'éloigne elle révèle qu'il est juste dans une gare, derrière une barrière, le noeud coulant pris pour celui de l'échafaud étant un dispositif par lequel les postiers accrochent le courrier à prendre... Le film est le dernier pour lequel Lloyd joue avec sa future épouse Mildred Davis. Devenue Mme Lloyd, elle laissera sa place sur l'écran à la délicieuse Jobyna Ralston. Sinon, le succès énorme de ce film dont Lloyd a assumé toute la production sera sans doute déterminant dans sa décision de partir de Rolin Productions, le studio d'Hal roach, afin de tourner ses films en indépendance totale. Une page se tourne bientôt... Mais quel beau film!! La quintessence de l'art de Harold Lloyd, tout simplement.

 

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Published by François Massarelli - dans Harold Lloyd Muet 1923 Sam Taylor Criterion **