Comme beaucoup de films majeurs de Charley Chase pour Roach, ce court métrage de deux bobines a été réalisé par Leo McCarey, et l'entente entre les deux hommes, leur approche de la comédie, leurs univers personnels font que c'est une merveille de cette comédie de l'embarras si chère au comédien, et qui donnera dans d'autres contextes des films formidables de Laurel et Hardy ou Max Davidson. Comme avec toutes ses séries de courts métrages depuis les débuts d'Harold Lloyd, Hal Roach a privilégié une approche progresive, en se concentrant d'abord sur des films d'une bobine avant de doubler la longueur. C'est l'un des premiers films en deux bobines (le deuxième pour être précis, après le probablement perdu Hard-boiled), qui installe donc une véritable intrigue avec des enjeux plus ambitieux que les films précédents.
Jimmie Jump (Chase) est un fils à papa, qui a des parents obnubilés par son avenir, mais n'en ont pas la même vision. La mère souhaite que son fils soit accepté dans la bonne société, alors que le père est surtout motivé par l'envie d'en faire un homme. Ce qui le fait obliger son fils à travailler à l'usine afin qu'il se mèle aux ouvriers. Les scènes du début sont un festival de gags qui démontrent que le jeune homme est totalement inadapté, bien entendu, même si de façon imprévue il s'intègre... plus ou moins. Puis alors qu'il rentre chez lui, sa mère lui demande de danser pour des invités, et c'est affublé d'une tenue d'autant plus ridicule (Une robe de mousseline, une couronne de laurier) qu'il se prète à un ballet, sous les yeux consternés de sa petite amie, Martha Sleeper, et de son père. Afin de redorer son blason auprès de la jeune femme, il se rend ensuite à un bar louche ou celle-ci danse, et se comporte en caïd, avant qu'un article de journal détaillant la lamentable histoire du ballet ne fasse changer les avis de tous les durs présents, dont Noah Young... La suite, bien sur, c'est de la castagne.
C'est splendide, d'autant qu'avant de trouver le rythme de croisière, on sent que Chase et McCarey expérimentent beaucoup. Ils se permettent par exemple deux séquences dansées, ce qui ne pose aucun problème à Chase qui avait du métier dans cette discipline, mais ce qu'il ne fera que rarement plus d'une fois par court métrage. Et le personnage de riche inadapté, amoureux d'une jeune femme de la classe ouvrière, était un clin d'oeil au public populaire, principale cible des films de Roach. Mais ici, confronté à une crise de masculinité (Tout sauf politiquement correcte, bien sur), à la menace de se prendre une rouste par Noah Young, ou à l'humiliation de ne pas se faire accepter par ses camarades de boulot, clairement la barre est haute! Comme d'habitude, sous couvert de comédie, c'est toute une thématique de la masculinité des anées 20 qui s'étale sous nos yeux dans sa diversité, sa complexité... et son humour.