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26 juin 2023 1 26 /06 /juin /2023 19:15

Sorti après son spectaculaire Enfant de Paris, Le roman d'un mousse est une preuve de plus de la maîtrise dont faisait preuve Léonce Perret avant la première guerre mondiale, et de la place qui fut la sienne au sein de la Gaumont: il est évident qu'il bénéficiait pour ses productions mélodramatiques de moyens à  la mesure de ses ambitions... Le scénario de ce nouveau mélodrame d'aventures est basé sur une intrigue très bourgeoise, dans laquelle un marquis ruiné, associé à un banquier sans scrupules (Sur lequel, hélas, je reviendrai plus loin), se marie à une comtesse fortunée. L'idée est bien sur de se débarrasser de la belle après avoir éloigné son bambin afin de faire main basse sur sa fortune; pour se débarrasser de l'enfant, le banquier se propose de jouer son percepteur le temps de la lune de miel, et de faire croire à une fugue, en laissant une lettre dans laquelle le gosse annonce s'être enfui. Puis, le banquier Werb place le gamin sur un bateau ou il sera ensuite brutalisé parle capitaine. Pendant ce temps, le marquis tente de tuer son épouse mais suite à une maladresse se tue lui-même... la comtesse est accusée du meurtre. Le mousse parviendra-t-il à la disculper à temps?

On le voit, les péripéties se situent dans le droit fil du roman populaire, mais Perret est à son aise avec l'installation d'atmosphères idéales: promenade fatale à St-Malo, où le banquier drogue le garçon, scènes sur le bateau ou le gamin est en proie à la tyrannie du capitaine qui lui fait faire tous les sales boulots, intérieurs bourgeois rendus inquiétants par des jeux de lumières, décidément une qualité particulièrement représentée chez Perret, etc... Le film se voit sans aucun déplaisir, même si on n'est pas devant un film aussi beau plastiquement parlant, et aussi avancé que L'enfant de Paris...

Et il y a aussi le problème que je qualifierai de politique: Werb, de son prénom Elie, est un usurier sans aucun scrupule, un banquier de la pire espèce, qui n'a aucune humanité. Encore une fois, faut-il en accuser le metteur en scène, ou faut-il s'en prendre à Gaumont, dont les idées conservatrices n'ont jamais été un mystère? quoi qu'il en soit, cette trace d'antisémitisme, aussi discrète soit-elle, est un défaut irritant dans ce qui reste une oeuvre accomplie, un film à voir donc d'un metteur en scène qui mériterait d'être plus remis sur le devant de la scène...

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Published by François Massarelli - dans Muet 1913 Léonce Perret *
26 juin 2023 1 26 /06 /juin /2023 16:25

Ce film de 1912 interprété par Léonce Perret, Suzanne Grandais et Emile Keppens est une merveille, d'abord en lui-même, ensuite parce qu'on peut y déceler la création d'un genre, qui aura sur le cinéma de Gaumont d'abord, de France ensuite et du monde enfin des répercussions importantes. C'est pour ma part mon film préféré des quelques rares oeuvres de Léonce Perret que j'aie eu la chance de voir, et je dois cette découverte à l'inévitable coffret "Gaumont, le cinéma premier, vol.1", sorti en 2008, qui contenait 13 films de Perret.

Le principal apport de ce film , qui n'est sans doute pas le premier à le faire, mais qui fait partie d'un genre en plein développement, c'est de donner à voir un style de films de mystère, à vocation policière, dans lequel les balbutiements du cinéma de suspense sont intégrés, sans pour autant qu'il faille y voir la dette à Griffith. l'histoire racontée est celle d'un héritage qui tourne mal: Suzanne (Grandais) hérite de son vieil oncle, et son cousin Fernand de Kéranic (Perret) qui est nommé son tuteur deviendra automatiquement le légataire universel au cas ou la jeune femme décéderait ou serait frappée de folie. Fernand souhaite épouser la jeune femme, car, on l'apprend très vite, il a de sérieuses dettes. Mais celle-ci est amoureuse et fiancée, et Fernand a tôt fait de trouver un stratagème pour se débarrasser en même temps de l'amant et de sa cousine... ce qu'il n'a toutefois pas prévu, c'est que les deux tourtereaux puissent survivre, quoique sérieusement traumatisés par le traitement qu'ils ont subi aux "roches de Kador", mais aussi que l'on fasse appel à un traitement psychologique révolutionnaire, avec  projection d'un film, pour établir la vérité en provoquant une catharsis...

Derrière cette trame feuilletonesque, se trouve une intrigue à cheval entre deux mondes: les personnages sont bien sur des bourgeois et des aristocrates, des oisifs, sans qu'aucun jugement ne soit porté à cet égard, mais l'intrusion du crime spectaculaire d'une part, et du cinéma comme méthode térapeutique d'autre part, nous renvoient à ce bon vieux 20e siècle. Le film par son sens du spectaculaire photogénique anticipe sur les feuilletons de Feuillade, qui ont commencé dans le sillage de ses 5 Fantomas commencés l'année suivante. La scène selon moi la plus mémorable est celle qui voit Fernand, qui a convoqué le fiancé aux "roches de Kador" après avoir drogué Suzanne, laissée pour morte sur la plage, tirer sur le malheureux, dans un plan qui est pris de point de vue de Fernand, dissimulé derrière les rochers, avec sa victime en contrebas. dans cette séquence, Perret qui a construit la scène avec une grande lisibilité nous entraîne dans le suspense avec ses champs contrechamps. Le suspense ici tient au fait qu'on sait que Fernand a un projet et qu'il a fait venir l'autre homme, tout ce qui nous reste à découvrir, c'est le mode choisi pour son crime. A un suspense de bon aloi, il ajoute donc une violente surprise...

Les scènes de thérapie, rendues dramatiques par un jeu magnifique sur l'obscurité, jouent bien sur sur l'objet cinématographique; la personne qui va regarder un film, à savoir Suzanne, afin de lui faire retrouver la mémoire, est d'abord isolée dans un halo de lumière, étant de fait désignée comme notre cible à nous spectateurs. Cette personne qui est le centre d'un film va regarder un autre film, découvrir la vérité, et revenir à la raison. La mise en abyme est soulignée non seulement par la mise en lumière de la spectatrice, mais aussi par l'obsédant écran blanc qui envahit une bonne partie du cadre, contrastant avec la longue chevelure noire de la jeune femme. la séquence est étrange, visuellement très forte, et franchement inoubliable.

Une dernière chose concernant ce film qui aspire au respect, et qui nous est transmis dans une magnifique copie: une scène fera sans doute sourire les plus indulgents d'entre nous, lorsqu'on nous dit que'une barque dérive au large, sur la mer déchaînée, et que l'on voit un bateau qui est manifestement échoué sur le fond sablonneux de ce qui est évidemment une plage, on va forcément tiquer. Mais quelle proportion des spectateurs de la plupart des grandes villes françaises en 1912 et 1913 qui ont vu ce film étaient déjà allés à la mer? Combien étaient en mesure de déceler la supercherie? ce qui apparaît aujourd'hui comme une naïveté est juste le rappel qu'en matière de film, il est parfois utile de ne pas en savoir trop, il faut se laisser aller, et permettre au film de prendre le pouvoir. C'est l'une des leçons de ce film essentiel, qui en plus d'être beau à tous points de vue, possède un titre, franchement, qui ne peut que faire rêver.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet 1912 Léonce Perret *
23 juin 2023 5 23 /06 /juin /2023 22:32

Oscar serait sans doute, aujourd'hui, considéré comme un obsédé sexuel, puisque tous ses films tournent autour de la drague, qui vire vite au harcèlement. Ici, Oscar (Léon Lorin) pousse son avantage un peu loin lorsqu'il va jusqu'à sonner chez la dame de ses pensées (Angèle Lérida) au petit matin. celle-ci l'envoie paître ("Qu'il aille au bain!") ce qu'il prend au pied de la lettre.

Pas extraordinaire, le film a au moins l'avantage de nous proposer une jolie ballade dans le Paris de 1913, et un final doublement intéressant: ouvertement coquin, puisqu'on pourrait y décrypter que la dame en chemise de nuit rejoigne le monsieur dans la baignoire, d'une part, et que la dame nous adresse un clin d'oeil en allant fermer le rideau pour nous empêcher d'y voir quoi que ce soit, nous spectateurs d'autre part.

Mais le final est aussi historiquement intéressant, puisqu'à l'issue de cet échange de fluides et de savon, on aperçoit... Léonce Perret (Qui ne joue aucun rôle dans le film), deux nouveaux-nés dans les bras, qui nous propose d'en faire autant. Et on continue à attribuer le film à Feuillade... il a pris de l'embompoint, Feuillade, non?

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet
20 juin 2023 2 20 /06 /juin /2023 09:45

Une fois de plus, l'argument de cette petite comédie nous rappelle le milieu dont est issu Léon Gaumont: bourgeois, et probablement profondément anti-Britannique, par tradition droitière et Catholique... Mais ça reste une comédie, qui vire au loufoque d'ailleurs... Au détriment cela va sans dire d'un Anglais!

Léonce (Perret) et son épouse Poupette (Suzanne Le Bret) sont à la recherche de morilles, et n'en trouvent pas. Ils croisent un anglais, bredouille comme eux... Mais quand ils rencontrent une jeune femme qui a un panier plein à craquer de ces moisissures et est prête à les vendre, le couple se fait coiffer au poteau par le Britannique, qui se rend au restaurant le plus proche avec sa "chasse miraculeuse"... 

L'histoire se concentre ensuite sur la façon dont Léonce et Poupette vont remplacer au restaurant les morilles par des fragments d'éponge... Et à la fin ça vire au n'importe quoi, l'anglais ayant très soif et faisant déborder sérieusement le cadre du réalisme en buvant des litres de bière, puis d'eau, dont celle d'un bocal de poisson et même d'un canal...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Léonce Perret
20 juin 2023 2 20 /06 /juin /2023 09:30

Léonce (Perret) est réalisateur, et il finit un drame aux studios Gaumont, où nous apercevons les acteurs maison, Renée Carl, Bout-de-Zan, et Ernest Bourbon, ainsi qu'un instant, Gaston Modot. Mais étant aussi l'acteur de ses films, il reçoit une charmante lettre d'une admiratrice qui lui propose un rendez-vous galant dans un cinéma. de son côté, Poupette, l'épouse (Suzanne Le Bret) soupçonnne son mari de la tromper... Découvrant la lettre, elle décide de prendre son mari en flagrant délit...

A l'opposé de Jean Durand qui tournait des farces reposant sur poursuite et destruction, Perret proposait des histoires qui restaient bien sûr à vocation comique, mais toujours (ou presque toujours) dans un cadre réaliste, voire familial... 

Le film est donc soigné, charmant, et à peine coquin; rien n'arive en apparence, mais... que va vraiment faire Léonce de l'admiration de sa mystérieuse correspondante? Nous ne le saurons pas... Et bien sûr la vocation première de ce film est probablement de placer Léonce Perret dans son environnement professionnel, et de donner à voir au public des bribes de coulisses de ce cinéma qui les passionne déjà tant... Et quand on voit une séance de cinéma, c'est le public lui-même qui semble plus intéresser Perret...

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Léonce Perret
16 juin 2023 5 16 /06 /juin /2023 10:53

Interprété par Léonce perret, et Mme (Valentine Petit), avec la complicité d'Emile Keppens, L'express matrimonial est une comédie de la série Léonce, qui avait rendu l'image du cinéaste célèbre. Affable et rondouillard, il promène sa bonne mine de film en film, ce qui ne l'empêchera pas de jouer occasionnellement les bandits (Le mystère des roches de Kador). L'intérêt principal de ce film en attendant est de proposer une charmante comédie sentimentale qui tire parti d'avoir été tournée dans un vrai train en marche.

L'ingéniosité déployée par Perret pour s'adapter à la situation, et incorporer en plus la notion de défilement, puisqu'on voit effectivement que le décor bouge derrière les vitres, donne un cachet particulier à ce joli film, qui par ailleurs conte comment Léonce se rend chez son oncle, qui lui a trouvé un beau parti et cherche à lui présenter la dame. Mais le héros a fait une rencontre dans le train, et en dépit de l'horrible chaperonne qui accompagnait la dame en question, a sorti le grand jeu... C'est donc bien moins motivé qu'il arrive à destination.

Plutôt que de baser tous ses gags (il n'y en a pas énormément) et toute sa drôlerie sur la drague, Perret joue parfois la carte de l'embarras, à l'instar d'un Max Linder, mais il le fait plus subtilement que Max, préfigurant à sa façon les futures comédies de Charley Chase (dont Crazy like a fox recyclera l'intrigue de base de ce film, volontairement ou non). Quelques séquences notables nous montrent des solutions inattendues pour un film de 1912, tels ces plans qui incorporent certains des protagonistes par le biais d'un miroir. il ne s'agit pas contrairement à ce genre de dispositif dans les films plus proches de nous d'étendre le champ de vision de la caméra, mais tout bonnement de trouver une solution pour placer la caméra dans un wagon d'un train en marche... Un autre plan, situé à l'arrivée du train, capte l'activité dans les rues (De Niort, semble-t-il) en 1912, la caméra filmant la sortie des figurants et de Léonce depuis la gare elle-même. Le contraste entre la rue baignée de lumière, et la pénombre dont sortent les gens, crée une très belle composition.

Une autre voie pour la comédie, basée en France (Voir les films de Jean Durand ou de Roméo Bosetti) sur l'accumulation, la poursuite, le grotesque... Voilà donc ce que cherchait à produire Léonce Perret. Avec ce film, il y parvient sans aucun problème.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Léonce Perret
12 juin 2023 1 12 /06 /juin /2023 17:13

En banlieue, un ouvrier amoureux extrait un pavé d'une carrière, et y appose une croix: il se demande de quoi le caillou sera témoin une fois qu'il sera posé à Paris... Sa petite amie commence à trouver de l'intérêt pour un rival, il décide de partir pour la capitale. Mais Jeanne, qui a suivi Robert dans la grande ville elle aussi, est moins bien lotie: son compagnon bit de plus en plus, et elle se rend compte qu'elle a jeté la proie pour l'ombre...

Comme Un drame à l'usine, ce film de 1912 nous est arivé non signé, mais certains ingrédients, et notamment des trouvailles visuelles (Dont le gros plan d'un pavé dans un iris, qui sert de fil conducteur au film), nous rappellent les films du même genre dont on sait que Perret les a signés; de plus, on retrouve encore un certain sens du rythme assez enlevé, avec la tendance à ne pas trop en demander aux acteurs, qui vont à l'essentiel: Feuillade, ou Etienne Arnaud, en demandaient plus, voire trop, à leurs interprètes...

Le ton est proche de zola, dans un certain dosage respectable, bien entendu: on est chez Gaumont. Le cruel destin de Jeanne, qui suit son amour pour mieux se faire prendre au piège (ah, la vision de cette table sur laquelle s'accmulent les bouteilles, signes imparables d'un alcoolisme, gangrène de la classe ouvrière...) contraste de façon saisissante avec l'étonnant final, qui se joue autour d'un objet, un seul. Du coup, le titre ici n'a rien de métaphorique...

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet
12 juin 2023 1 12 /06 /juin /2023 17:09

Sur le coffret Gaumont, le cinéma premier, Volume 2, figure un ensemble de films non attribués, parmi lesquels trois films qu'un certain nombre de détails permettent de rattacher à la filmographie de Perret; Les deux premiers appartiennent au canon réaliste de la firme à la Marguerite, faisant partie, ou étant plus ou moins rattachés à la série "La vie telle qu'elle est", où s'illustrera en particulier Louis Feuillade, et on pourrait d'ailleurs argumenter par bien des aspects (poésie faubourienne, noirceur du propos, mais force reste à la loi et au capital, présence d'Eugène, ou Edmond Bréon, etc) de leur appartenance à la filmographie de Feuillade, le père des Vampires!

Néanmoins, les deux films possèdent des atouts qui nous permettent d'émettre une autre hypothèse...

Un drame à l'usine raconte la faute d'un contremaître qui frappe un ouvrier; celui-ci doit être hospitalisé, et le contremaître est licencié, mais plutôt que de se venger, il va être obsédé par le remords, et va d'abord venir en aide financièrement à la famille de sa victime, Pujol. Puis il ira plus loin, et réintègrera l'usine après avoir sauvé ses camarades lors d'un incendie.

L'obsession du héros, la façon dont l'action va droit à l'essentiel, sans les sacro-saintes pesanteurs des films de Feuillade, peuvent éventuellement être rattachés à des films de Léonce Perret. Mais le film, de toute façon, est un impeccable mélodrame avec rédemption, situé dans une usine où, au final, les différentes strates sociales se réconcilieront... 

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet
12 juin 2023 1 12 /06 /juin /2023 17:04

Le portrait inachevé et Le portrait ovale: Ces deux titres recouvriraient donc un seul et même film, retrouvé à la Gaumont, sans titre ni indication de metteur en scène, et inclus dans un beau coffret (Gaumont, Le cinéma premier) sous le titre supposé de Le portrait inachevé, sans qu'aucune indication de date ne nous soit donné. Si le film est encore un peu gauche par rapport, disons, à L'automne du coeur, c'est sans doute qu'il date d'avant; Perret a commencé la mise en scène en 1909, et parmi ses filmographies, on indique un "Portrait ovale", d'après Poe, pour l'année 1910. Ce film se rattache en effet à cette histoire, et conte l'obsession d'un homme, un aristocrate qui a tué la femme de sa vie à l'occasion d'un accident de chasse, alors que le portrait qu'il peignait alors d'elle est resté inachevé. Il cherche des modèles pour la remplacer, en vain, jusqu'au jour ou il rencontre son sosie, physiquement du moins, car la jeune femme est, le pense-t-il, indigne de lui: il voit d'ailleurs Jeanne, sa femme décédée, lui reprocher son choix. jusqu'au jour ou pour lui plaire, Madeleine se grime en Jeanne...

 

Ca nous rappelle forcément quelque chose; bien sur, Vertigo vient d'une histoire similaire, mais aussi, plus proche de ce film, le beau et très noir Rêves de Evguenyi Bauer: sur un canevas similaire, le Russe allait plus loin dans le drame, mais les trois films ont en commun le thème du sosie qui va "recréer" la femme morte. Mais dans ce film, cela s'exprime d'une façon directe, sans trop de pesanteur ni fioriture: Bauer, dont le film date de 1915, délaiera le temps, jouant sur la tension et les tourments intérieurs. Perret, si c'est bien lui, ne s'attarde pas. Mais la façon dont il montre l'obsession, combinée à la tendance à l'adoration de la femme (les cinq premières minutes du film, avec la séance de pose durant laquelle le marquis est hypnotisé par son épouse), nous renvoient à L'automne du coeur, une fois de plus.

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Published by François Massarelli - dans Léonce Perret Muet
12 juin 2023 1 12 /06 /juin /2023 07:58

Premier film un tant soit peu ambitieux de Léonce Perret, Molière est adapté d'un scénario d'Abel Gance, qui interprète le grand homme dans sa jeunesse. On est encore beaucoup dans un cinéma de tableaux, avec un plan pour chaque scène, sans qu'il faille parler de plans-séquences.

Néanmoins, le film, par ailleurs très académique, est notable pour un certain nombre de choses, notamment la façon dont Perret donne de la vie en demandant à ses acteurs un jeu enjoué, parfois truculent. Son sens de l'espace apparait dans deux plans situés au début de la vie de bohême de Molière: la troupe va tranquillement son chemin, marchant de façon presque guillerette, puis on voit les mêmes gravir une pente raide, sous la brume, avec difficultés; deux plans qui disent en peu de temps tout ce qu'on peut dire sur les bons et les mauvais moments de la vie de théâtre.

Perret utilise aussi, une fois dans ce film, une multiplicité de points de vue au moment de la mort de Molière, dans un théâtre comme il se doit. Il filme d'abord de coté, captant aussi bien la performance que la public, et s'autorise deux autres angles, se rapprochant de Molière, pour nous le montrer surmontant sa souffrance et faisant son travail jusqu'au bout.

Pour le reste, c'est une vignette, résolue en 20 minutes, dans laquelle seuls comptent les moments-clé (si on fait exception bien sûr des deux séquences qui montrent la troupe en voyage): naissance de la vocation, présentation à la cour, et bien sûr la fatale représentation du Malade imaginaire.

 

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Published by François Massarelli - dans Muet Léonce Perret Abel Gance