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29 octobre 2024 2 29 /10 /octobre /2024 22:50

Le commissaire Lise Tancrède (Annie Girardot), qui a réussi à se faire une place dans la police, rencontre un ancien camarade de fac, Antoine Lemercier (Philippe Noiret), qui y est resté: il est professeur de Grec à La Sorbonne... Elle n'arrive pas à lui avouer la triste vérité, et c'est ce qui va causer des difficultés, lorsque entre deux étapes de son enquête elle tente de commencer une relation avec lui...

C'est un classique, désormais, du à l'un des plus intéressants des metteurs en scène de comédie en France, et c'est l'un de ses meilleurs films, l'un des plus grand public aussi... reposant entièrement sur l'alliance entre deux monstres sacrés. Des acteurs de premier plan auxquels on ne pense pas forcément quand on éoque, justement, le cinéma populaire, et la comédie. C'est d'ailleurs injuste, l'un et l'autre s'étant illustrés, auprès de gens qui vont de Yves Robert (pour Noiret) à Claude Zidi ou Michel Audiard (pour Girardot)...

Et justement, Michel Audiard a contribué au dialogue, mais sans en faire trop, c'est même un modèle de discrétion pour lui... Mais le dialogue est parfaitement dosé, et contribue grandement à creuser l'écart entre le professeur de langues mortes, et la fonctionnaire de police, y compris quand il est évident que l'un comme l'autre juge l'autre irrésistible... Et d'ailleurs, avouons-le: dans ce film, plus que d'habitude sans doute, les deux acteurs le sont!

Et la galerie de portraits, dans cette affaire de meurtres crapuleux impliquant des députés, est une autre qualité, avec George Wilson en député de l'opposition, Guy Marchand en commissaire dragueur, Hubert Deschamps en concierge irascible, et Paulette Dubost qui joue la mère forcément farfelue de la commissaire, et enfin, moins onnue sans doute mais tout aussi mémorable, une habituée des films de de Broca, Monique Tarbès en dame pipi... 

Ce film délectable eut même une suite, On a volé la cuisse de Jupiter...

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Michel Audiard Philippe de Broca
27 octobre 2024 7 27 /10 /octobre /2024 16:32

Serge Korber, Dany Carrel, Michel Audiard, comment dans ce cas ne pas penser au film précédent du metteur en scène, le si poétique, si "hors du monde" Un idiot à Paris? Mais l'histoire ne se répète pas forcément, le réalisateur se tourne vers le film noir en adaptant un roman de James Hadly Chase...

Fred Thibault (Jacques Perrin) est un jeune photographe sans avenir, qui traine dans les rues pour proposer des tickets au gens qu'il photographie. Le hasard lui fait rencontrer une jeune femme, mystérieuse comme il se doit, dont il tombe immédiatement amoureux: Claire (Dany Carrel) est voleuse... Il décide désormais de l'arracher des mains d'un protecteur jaloux, Brady (Robert Hossein). Les deux jeunes gens s'aiment, mais quel est le véritable rôle de Brady dans la vie de Claire?

Côté face, les dialogues, percutants et millimétrés, sans ces écarts que se permettait Audiard quand on le laissait faire. Ici, le verbe sert la caractérisation, mais ne flirte pas avec le baroque... Parmi les seconds rôles, on appréciera inévitablement Dalban en flic revenu de tout, et Pierre Brasseur qui ne peut pas ne pas tenter, par tous les moyens avouables ou non, de voler l'attention dans un scène! Perrin est jeune, et Dany Carrel... Eh bien c'est Dany carrel, quoi!

Côté pile, il faut bien reconnaître que le schéma femme fatale - héros vertueux mais fasciné et naïf - beau ténébreux diabolique a du plomb dans l'aile, et comme il est tourné en France par un metteur en scène soucieux d'imposer sa griffe, on tombe assez rapidement dans le réchauffé... Ca se laisse voir, ce qui est déjà ça. Mais "La Petite Vertu", en 1968, tout comme les scènes de lit qui se prolongent, on sent que la production a les friands de sensationnels, aguichés par la libéralisation du cinéma, dans le collimateur! 

...La preuve en affiches.

 

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Published by François Massarelli - dans Michel Audiard
23 juillet 2023 7 23 /07 /juillet /2023 18:40

Un homme, célibataire pourtant assez militant, va se marier. Lors d'une discussion avec son meilleur ami et colocataire, ce dernier tente de le persuader du fait qu'il a probabblement été victime de pressions et manipulations de la part de la fiancée... 

Ce qui précède est le prétexte, mais en réalité, ce film est plutôt une suite d'anecdotes jointes assez artificiellement, enchaînées par la scénariste France Roche et avec la collaboration d'un certain nombre d'auteurs dont Albert Simonin. De la même manière, les acteurs vont et viennent, et si on reconnaît Claude Rich (le sceptique) et Jean-Claude Brialy (le futur marié), le reste de la distribution fait des apparitions: Françoise Dorléac, Micheline Presles, Bernard Blier, Catherine Deneuve, Michel Serrault, Marie Laforêt, Marie Dubois, Mireille Darc, Francis Blanche et Bernadette Lafont... Sans oublier le jeune Jean-Paul Belmondo. A part la mise en scène de Molinaro (j'y reviendrai), le facteur d'unité ici est le dialogue signé de Michel Audiard... Et ça se sent.

Le sujet en revanche sent aussi, et pas très bon: l'enfer du mariage, présenté comme la pire chose qui puisse arriver à un homme... Et les rapports hommes-femmes, présentés sous les formes les plus discutables: domination de l'un par l'autre, mensonge, tromperie, voire relations tarifées... C'est la France d'arrière-grand-papa qui s'agite sous nos yeux, celle dans laquelle on dit facilement "Ciel! mon mari!"... C'est vieillot, voire franchement réactionnaire, et ça a tendance à se parer des oripeaux d'un cinéma moderne, c'en est gênant.

Des circonstances atténuantes? En fait, oui: Molinaro, qui a tout fait et tout filmé, en bon faiseur durant des années, s'est révélé pour moi avec un court métrage absolument fabuleux, dans lequel il imitait avec élégance et verve le cinéma muet, sur un sujet d'ailleurs similaire à celui-ci... Ca s'appelait L'honneur est sauf, et le second degré bon enfant de l'ensemble était d'autant plus évident qu'il s'agissait d'un film muet, et assez rigoureux... Il sait composer une image, donner du rythme, et doser les performances quand c'est nécessaire: bref il a du métier... et sinon, le dialogue d'Audiard prouve qu'il s'est gentiment laissé aller et a tricoté pour certains moments, des petits bojoux anthologiques, au milieu de ce cloaque de conventions d'un autre âge et du théâtre de boulevard. Comme de juste, la palme revient à une apparition de Bernard Blier qui vaut le détour. Cinq minutes de pur bonheur lexical.

 

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Published by François Massarelli - dans Michel Audiard Edouard Molinaro Comédie
13 juillet 2023 4 13 /07 /juillet /2023 15:09

Germaine (Annie Girardot) est une femme de ménage: elle travaille pour trois personnes. D'une part, la présentatrice de télévision Francine (Mireille Darc), la maîtresse d'un politicien très en vue (Jean-Pierre Darras); ensuite, Alexandre Liéthard (Bernard Blier), un banquier solitaire; enfin, Monsieur Phalempin, éducateur (Sim) qui rêve d'emmener une troupe d'enfants défavorisés en baie de Somme...

Elle a repéré quelquesanomalies dans leurs vies et parcours, et décide de les mettres en relation afin de déclencher les inévitables vélléités de chantage chez les uns et les autres. Liéthard va donc faire chanter Francine dont le passé dans la prostitution de luxe est un handicap dans les ambitions, Phalempin va faire chanter Liéthard qui a tué son supérieur hiérarchique (Jean Le Poulain), et enfin Francine fait chanter Phalempin qui sous un déguisement de libellule, chante et danse dans un bar gay...

L'intérêt pour Germaine? Eh bien, laisser faire les choses et ramasser la mise à la sortie! C'est que Germaine ambitionne de mener grand train une vie d'oisive sur la côte d'azur, ce qu'elle ne manque jamais de nous rappeler...

Ce troisième long métrage de Michel Audiard est adapté d'un roman de Fred Kassak, Bonne vie et meurtres. Impossible pour moi de juger de la fidélité à l'oeuvre, n'ayant pas lu l'ouvrage... Mais le changement de titre, s'il en est, est certainement une indication! D'autant que c'est une fois de plus (Audiard était coutumier du fait et avait déjà sorti Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages en 1968... Et dès les cinq premières minutes, Girardot fait mentir deux des propositions du titre, en exhibant une Gitane et en venant se jeter un petit blanc au bar de Jean Carmet... et par ailleurs, elle ne cause pas tant que ça, après tout...

Bref, on est dans le monde d'Audiard, son pavé, ses friches industrielles Parisiennes, ses dialogues décalés avec des dérapages du côté de Musset voire Bossuet (ce que du moins le dialogue indique, mais j'ai des doutes)... On aime, ou pas. Le cinéma n'y trouvera peut-être que fort moyennement son compte, mais les collectionneurs de petites phrases y trouveront quelques bonheurs: "J'ai déjà vu des faux-culs, mais vous êtes une synthèse" (Blier à Sim), par exemple... Les nostalgiques du Blier capable de toutes les excentricités auront le bonheur de l'entendre très en beauté dans un dialogue qui est, mais pourquoi faudrait-il s'ên surprendre, le meilleur aspect du film: 

Micheline Luccionni: "Qui c'est le gros nounours à sa petite fifille? Qui c'est qui va faire un gros câlin, dans le grand dodo?" (on frappe avec véhémence) Bernard Blier, inquiet: "Qui c'est qui fait gros panpan à la poporte?"

Pour le reste, c'est sans surprise la France Pompidolienne, saisie dans ses codes, son hypocrisie, sa médiocrité: tout le monde se ment, dissimule, ou trompe ses amis ou amants... Dans ses transformations aussi, entre les fauxbourgs des années 30 et 40, et la modernité recherchée des futures années Chiraquiennes, et les évolutions probables de la société vues par un réalisateur et dialoguiste, anar de droite rigolard, et qui nous rappelle au passage, à travers une fort hypothétique rue L-F Céline, qu'il avait un passé de paria, lui aussi, ce qu'il semblait fort bien assumer... 

Quoi qu'il en soitAudiard a souvent montré plus le terminus des médiocres que celui des prétentieux, c'est sans doute ce qui fait le prix de ce petit film idiot et assez inoffensif. Et Annie Girardot s'y promène avec une sobriété rare, au milieu d'un parterre d'acteurs qui font tous honneur à la gentille excentricité de l'ensemble. 

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Michel Audiard
25 juin 2022 6 25 /06 /juin /2022 08:33

Arsène Baudu, escroc de son métier, est un minable... Et un jour, en essayant d'arnaquer Hyacinthe Camus, ancien policier révoqué devenu l'employé malheureux d'un détective privé, il ne sait pas qu'il vient de rencontrer, en quelque sorte, l'âme soeur... Un autre escroc en germe, tout aussi minable, mais avec de l'ambition.

Seulement, quand deux escrocs minables décident de s'attaquer à n'importe qui, ils peuvent tout à fait commettre la pire bêtise de débutants: tomber sur un autre escroc, mais autrement plus talentueux. C'est ainsi que Baudu (Jean Lefebvre) et Camus (Bernard Blier) vont rencontrer Alexandre Larsan-Bellac (Paul Meurisse), un monsieur qui a du cran, de l'ambition, de la jugeote, des idées, et qui va les prendre tous deux sous son aile pour s'attaquer à des victimes plus conséquentes, et tant qu'à faire essayer un coup double: monter un bobard monumental pour un pigeon en or (Michel Serrault) en lui faisant croire que le gouvernement soviétique est prêt à rembourser les fameux emprunts russes de sinistre mémoire, et de l'autre séduire une femme du monde richissime...

Un "faisan", en argot, c'est un escroc spécialisé dans le faux passage d'information commerciale. Ici, on a plus d'un exemple de ces personnes qui exploitent une faille psychologique de leurs victimes en prétendant leur fournir exactement ce dont ils rêvent, au bon moment. On peut faire confiance au binôme scénariste (Albert Simonin)-dialoguiste (Michel Audiard) pour se débrouiller d'une telle situation... Et Molinaro, qui a commencé résolument dans la comédie, commence brillamment son film, ave une narration au quart de tour, qui lui permet de camper très vite deux personnages magistralement définis et complémentaires. Il y a une magie particulière derrière l'association entre Blier et Lefebvre, qui en rappelle une autre... C'est un peu Laurel et Hardy, en moins poétique sans doute, mais le résultat, pour eux, sera toujours le même...

C'est pour ça qu'on tique un peu quand Meurisse (excellent pourtant, comme d'habitude) vient se placer entre eux, car il les sépare... C'est, à partir du deuxième tiers, une comédie plus convenue, drôle, ça oui, mais pas aussi allègre et qui fera définitivement moins d'étincelles... Bref, on rentre un peu dans le tout venant de la comédie policière française telle que la pratiquaient de nombreux metteurs en scène autour des dialogues de Michel Audiard. Et Lefebvre avec Meurisse et Blier, finit par disparaître purement et simplement...

 

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Published by François Massarelli - dans Edouard Molinaro Michel Audiard Comédie
24 juin 2022 5 24 /06 /juin /2022 16:54

Il faut croire que le cinéma parlant s'est bâti sur des faux courts métrages didactiques! Celui-ci, tourné quelques 17 ans avant le film suivant d'Audiard (Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages) est donc consacré au fait de marcher... Un historique aussi loufoque qu'approximatif précède une série de variations, toutes menées par une voix off commentant un montage de diverses sources.

On reconnaitra la voix de Maurice Biraud, qui par ailleurs interprète aussi, parfois, sur l'écran, des rôles de certains protagonistes, dont Littré soi-même. Le film s'amuse de situations, mais aussi d'expressions toutes faites, ce qui ne nous surprendra pas...

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Published by François Massarelli - dans Comédie Michel Audiard
22 août 2021 7 22 /08 /août /2021 14:21

Durant la quatrième République, à une date indéterminée, l'ancien président du conseil Emile Beaufort (Jean Gabin) est de nouveau dans l'actualité à la faveur d'une visite d'un ami paradoxal: le premier ministre Britannique, apparemment inamovible, a développé des rapports de complicité avec celui qui fut son pire ennemi... L'occasion pour le Président, comme on l'appelle encore selon le protocole, de ressasser ses souvenirs, en particulier ceux liés à la personnalité de son ancien directeur de Cabinet, Philippe Chalamont (Bernard Blier), justement pressenti pour être le prochain chef du gouvernement... 

Inspiré d'un roman de Simenon écrit en 1957, le film est indissociable de son contexte: la quatrième république, vu depuis notre régime présidentiel (dans lequel nombre de béotiens se croient exemptés de l'obligation de leur devoir électoral quand le scrutin est municipal, départemental, régional ou Européen), est finalement assez exotique: c'était, comme la troisième du reste, un système entièrement lié à l'assemblée nationale, où se faisaient et se défaisaient les gouvernements. L'homme fort du pays était, comme en Grande-Bretagne encore aujourd'hui ou en Italie, le président du conseil; nommé par le président, il devait d'abord être le chef d'une majorité, et rares sont ceux qui ont eu la chance d'être dotés de majorité absolue.

Du coup, c'était la valse des gouvernements: c'est ce qu'on voit dans le film: deux périodes vont être illustrées par des flash-backs: d'une part, une dévaluation, sujet sensible, décidée par le Président Beaufort mais objet d'une trahison; d'autre part une crise au moment où Chalamont, devenu député, s'oppose à Beaufort au sujet d'une utopie, la création des Etats-Unis d'Europe. Le grand oral de Gabin, pour utiliser une stupidité à la mode... L'occasion pour le "Président" de fustiger les politiciens de plus en plus affairistes, clientélistes et professionnels...

Le film est, à la fois, du pur Gabin et du pur Verneuil. L'un au service de l'autre, doté d'un parterre d'acteurs qui le mettent en valeur en permanence. On râlerait, mais ce serait pour la forme: c'est Gabin et il est très à l'aise dans ce personnage de vieux lion encore rugissant, qui se délecte de son pouvoir de nuisance face aux médiocres, incarnés bien évidemment par Blier. Audiard s'amuse mais pas trop, ce qui est généralement une très bonne nouvelle, et bien sûr, entre lui, Simenon et Gabin, il fallait s'attendre à ce que la politique en prenne pour son grade. Verneuil s'est fait plaisir dans les scènes d'assemblée, ça se voit, avec des mouvements de caméra lents et précis, et Gabin s'est glissé dans la peau d'un composite de Clémenceau (la verve, le côté incontournable, la fibre de gauche souple), d'Aristide Briand (l'obsession fédératrice à des fins pacifiques) et de Jaurès, ou de "ce pauvre Jaurès", comme il l'appelle (l'anti-colonialisme fervent)...

 

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Published by François Massarelli - dans Henri Verneuil Michel Audiard
26 juillet 2021 1 26 /07 /juillet /2021 11:07

Paris: un prévenu, Gérard Louvier (Gérard Lanvin), minable petit cambrioleur certain d'écoper de 10 ans au moins, s'évade le jour de sa confrontation avec un juge. Il emprunte le costume formel d'un magistrat, et est confondu avec le célèbre juge Simon par une jeune femme, la journaliste Julie Boucher (Miou-Miou): celle-ci est "montée" de Nice à Paris pour trouver de l'aide, car elle a découvert une affaire louche qui lui a valu son poste, et elle a manifestement bien besoin d'un juge anti-corruption dans sa vie. Le couple mal assorti se rend donc à Nice...

Le film, scénarisé par Poiré et Audiard, reçoit un peu des deux: au vétéran de fournir tout ce qui concerne la parodie de film noir, et on retrouve sa patte et surtout celle de Lautner dans l'exposition et le traitement sérieux et frontal de l'évasion, de la passion de Julie pour sa cause et de la façon dont la petite troupe va utiliser des moyens pas toujours très orthodoxes pour faire triompher la justice... On sent en effet Lautner bien à la manoeuvre, d'autant qu'il donne un rôle (une bourgeoise une peu, pour reprendre le mot de Miou-Miou, salope sur les bords) à sa môman, la fidèle Renée St-Cyr... 

Poiré, quant à lui, est sans doute plus présent dans les marivaudages entre le faux juge, la journaliste libérée et ses ex, et ex ex: de belles participations de Henri Guybet (qui parle fort) et de Jean-Pierre Daroussin (en amoureux éconduit, auquel il réussit à donner une vraie substance). Servi par des dialogues incisifs, le film semble osciller entre la libération des moeurs des années 70, et une nouvelle ère faite d'une recherche par Julie de confort émotionnel... Le film suivant de l'actrice et de Lautner ira plus loin dans cette direction en faisant l'impasse sur le film noir.

Parce qu'il faut bien le dire, sans grande surprise, le film est certes aimable et fort sympathique, par moment plus réussi que d'autres (dans la première partie, Julie ne sait pas qui est ce "juge" en réalité, et les deux héros vont manger dans un restaurant sur la route et bien sûr il est fréquenté par la police... ), avec ses clins d'oeil à n'en plus finir: oui, il y a encore un Volfoni. Lautner aurait-il besoin d'un "label" Lautner-Audiard pour sa petite entreprise? Au vu des répugnants films réalisé à la même époque avec Belmondo à son plus infect, dont le quasi ouvertement fasciste Le professionnel, ça me semble une évidence. 

Heureusement, ce petit film gentiment anar est si sympathique, au fond.

 

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Published by François Massarelli - dans Georges Lautner Comédie Michel Audiard
26 février 2020 3 26 /02 /février /2020 08:30

Titre à rallonge, mise en scène absente, dialogues extravagants, mise en abyme de la révolution sexuelle et de ses provocations: pas de doute, on est chez Audiard. Il ne me viendrait pas à l'idée de critiquer ce film comme je peux le faire pour n'importe quelle comédie française des années 60: c'est impossible tant le réalisateur est aux abonnés absents.

J'ai plusieurs hypothèses... comme l'explique doctement un spécialiste sur les suppléments du blu-ray de ce film, Audiard se serait senti dépossédé, trahi en quelque sorte, car ayant écrit tant de films, c'est toujours au metteur en scène qu'on se serait référé... Deux commentaires: d'une part, pourquoi ferait-on autrement? Quand les scénaristes comprendront-ils qu'ils ne sont pas vraiment les auteurs d'un film qu'un autre à mis en scène? D'autre part, il serait malvenu d'émettre cette hypothèse aujourd'hui, quand il faut se battre pour rappeler qu'Audiard n'a pas mis en scène, par exemple, Les tontons flingueurs... Non mais.

Autre hypothèse: Audiard, comme tant de scénaristes avant et après lui, comme les trois quarts du public aussi, était sans doute persuadé d'être l'auteur de ces films et qu'il lui suffirait d'écrire deux, trois répliques qui flinguent et d'apparaître sur le plateau pour "faire un film"... Dont acte: maintenant vous m'autoriserez à douter quand même de l'efficacité de la formule.

Enfin, peut-être, tout simplement, lui a-t-on proposé, et a-t-il accepté, d'autant que l'aubaine était lucrative. Ca ne l'a pas empêché, quelques années plus tard, d'arrêter de mettre en scène, et de juger bien sévèrement sa production!

Quoi qu'il en soit, voici ce film raté, qui doit autant aux parodies baroques de Lautner, qu'au dessin animé (la façon dont les voitures explosent, la palette de couleurs franches et l'attrait du gag), au rythme absent, aux transgressions permanentes (des personnages qui passent leur temps à s'adresser à la caméra) et aux répliques devenues légendaires:

Blier: J'ai bon caractère, mais j'ai le glaive vengeur et le bras séculier. L'aigle va fondre sur la vieille buse!

ou encore:

Françoise Rosay: Tends lui la main, Fred!

André Pousse: si je la lui tends, ce sera en travers de la gueule!

Bref, qu'on le veuille ou non, ce film foutraque, mou du genou, idiot (mais alors vraiment idiot) fait partie du paysage, et distille incidemment, presque sans le vouloir tant ça donne l'impression d'avoir été fait pour payer ses impôts par un cynique gonflé, un plaisir certes coupable, mais que voulez-vous? ... Françoise Rosay en mamie flingueuse, Blier et Pousse en frères ennemis tendant aux aphorismes, et Marlène Jobert mutine et divine (et court-vêtue, ce qu'on ne manquera pas de remarquer dès la première scène... Tiens, même Rosay l'a remarqué!) qui prend un plaisir certain à formuler les répliques que lui a ciselées Audiard... On n'est pas de bois, que voulez-vous.

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Michel Audiard
20 octobre 2019 7 20 /10 /octobre /2019 19:32

Un film, une lanterne, trois parties: les deux premières sont signées de Gilles Grangier, la dernière de Lautner. Le script est lui de Simonin, et les dialogues de Michel Audiard dont la verve est particulièrement présente: c'est qu'il est ici question d'un contexte historique particulier, celui de fermeture "par l'intolérance" des maisons dite de tolérance. Qu'on se le dise tout de suite, le film n'est ni un plaidoyer, ni un aperçu nostalgique, juste un récit goguenard en trois actes, qui fustige le bourgeois à travers l'histoire d'un ironique retournement de situation...

La fermeture: Bernard Blier est le taulier d'une maison qui ferme, donc, à l'heure dite. On assiste aux préparatifs de départ des petites pensionnaires, et aux lamentations des têtes pensantes de l'entreprise comme du petit personnel... Et puis Blier est à la fête! Sinon, on pose dans cette partie des liens avec les deux suivantes: on y fait allusion à Lucette, une fille qui est partie, et qui reviendra dans la deuxième partie. On décide d'un cadeau à lui faire: l'emblématique lanterne...

Le procès: c'est celui d'un malfrat joué par Jean Lefebvre: il a commis un cambriolage chez la baronne Seychelles du Hautpas, née Lucette Granu (Andrea Parisy): bien qu'il ait subtilisé des fortunes en bijoux (qu'il a tous restitués), le cambrioleur est accusé d'avoir volé une lanterne qui n'a pas été retrouvée... Le procès vire au grand n'importe quoi, avec le retour de Blier en témoin lyrique d'une époque révolue.

Et justement, la lanterne revient dans le troisième épisode, Les bons vivants: elle avait été volée par le complice de Lefebvre, joué par Carmet, et Louis de Funès l'achète, semble-t-il pour décorer sa maison à la fin d'un sketch hallucinant où le brave homme, un bourgeois rigoureux, bon et vertueux, offre l'asile à une prostituée (Mireille Darc) puis les choses évoluent, jusqu'à ce que son auguste domicile se transforme en une véritable maison close, semble-t-il sans qu'il en ait eu connaissance...

Sur ce sketch rigolo, les complices qui sont derrière la caméra se paient effectivement la fiole du bon bourgeois de province, ce qui poussa les bonnes gens et autres pères-la-pudeur à vilipender le film, alors que sa principale qualité, justement, est de ne pas trop se prendre au sérieux... 

 

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Published by François Massarelli - dans Comédie Georges Lautner Michel Audiard